• Notre-Dame de Grâce à Loos

     

     

     

    Notre-Dame de Grâce (Loos)

     

    Prière à Notre-Dame de Grâce de Loos

     

    Prière à Notre-Dame de Grâce de Loos

     

     

    Notre-Dame de Grâce a une touchante origine. Les religieux bénédictins de Loos avaient placé sous un tilleul, planté près de la route de Béthune, une image de la Vierge ; et dirigeant ordinairement leurs promenades vers ce tilleul, ils s'arrêtaient devant l'image de Marie pour y chanter ses louanges.

    Ce bon exemple engagea les fidèles à faire de même ; et bientôt des grâces nombreuses obtenues en ce lieu rendirent célèbre Notre-Dame de Loos, jusqu'à y attirer une foule de pèlerins.

    Depuis 1544, les miracles même y étaient fréquents ; mais toutefois les récits qu'on en faisait étaient sans contrôle de l'autorité ecclésiastique.

    En 1581, l'évêque de Tournai nomma des notaires apostoliques, pour dresser procès-verbal des prodiges qui s'y opéraient, pour recevoir les dépositions, examiner et confronter les témoins.

    Le premier prodige dont prirent acte les notaires eut lieu le 23 août de cette année 1581.

    Jacques Dubois, habitant de Lille, ne pouvait plus, depuis longtemps, par suite d'une apoplexie violente, faire aucun mouvement. Il implore avec confiance Notre-Dame de Loos, et, contre toute espérance humaine, il recouvre une santé parfaite.

    Le 20 mai suivant, madame de Varennes, percluse de tous ses membres, recouvre, aux pieds de Notre-Dame où elle s'était fait porter, une entière guérison.

    Ces miracles et plusieurs autres attirant une foule de plus en plus nombreuse, on bâtit à la place du tilleul une chapelle, où les fidèles pussent au moins prier a l'abri ; et, en 1591, l'évêque de Tournai la bénit.

    Bientôt elle fut trouvée trop petite ; on en éleva une plus grande que l'évêque bénit de même en 1611 ; et la sainte Vierge répandit si abondamment ses faveurs en cette nouvelle chapelle, que le peuple l'appela Notre-Dame de Grâce.

    L'impiété ne put supporter le spectacle d'une dévotion si générale a la sainte Vierge ; et, dans sa rage, elle vola, pendant la nuit, l'image vénérée ; mais son triomphe dura peu.

    On remplaça la statue dérobée par une autre parfaitement semblable, qu'on honorait dans le chœur du monastère ; et le pèlerinage, au lieu de perdre de sa célébrité, sembla s'accroître, au point qu'on compta à certains jours jusqu'à vingt mille pèlerins.

    La sainte Vierge de son côté multiplia ses faveurs dans la proportion du nombre et de la piété de ses visiteurs.

    Les Mémoires de dom Jean de la Barte rapportent plus de cent guérisons miraculeuses dont plusieurs avaient été enregistrées par l'ordre de l'évêque de Tournai, et les autres attestées avec serment par les médecins.

    Sous la date de 1591, les auteurs contemporains qui écrivaient d'après les procès-verbaux juridiques des notaires apostoliques, ou qui avaient été eux-mêmes témoins de ces faits prodigieux, ne craignaient pas d'appliquer ici les paroles de l'Evangile : Les aveugles voient, les muets partent, tes sourds entendent, les boiteux marchent, les paralytiques sont guéris.

    Et en effet, dans le cours de cette année, Isabelle Desquarrechins, de Lille, sourde et muette, recouvre à Loos l'usage de l'ouïe et de la parole ; Martin Bataille, Pasques Deleporte et le fils de Jean du Boquet, imbéciles et muets, y retrouvent la raison, et leur langue se dénoue ; Marguerite Valois et Pierre le Brun y sont guéris de la surdité ; douze paralytiques marchent et deux aveugles voient ; trois enfants morts ressuscitent et reçoivent le baptême ; et tous ces faits sont affirmés sous la foi du serment par des témoins oculaires. Les actes des miracles opérés cette même année contiennent les noms de vingt-quatre autres personnes guéries tout à coup de leurs infirmités.

    Enfin, Jean Gambier, échevin d'Aire, échappe, par l'invocation de Notre-Dame de Loos, à des bandits qui le tenaient garrotté : les bandits s'endorment d'un sommeil profond , ses liens se rompent, et il revient à Lille, bénissant Marie de sa délivrance.

    En 1592 et les années suivantes, les miracles continuent.

    En 1600, l'archiduc Albert et Isabelle son épouse, frappés de ces prodiges, font don à Notre-Dame de Grâce d'une lampe d'argent artistement travaillée, et fondent une rente annuelle de trente-cinq florins pour l'entretien du luminaire.

    De 1604 à 1607, Catherine Bayart et Anne de Baillancourt sont subitement guéries aux pieds de la sainte image, devant un peuple immense, d'une paralysie qui les faisait souffrir, l'une depuis trois ans, l'autre depuis deux années.

    Anne d'Apleterre, religieuse de Marquette, voit se fermer et disparaître entièrement, dans la sainte chapelle, une plaie que les médecins déclaraient incurable.

    En 1611, Angélique Dugardin, jeune aveugle de six ans, recouvre la vue.

    Si, pendant les dix-sept années qui suivirent, on négligea de constater les prodiges, des actes publics trouvés en 1627 constatent plusieurs autres guérisons miraculeuses, qu'il serait trop long de rapporter.

    En 1635, la guerre qui survint entre la France et l'Espagne obligea de transporter a Lille la statue vénérée. Placée d'abord dans la chapelle de la sainte Trinité, puis dans la chapelle du Refuge, elle fut restituée a Loos en 1660 ; et cette translation se fit avec la plus grande solennité, au son de la grosse cloche, au milieu des chants de l'allégresse publique et en présence d'une immense multitude.

    En 1681, on remplaça l'ancienne église par une autre beaucoup plus belle et plus grande ; et ce nouveau temple eut la gloire de recevoir l'électeur de Cologne Joseph-Clément, pendant les quatre années qu'il demeura réfugié a Lille, c'est-à-dire de 1706 a 1710.

    C'était là qu'il allait régulièrement, tous les samedis, prier Notre-Dame de Grâce ; là, il prit la résolution d'entrer dans le sacerdoce ; là il reçut le sous-diaconat après une retraite commencée sous la direction de Fénelon ; et, à son départ, il y laissa, avec de riches présents, l'aube et la tunique de son ordination, ainsi que son portrait en relief et en argent, renfermé dans un cadre de vermeil, orné de ciselures, accompagné de ses armes que portaient deux anges. Ce dernier don était un ex-voto pour l'extinction de l'incendie, qui avait pris à son palais, et qui s'éteignit au même instant où il invoqua Notre-Dame de Loos.

    Vers le même temps, le prince Eugène de Savoie, à la tête d'une armée dont les deux tiers étaient protestants, ayant envahi le pays, on cru prudent de retirer la sainte image de l'abbaye de Loos, et de la transporter à la chapelle du Refuge, où elle serait plus à l'abri des insultes de l'ennemi.

    Cette translation se fit au milieu des cris de douleur de tout le peuple, qui, en perdant sa statue vénérée, croyait perdre sa garantie la plus sûre contre tout malheur.

    La chapelle resta ainsi veuve de son image jusqu'à la révolution française, où, après avoir été vendue, comme domaine national, elle s'écroula entièrement.

    Quant a la statue miraculeuse, conservée parles soins d'un pieux fidèle, elle fut placée, vers l'an 1800, dans l'église paroissiale de Loos, et, depuis ce temps, elle n'a cessé d'y être vénérée.

    Au mois d'août 1832, lorsque le choléra sévissait à Lille avec la plus grande intensité, les sœurs de charité qui dirigeaient l'hôpital général conduisirent en pèlerinage à Notre-Dame de Grâce ceux de leurs pauvres qui pouvaient s'y rendre ; immédiatement après, la mortalité décrut d'une manière sensible, et bientôt l'épidémie disparut de ce vaste établissement, tandis qu'elle continuait ses ravages partout ailleurs.

    Ce fait et plusieurs autres ayant accru le nombre des pèlerins qui venaient chaque jour prier Notre-Dame de Grâce, on jugea nécessaire de remplacer la petite église par un temple plus vaste.

    On se mit a l'œuvre ; et, le 20 octobre 1835, on bénissait la nouvelle église, qui est restée un des pèlerinages les plus fréquentés de toute la contrée.

    De nombreux ex-voto en tapissaient les murailles, et de superbes ornements en couvraient la sainte image, lorsque, vers la fin de mai 1847, des malfaiteurs, s'y introduisant pendant la nuit, en enlevèrent toutes les richesses.

    On ne saurait dire combien grande fut, à cette nouvelle, la désolation publique.

    On voulut offrir à Marie une réparation solennelle ; et, le 11 juillet, eut lieu une cérémonie expiatoire qui fit couler les larmes de tous les yeux.

    On plaça sur la tête de la sainte Vierge et celle de l'Enfant Jésus une couronne d'or ; on suspendit à leur cou une chaîne également d'or d'un très grand prix ; et il y eut ensuite une communion générale des plus ferventes ; de sorte que l'on peut dire que la dévotion et la piété surabondèrent, là où avaient abondé la malice et le sacrilège.

     

    Source : Livre "Notre-Dame de France ou Histoire du culte de la Sainte Vierge en ..., Volume 2" par André Jean Marie Hamon

     

     

    Les détails que nous allons donner sur l'origine de Loos, nous les empruntons à un écrit tiré à un très-petit nombre d'exemplaires, et composé à l'occasion de la bénédiction de la nouvelle église, par M. Leglay, conservateur des archives du département du Nord. Cet écrivain joint à la pureté des convictions religieuses un beau talent ; il nous serait impossible d'être plus exact et de dire aussi bien.

    Situé à une lieue de Lille, près des rives de la Haute-Deûle, dans un des cantons les plus agréables, les plus fertiles et les mieux cultivés du pays, Loos, suivant la tradition, était, au XIIe siècle, le triste séjour de deux pauvres familles ; encore ces malheureux avaient-ils déserté leurs chétifs réduits, devenus inhabitables par suite des inondations et des tempêtes qui, vers l'an 1140, désolèrent les quartiers de Weppe et de Mélantois. La famine et la contagion avaient suivi ces désastres, et le sage gouvernement du comte Thierri ne pouvait apporter que de faibles remèdes à un si triste état de choses. Il fallait que les consolations et les secours vinssent de plus haut.

     

     

    Saint Bernard avait établi, tout récemment, ses moines laborieux dans les landes incultes de Vaucelles, que lui avait cédées Hugues d'Oisy, terrible et redouté seigneur. Thierri d'Alsace, qui n'avait pas à expier les mêmes méfaits que le sire d'Oisy, voulut, à son exemple , attirer sur ses terres ces hommes de Dieu, qui savaient si bien prier et travailler.... Il s'adressa donc au saint et célèbre abbé de Clairvaux. Bernard accourut : les sires de Duremont, d'Annekin et de Prémesques furent ravis de pouvoir vendre les domaines infructueux qu'ils possédaient dans ces pays.

    La comtesse de Flandre, Sibylle d'Anjotf, fille d'un roi de Jérusalem, prit à cœur la pieuse fondation ; elle alla elfe-même chercher, dans ces prairies inondées, le lieu où devait s'élever l'abbaye.... Et quand les pauvres villageois aperçurent la belle et noble comtesse qui les visitait avec le saint vieillard, ils s'écrièrent : Loos Notre-Dame !

     

    Bientôt les Frères maçons se mirent à l'œuvre ; et murs et tours s'élevèrent ; voûtes, arceaux et ogives s'arrondirent. Cependant des rigoles se creusaient ; la bêche traçait aux eaux stagnantes une issue facile, et, peu à peu, l'humide prairie se convertissait en champs labourables. Ainsi prit naissance l'abbaye de Loos, et ainsi se forma le village ; car partout où il y a paix, travail et religion, les hommes s'y portent et aiment à s'y fixer.

    On connaît la tendre dévotion de saint Bernard pour la Mère de Dieu. Les enfants ne pouvaient pas dégénérer de leur père, et une de leurs pieuses industries, pour accroître encore le culte de la Reine des anges, déjà si répandu dans notre beau et catholique pays, avait été de placer l'image de cette Vierge bénie sous un magnifique tilleul, qui, planté non loin de la route de Béthune, s'élevait dans les airs comme un dôme verdoyant. Les religieux dirigeaient ordinairement leur promenade vers ce tilleul ; ils s'arrêtaient devant l'image de Marie, pour y chanter ses louanges, et bientôt la sainte Vierge rendit ce lieu célèbre par les grâces sans nombre qu'elle répandit, et par la foule des pèlerins qu'elle attira.

    Elle y avait opéré des miracles avant l'année 1544 ; mais la célébrité de ce lieu date surtout de l'année 1581. C'est aussi à cette époque que l'évêque de Tournai, Jean de Vendeville, nomma des notaires apostoliques pour tenir acte des prodiges qui s'y faisaient, recevoir les dépositions, examiner et confronter les témoins.

    Le premier miracle consigné par les notaires apostoliques eut lieu le 23 avril de la même année 1581. Jacques Dubois, habitant de Lille, ne pouvait plus, depuis longtemps, par suite d'une violente attaque d'apoplexie, faire le moindre mouvement. Il réclama avec confiance le secours de Notre-Dame de Loos, et, contre toute espérance humaine, il recouvra une santé parfaite.

    Le 20 mai suivant, Mme de Varennes, de la maison de Haynin, étant percluse de tous ses membres, se fit transporter aux pieds de l'image de Notre-Dame. Sa foi fut également récompensée, sur les lieux même, par une entière guérison. Cette dame était connue par sa piété, par la noblesse de son extraction, et plus encore par ses bonnes œuvres. Le bruit de sa guérison se répandit au loin, et l'attrait des fidèles pour la Vierge de Loos s'en accrut considérablement. Tous les cœurs malades, toutes les âmes affligées, toutes les misères et toutes les langueurs, vinrent puiser à cette source de consolations qui devenait chaque jour plus abondante.

     

    Le vieux tilleul, qui abritait l'image vénérée, ne pouvant plus protéger de son feuillage les troupes nombreuses qui venaient à chaque instant réclamer la puissante intercession de Marie, on résolut de remplacer l'arbre antique par une chapelle d'une construction régulière et plus appropriée à la commodité des fidèles. Mme de Varennes fournit les matériaux ; Matthieu et Jean Meurisse donnèrent le champ où le tilleul était planté. Dom Carpentier et Mgr. Jean de Vendeville voulurent aussi contribuer, par leurs largesses, à cette bonne œuvre, et la chapelle fut achevée en 1391. Jean de Vendeville la bénit la même année ; plus tard elle fut agrandie, et Michel d'Esnes, qui monta sur le siége de Tournai en 1596, vint, dans le courant du mois de Juillet de l'année 1611, faire la bénédiction des constructions nouvelles.

    L'ouverture de cette chapelle attira un grand concours de peuple ; l'élan fut général, et s'étendit au loin. Les fidèles, par leur empressement, protestaient contre les nouvelles doctrines déjà répandues dans les Pays-Bas, où l'on traitait d'idolâtrie le culte des saintes images. De son côté, la Mère de Dieu répandit les faveurs avec une si grande abondance, que le peuple lui donna, dans le sanctuaire de Loos, le titre de Notre-Dame de grâce.

    Cependant l'erreur frémissait, et l'impiété inspira à quelques misérables l'idée de venir, pendant la nuit, enlever l'image vénérée. Ils laissèrent dans la chapelle un écrit où ils se vantaient de ce larcin sacrilège, et ils développaient longuement les motifs anticatholiques qui les avaient déterminés à l'exécuter. Les faibles se scandalisèrent, la piété se ralentit, mais le triomphe de l'hérésie fut de courte durée.

    Il se trouvait dans le chœur du monastère, au-dessus de la stalle du prieur, une image exactement semblable à celle qui avait été dérobée. Dom Carpentier, abbé du monastère, la fit porter solennellement dans la chapelle, et le pieux évêque, Jean de Vendeville, fit une seconde fois le voyage de Loos pour la bénir. Ce saint prélat, dans un discours touchant et pathétique, invita les fidèles à continuer de venir dans ce lieu rendre à la sainte Vierge un culte qui lui était agréable, puisqu'elle l'autorisait par des miracles. Il assura que la perte de la première image ne tarirait pas la source des grâces, parce que la sainte Vierge avait choisi cet endroit pour y être particulièrement honorée. Marie ne tarda pas à réaliser la promesse qui avait été faite par le premier pasteur, et bientôt, dit Buzelin, il n'y eut pas, dans la contrée, de pèlerinage plus célèbre et plus fréquenté. Au rapport de l'auteur, qui a composé l'histoire manuscrite déjà citée, on comptait à certains jours jusqu'à vingt mille pèlerins ; et les guérisons miraculeuses qui se firent depuis, dans la chapelle de Notre-Dame de Loos, furent si fréquentes, que Dom Jean de la Barre, dans les mémoires qu'il avait laissés, en rapportait plus de cent, dont plusieurs ont été enregistrées par l'ordre de l'évêque de Tournai, et les autres attestées avec serment par les médecins.

    Sous la date de 1591, les auteurs contemporains, qui écrivent d'après les procès juridiques des notaires apostoliques, ou qui avaient été eux-mêmes témoins de ces faits prodigieux, citent une multitude de miracles, dont un grand nombre sont du premier ordre. Les aveugles voient, disent-ils, les muets parlent, les sourds entendent, les boiteux marchent, les paralytiques sont guéris. On formerait facilement un volume du récit de tous ces prodiges, mais nous ne voulons écrire qu'une courte notice. Dans la nécessité où nous sommes de nous borner, nous allons faire un choix et abréger.

    En 1591, Isabelle Desquarrechins, de Lille, sourde et muette, recouvre l'usage de la parole et de l'ouïe, dans la chapelle de Loos. Martin Bataille, de Cysoing, imbécile et muet, y retrouve la raison et sa langue se dénoue. Pasques Deleporte, et le fils de Jean du Boquet y reçoivent la même faveur. Pierre Lebrun, receveur du baron d'Aubigny, et Marguerite Valois, y sont délivrés d'une surdité qui avait résisté à tous les remèdes.

    On compte douze paralytiques et deux aveugles guéris. Trois enfants, morts dans le sein de leur mère, sont placés sur l'autel de Marie, et, à la grande admiration des assistants, après la célébration de la messe, ils reprennent une nouvelle vie. Le chapelain, Jean Nonclercq, les baptisa ; on choisit les parrains et marraines parmi les témoins oculaires ; tous ont déposé juridiquement et affirmé avec serment ce qu'ils avaient vu de leurs yeux. Les actes des miracles, arrivés cette année, contiennent en outre les noms de vingt-quatre personnes qui, venues de Paris, de Calais et de Doulens, à Notre-Dame de Loos, y ont été guéries tout-à-coup de leurs infirmités.

    Mais un fait qui, au rapport de Buzelin, fit surtout sensation, fut la délivrance miraculeuse de Jean Cambier, échevin d'Aire. Il se rendait à Gand pour les affaires de son commerce, lorsqu'arrivé à Vive-Saint-Éloi, il est pris par une bande de voleurs. Après l'avoir étroitement garrotté, ils l'entraînent dans un bois voisin, décidés à ne le relâcher que moyennant une somme d'argent fort considérable. Les voleurs le gardèrent ainsi une nuit entière. Ils le tenaient au milieu d'eux, toujours chargé de chaînes, et, au moindre mouvement qu'il aurait fait, il était menacé de mort. Dans cette perplexité, Jean Cambier se souvient des miracles opérés par Notre-Dame de Loos ; il l'invoque, et à peine a-t-il terminé sa prière, qu'un sommeil profond tombe tout-à-coup sur les yeux de ses affreux gardiens ; ses mains se trouvent dégagées de leurs liens ; il passe à travers les brigands qui demeurent profondément endormis, et il arrive heureusement à Lille, publiant partout combien Notre-Dame de Loos lui a été secourable. Il devint plus tard un des bienfaiteurs de la chapelle, et contribua beaucoup à son embellissement.

    En 1592 et les années suivantes, Pasquier Croisier, de Béthune, recouvre la vue, et Anne de Braye, de Tournai, la parole. Michèle de Maede, femme espagnole, avait perdu l'œil gauche depuis un an ; elle vient prier Notre-Dame de Loos, et elle obtient la grâce qu'elle sollicitait. Cinq paralytiques sont guéris ; neuf enfants, morts avant que de naître, sont rappelés à la vie et reçoivent le baptême.

     

    Douze malades, venus de différentes contrées, sont délivrés, les uns de la pierre, les autres de la paralysie ; ceux-ci du cancer, ceux-là de la léthargie ou de l'épilepsie.

    En 1600, l'archiduc Albert et Isabelle, son épouse, venus à Lille pour jurer de maintenir les privilèges de la cité, ne voulurent pas quitter le pays sans visiter le sanctuaire de Loos, célèbre au loin par tant de miracles. Ils savaient, ces puissants de la terre, dit M. Leglay, eux qui refusèrent deux fois la couronne impériale, ils savaient que la grandeur a aussi ses amertumes, et que ce n'est pas seulement pour le peuple et les pauvres que Marie a été proclamée la Consolatrice des affligés. Ils firent don à Notre-Dame d'une lampe d'argent artistement travaillée et fondèrent une rente de vingt-cinq florins par an, pour l'entretien du luminaire. Les lettres patentes qu'ils expédièrent, après leur retour à Bruxelles, sont du 27 juin 1600, et du 13 janvier 1611.

    De 1604 à 1607, Catherine Bayart, religieuse de Roesbreughe, qui depuis trois ans était frappée d'une paralysie complète, se fait transporter dans la chapelle de Loos. Elle y prie avec ferveur, et se sent touchée comme par une main céleste qui la rétablit d'une manière parfaite, à la vue de ses parents et d'un peuple immense.

     

     

    Madame Anne d'Apleterre, religieuse de Marquette, gardait le lit depuis six mois, à cause d'une plaie fort dangereuse. Les médecins avaient déclaré le mal sans remède, et la malade, disaient-ils, n'avait plus qu'à se préparer à la mort. Elle se fit porter à la sainte chapelle, et Notre-Dame de Loos la sauva.

    Madame Anne de Barlette, dite de Baillencourt, religieuse du même monastère, qui, deux ans auparavant, avait été guérie d'une paralysie dans la sainte chapelle, s'en trouve frappée de nouveau. Il lui était impossible de faire le moindre mouvement. Elle se fait apporter à Loos, devant l'image miraculeuse, et elle s'en retourne complètement guérie à son monastère.

    Le 17 juin 1611, une jeune aveugle, Angélique Dugardin, âgée d'environ six ans, recouvre la vue. L'ex-voto donné par ses parents se voit encore de nos jours dans la sacristie de l'église de Loos.

    Pendant les dix-sept ans qui suivirent, la source des prodiges s'arrêta, ou plutôt on négligea de les constater. « Jean de la Barre, dit l'auteur de l'histoire manuscrite de Loos, se plaint avec raison que la connaissance d'un grand nombre de miracles n'est pas venue jusqu'à nous, par la négligence des chapelains à les annoter. On s'en plaint encore aujourd'hui, et cependant cette négligence se continue, car il se fait encore de nos jours bien des miracles que l'on n'a pas soin d'enregistrer. »

     

    Il en rapporte ensuite plusieurs arrivés récemment, mais il les rapporte, comme nous le faisons après lui, avec les réserves commandées par le saint concile de Trente. « De nos jours, dit-il, un enfant était tombé dans l'eau, au rivage de Lille ; il en fut retiré mort, et jugé tel par les médecins. Sa mère invoque Notre-Dame de Loos, et à l'instant l'enfant donne signe de vie, et il n'est mort que longtemps après.

    Un autre enfant avait été enlevé par des saltimbanques ; ses malheureux parents se désolent ; dans leur douleur ils implorent le secours de la sainte Vierge, et bientôt ils retrouvent leur enfant d'une manière extraordinaire. »

    En 1627, nous trouvons les actes constatant la guérison de Catherine Naillet, qui était aveugle ; de Michel Oudart, qui depuis longtemps était paralysé ; d'Anne Laourse, affligée d'un mal dont l'unique remède était une amputation douloureuse ; de Marie de Renty, femme d'une naissance illustre, et qu'une contraction de nerfs aux genoux, causée par de cuisants apostèmes, avait mise dans l'impossibilité absolue de marcher ; de Françoise Dabout, aussi paralytique, de Nicolas Descamps, religieux prémontré, incommodé d'une hernie ; de Philippe de la Bassée, qui, possédé du démon, fut heureusement délivré dans la chapelle de Loos.

    La guerre s'étant allumée entre la France et l'Espagne, on transféra, en 1635, l'image miraculeuse dans la chapelle de la Sainte-Trinité, rue des Malades, à Lille. De là elle fut portée, en 1649, sous le gouvernement de dom Foucart, trente-troisième abbé de Loos, dans la chapelle du refuge, que les religieux de Saint-Bernard avaient alors à Lille, sur la paroisse de Sainte-Catherine ; elle ne fut rendue à son sanctuaire de Loos qu'en 1660.

    Cette translation se fit avec toute la pompe imaginable, et au son de l'Emmanuel. C'était, de toutes les cloches de la ville, la plus belle et la plus sonore ; elle se trouvait dans la tour de l'ancienne église de Saint-Etienne, et on ne la sonnait que pour les cérémonies les plus solennelles. Une musique nombreuse, les différents ordres religieux, et une grande multitude de peuple assistèrent à cette translation. Dom Duquesne, trente-quatrième abbé de Loos, y présidait.

    Vingt et un ans s'écoulèrent ; il y en avait quatre-vingt-dix que la première chapelle avait été construite, lorsque dom Taverne, trente-cinquième abbé de Loos, la fit abattre pour en élever une autre, à la même place, beaucoup plus belle, plus ample, et plus digne de la Mère de Dieu.

    C'était une magnifique rotonde, revêtue dans l'intérieur de pierres de taille parfaitement sculptées. On y voyait un chœur pavé de marbre blanc et noir, et deux autels collatéraux. L'un de ces deux autels avait été dédié sous l'invocation de Saint Joseph, et l'autre sous l'invocation de Saint-Bernard. L'image miraculeuse apparaissait dans une niche au-dessus du maître-autel. Ce maître-autel était en bois, mais d'un travail fort riche. On admirait aussi, dans cette chapelle, les statues de quatre saints docteurs et quelques tableaux estimés. La sacristie était richement fournie en vases sacrés et en ornements sacerdotaux. L'électeur de Cologne, Joseph Clément, trouvait la chapelle de Notre-Dame de Loos plus belle et plus riche que celle du palais de Versailles.

    On sait que ce prince, dans la guerre de succession, ne voulant pas se déclarer contre son neveu, le duc d'Anjou, appelé à la couronne d'Espagne par le testament de Charles, avait reçu garnison française dans la citadelle de Liége, et ensuite dans toutes ses places. Mais les Hollandais étaient entrés par surprise dans Cologne, et Joseph Clément, mis au ban de l'empire, par un décret du 29 avril 1706, avec son frère électeur de Bavière, s'était réfugié à Lille pendant l'orage. Il y demeura quatre ans avec sa cour, et durant ce temps, on le vit se rendre à la chapelle de NotreDame de Loos tous les samedis, pour y faire célébrer, devant lui, la sainte messe ; dès qu'il fut prêtre, il la célébra lui-même.

    Ce fut dans cette chapelle, comme il se plaisait à le reconnaître, et par l'intercession de la sainte Vierge qu'il reçut de Dieu l'honneur d'être appelé au sacerdoce ; ce fut là qu'il prit la résolution de se consacrer au Seigneur dans ce saint état.

    Pour se disposer au sous-diaconat, il avait commencé une retraite de quelques jours, sous la direction de Fénelon, l'illustre archevêque de Cambrai ; l'état de sa santé ne lui permit pas de la terminer. Il fut fait sous-diacre dans la chapelle de Notre-Dame de Loos ; il lui laissa l'aube et la tunique de son ordination, et y fit de fort riches présents. Il fut ordonné diacre peu de temps après, le 8 décembre 1706, et prêtre le jour de Noël ; le 1er mai de l'année suivante, il reçut la consécration épiscopale.

    Presqu'aussitôt qu'il se vit revêtu du pontificat, Joseph Clément, dans l'intention de rendre plus vénérable encore le sanctuaire de Marie et afin de donner une preuve nouvelle de la dévotion dont il était animé pour la Mère de Dieu, songea à faire lui-même la consécration de la chapelle de Notre-Dame de Loos. Le 16 juillet 1707, veille du jour de cette dédicace, il fit dresser, non loin du pieux sanctuaire, une tente magnifique et spacieuse ; sa musique y chanta les vêpres, en l'honneur des saints martyrs dont on devait placer les, reliques aux autels, et lui-même y présida, revêtu de ses habits pontificaux, et assisté de toute sa cour. La cérémonie de la consécration eut lieu le lendemain ; elle commença à six heures du matin, et dura jusques après midi.

    Parmi les riches présents faits par ce prince au sanctuaire de Notre-Dame de Loos, on remarquait son portrait. Il était d'argent et en relief, renfermé dans un cadre en vermeil, et orné de ciselures ; deux petits anges soutenaient les armes du prince : c'était un ex-voto, gage de la reconnaissance de Joseph Clément. Le feu ayant pris au palais qu'il occupait à Lille, rue de l'Abbiette, appelée maintenant rue de Tournai, le prince invoqua Notre-Dame de Grâce, et au même moment le feu s'éteiignit. Sur-le-champ il envoya à Notre-Dame de Loos le riche portrait, et le lendemain il vint lui-même rendre à la sainte Vierge ses actions de grâce.

    La sainte image fut bientôt forcée de quitter de nouveau son sanctuaire ; il fallut, en 1708, la dérober aux insultes d'une armée nombreuse qui inondait le pays, et dont les deux tiers se composaient de huguenots. Le prince Eugène de Savoie, qui commandait cette armée, logea avec le roi Auguste de Pologne à l'abbaye de Loos ; il la protégea ainsi par sa présence. Il donna l'ordre à ses troupes de respecter la sainte chapelle ; mais elle était privée de son image.

    On se ferait difficilement une idée de la désolation des habitants de Loos et des villages voisins, lorsqu'ils virent emporter celle qu'ils considéraient comme leur palladium. On n'entendit sur toute la route que des cris de douleur et des sanglots. « Qu'allaient-ils devenir au milieu des alarmes et des dangers qui les menaçaient ? Où iraient-ils puiser la force et la consolation ? La sainte image leur était enlevée, disaient-ils, au moment où sa présence leur était plus nécessaire. »

    La statue de Marie fut portée directement à la chapelle du refuge de Loos ; on l'exposa à la vénération du peuple dont l'affluence fut grande. Les prêtres, tant réguliers que séculiers, étaient obligés d'attendre longtemps leur tour pour célébrer la sainte messe devant l'image, et cependant les religieux de Loos ne se trouvaient point au refuge ; ils n'avaient point quitté leur monastère. Les bombes et les boulets qui tombaient fréquemment en cet endroit n'empêchaient pas les fidèles de s'y porter en foule ; il leur paraissait impossible qu'à l'ombre de cette image il leur arrivât quelque malheur.

    Nous lisons dans l'histoire manuscrite de l'abbaye de Loos que, pendant le temps où les Hollandais occupèrent Lille, deux soldats français, en garnison à Béthune, firent une course jusqu'à Wazemmes, entrèrent de nuit dans une écurie, et enlevèrent un cheval. La maîtresse du logis avait entendu le bruit et s'était levée ; elle court à l'écurie, et ne trouve plus le cheval ! C'était pour elle une grande perte, ce cheval faisait à peu près toute sa richesse. Elle tombe à genoux ; elle invoque Notre-Dame de Grâce ; et voilà qu'après quelques minutes, elle entend le galop de l'animal ; il rentre à l'écurie. Arrivé près de la chapelle de NotreDame de Loos, le cheval n'avait plus voulu marcher ; les soldats eurent beau le presser, le frapper, tout fut inutile, l'animal refusa d'avancer. Les soldats l'avaient donc laissé, et il était revenu droit à la maison de son maître. Le fait a été notoire, et les soldats en ont eux-mêmes rendu témoignage.

    Lorsque la révolution française eut fermé les églises, la chapelle de Notre-Dame de Loos fut vendue comme domaine national. M. Hunte, anglais de naissance, en fit l'acquisition ; peu de temps après il quitta la France pour aller s'établir en Amérique. II loua sa propriété, qui comprenait aussi la maison du chapelain, à une dame de Montreuil-sur-Mer ; mais on négligea d'entretenir les toits du sanctuaire, et la voûte, minée par les pluies, s'écroula. La chapelle existait encore en cet état au mois de janvier 1811 ; depuis tout a disparu.

    La sainte image a été conservée par les soins de Félix Jacquart, charpentier, demeurant au hameau d'Ennequin, commune de Loos. Vers l'année 1800, Félix Jacquart la remit entre les mains de M. l'abbé Schlim , ancien religieux du monastère, nommé à cette époque desservant de la paroisse. Ce vénérable ecclésiastique la fit placer honorablement dans l'église paroissiale, et depuis ce moment l'affluence du peuple qui se dirigeait autrefois vers la chapelle s'est portée vers l'église de Loos.

    Cette petite église, qui paraissait remonter au XIVe siècle, suffisait à peine à la population du village. Elle était surtout trop étroite pour contenir la foule des étrangers que la piété y attire à certaines époques de l'année. Une noble dame conçut la première le pieux dessein de remplacer cette église par un temple plus vaste, et contribua puissamment à l'exécution de ce projet. Mgr Casimir Wicart, actuellement évêque de Fréjus, et alors curé de la paroisse de Sainte-Catherine, à Lille, fit la bénédiction de la nouvelle église le 20 octobre 1835. En remerciant les âmes charitables à qui était due l'érection de ce beau monument, il a tu le nom de cette dame. M. Leglay, dans sa notice, ne veut pas non non plus offenser, par une reconnaissance indiscrète, la charité modeste qui a fait de si louables sacrifices. Nous imiterons leur réserve ; mais le nom de cette dame n'est, dans le pays, un mystère pour personne. Les grandes âmes où la charité déborde et qui semblent n'éprouver que la sainte passion du bien, aiment à se cacher, et Dieu applaudit à leur humilité ; leurs œuvres n'en sont que plus agréables à ses yeux. Elles se cachent ; mais pour les découvrir, la reconnaissance n'a pas besoin de son regard pénétrant, le bien immense que ces nobles âmes font autour d'elles les trahit. « Cependant la petite et pauvre église de Loos, dit M. Leglay, dont nous aimons toujours à citer les paroles, devait, avant de s'écrouler, être témoin d'un dernier tribut d'hommages et de confiance à la Mère des secours divins. En août 1832, Lille, jusque-là épargnée, était en proie au fléau que l'on est convenu d'appeler choléra, parce qu'il a été impossible à la science de lui trouver un nom compatible avec ses théories. De tous les établissements de cette grande ville, l'hôpital-général était le plus maltraité. Les sœurs de Saint-Vincent de Paul recevaient à toute heure le dernier soupir de quelqu'un de ces vieillards, devenus leurs enfants. La charité n'en pouvait plus ; elle était aux abois. Ces saintes filles, qui croyaient n'avoir plus de larmes pour les misères humaines, se prenaient à pleurer sur des désastres qu'elles ne pouvaient suspendre. Marie devint alors, comme toujours, leur refuge propice. Il fut décidé que tous les habitants valides de la maison, hommes et femmes, iraient à Notre-Dame de Grâce demander miséricorde pour leurs frères moribonds et pour eux. Le débile cortége se mit en marche sous la conduite des Sœurs de la Charité : le temps était affreux ; le vent et la pluie frappaient sans pitié ces faibles pèlerins ; il y avait de quoi effrayer et faire murmurer la froide raison. On arriva, l'on pria, l'on fut consolé.

    L'enfance et la vieillesse
    Sont amies du Seigneur.

    Il est constaté par les registres de l'état civil, qu'à dater de ce jour, la mortalité se mit à décroître très-sensiblement, et que l'épidémie disparut bientôt de ce vaste hospice, tandis qu'elle continua de sévir dans d'autres hôpitaux et dans la ville. Expliquera le fait qui pourra.

    La nouvelle église fut achevée cet été. Bâtie d'après les dessins et sous la direction de M. Benvignat, jeune architecte plein de goût, plein d'amour pour son art, elle répond en tout point aux désirs des âmes charitables qui l'ont fait élever. C'est une très-jolie église champêtre, d'un style pur, élégant, et, si l'on osait le dire, virginal. L'on a voulu que tout fût doux, tempéré, lumineux, dans ce temple dont le nom lui-même a tant de douceur et d'attrait. »

    La piété n'a pas oublié le chemin qui conduit à Notre-Dame de Loos. Sa chapelle est toujours le pèlerinage le plus fréquenté de toute la contrée ; et les ex-voto, qui ornent son sanctuaire, prouvent bien que Marie, du haut de son autel, se plaît encore à exercer, en faveur de ceux qui l'invoquent, sa puissance et sa bonté. Nous pourrions citer un grand nombre de faits qui le prouvent ; je n'en rappellerai qu'un seul, il est récent.

    Eudoxie F., âgée de vingt-deux ans, avait perdu la vue à la suite d'une maladie grave. Le médecin la traita sans succès, et bientôt il proposa d'appeler deux de ses confrères, afin de concerter avec eux ce qu'il y aurait à faire de plus avantageux pour la malade. C'était pendant l'automne de 1846. Le jour même où les trois docteurs devaient se réunir, Eudoxie conjura sa mère d'entreprendre avant tout le pèlerinage de Loos. On fait venir une voiture : la mère et la tille accompagnées de M. l'abbé D., vicaire de Sainte-Catherine qui devait leur dire la messe, se rendent dans le sanctuaire de Notre-Dame de Grâce. Pendant le saint sacrifice, Eudoxie éprouva deux crises ; la seconde fut plus forte que la première, mais l'une et l'autre n'eurent aucun résultat. Après l'action de grâce, nos pèlerins remontent en voiture ; Eudoxie n'était pas guérie, et cependant elle n'avait pas perdu l'espérance. Tout-à-coup elle s'écrie : « Vierge sainte, n'aurez-vous pas pitié de moi ! Avant de quitter ce territoire, où vous avez déjà opéré tant d'autres merveilles, ne serai-je pas exaucée ?.... A peine avait-elle dit, et voilà que ses yeux s'ouvrent ; elle distingue parfaitement les objets qui l'environnent ; elle a recouvré la vue. « Retournons auprès de la très-sainte Vierge, dit Eudoxie, il faut lui rendre grâce, car elle a entendu ma prière. » La voiture reprit le chemin de l'église de Loos ; on y pria longtemps encore ; mais cet acte de reconnaissance ne suffit pas à Eudoxie. Le lendemain elle retourna à Loos nu-pieds, pour remercier de nouveau sa bienfaitrice.

    Cette guérison est-elle miraculeuse ?.... Je n'ai pas autorité pour prononcer sur la nature de ce fait : je me contente de signaler la coïncidence de cette guérison subite avec la prière qui la sollicitait : l'expliquera aussi qui pourra.

    Vers la fin du mois de mai 1847, ......

    Une foule immense remplissait l'église. Pendant la messe, qui fut chantée en musique par les membres de l'association de Saint-Joseph, M. l'abbé Bernard, vicaire général du diocèse, fit une touchante allocution, pleine d'onction et d'actualité. Après avoir justifié le titre de Notre-Dame de Grâce donné à Marie, rappelé le but de la cérémonie, et donné à l'association de Saint-Joseph des éloges si bien mérités, il implora le pardon des profanateurs, il demanda à la sainte Vierge leur conversion et celle de quelques apôtres d'impiété qui avaient osé applaudir au sacrilège. Ces paroles si pieuses, inspirées par une vive charité, remuèrent profondément les âmes, et firent couler les larmes de tous les yeux. La table sainte fut assiégée par les nombreux convives qui voulurent consacrer ce beau jour par une communion fervente, et l'on peut dire que la dévotion et la piété surabondèrent là où avaient abondé le crime et l'impiété.

    Source : Livre "Les sanctuaires de la Mère de Dieu dans les arrondissements de Douai, Lille, Hazebrouck et Dunkerque ..." par Alexis Possoz