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Légendes, coutumes et croyances populaires : Brandons
Légendes, coutumes
et croyances populaires
Brandons
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Le premier dimanche du carême, est appelé aussi dans un grand nombre d'actes du moyen-âge, le jour des bures.
A Nancy, les nouveaux mariés étaient obligés, sous peine d'amende, d'aller faire, ce jour, un petit fagot dans la forêt de Boudonville, située à peu de distance de cette ville. Vers trois heures de l'après-midi, ils se rendaient, en se donnant le bras, à la salle des Cerfs, le mari tenant son fagot orné de rubans et ayant une petite serpette en fer-blanc suspendue à la boutonnière de son habit, sa femme un bouquet de fleurs artificielles et portant un attribut de son sexe, tel qu'une quenouille, un fuseau, un rouet, quelquefois un petit berceau d'enfant, si elle était déjà mère, le tout également en fer-blanc, et acheté hors de la porte Notre-Dame où une petite foire était établie à cet effet.
La procession à laquelle on donnait le nom de : procession des fechenattes ou fechenottes, du vieux mot ferxel ou fessel, fagot, sortait de la salle des cerfs, dit M. Noël, notaire honoraire à Nancy, membre de plusieurs sociétés savantes, dans son cinquième mémoire, pour servir à l'histoire de Lorraine, faisait le tour de la carrière, puis venait sur la place de l'Hôtel-de-Ville, maintenant place du Marché, où l’on déposait les fagots et les bouquets en tas pour en faire une bure. Les nouveaux mariés dont les noms étaient inscrits à l'hôtel de ville, recevaient quelques privilèges et jouissaient de certaines exemptions pendant toute l'année. On dansait dans la cour du palais, où les jeunes gens avaient coutume de jeter des pois dépechis qui, répandus sur un sol dur et compact, occasionnaient de fréquentes chutes aux danseurs, et provoquaient, par là, la gaîté des spectateurs.
A sept heures il y avait un grand souper à la maison commune, et après ce repas on mettait le feu à la bure et au feu d'artifice.
C’était, ajoute monsieur Noël, pendant ces feux que les nouveaux mariés avaient le droit de proclamer, du balcon de l'hôtel de ville, les valentins et les valentines ; proclamation qui se faisait ainsi :
Qui donne-t-on à monsieur A... ?
— «mademoiselle B....
Ces questions et ces réponses étaient répétées par la foule, qui toujours manifestait une approbation ou une improbation. Le valentin, ou valentine devait, dans la semaine, envoyer un bouquet ou un cadeau à sa valentine ; si ce cadeau était agréé, elle s'en parait le dimanche suivant, et se présentait ainsi parée à la toilette de la duchesse : si le cadeau n’avait point été fait, les voisins du valentin allumaient le dimanche ensuite, un feu de paille devant la porte de sa maison en signe de mépris. Les valentines devaient donner un bal à leurs valentins ; si elles oubliaient ou si elles ne leur faisaient un présent pour tenir lieu du bal, on brûlait de la paille devant chez elles, ce qui s'appelait brûler le valentin ou la valentine. C’était une protestation manifeste contre les choix faits par les nouveaux mariés.
A Epinal et dans quelques autres villes lorraines, on allumait également le même jour des brandons, un grand feu de joie appelé aussi bure, autour duquel la jeunesse des deux sexes, formant un, cercle, proclamait les valentins, et les valentines qui venaient immédiatement tourner plusieurs fois au centre de ce cercle animé. Un pudique, baiser était donné par la jeune valentine a l'heureux valentin qu'on lui avait choisi. Celui-ci, reconnaissant de cette douce faveur ne pouvait se dispenser de lui offrir un cadeau, pendant la semaine qui suivait : c'est ce qu’on nommait le rachat.
S'il négligeait de remplir ce devoir de la galanterie, on ne manquait pas de l'accuser d'incivilité, souvent même d’infidélité et il ne tardait pas à être brûlé en effigie avec sa valentine qui n'en pouvait rien.
A Saint-Dié, ont dansait, dit M. Gravier (histoire de cette ville, page 242), «le dimanche de Quadragésime » (le premier dimanche de carême).
Après Vêpres, les garçons et les filles se réunissaient, au sortir de l'église, dans des lieux consacrés à cet usage et que l'on appelait la bure. Ils se partageaient en chœurs, l’un composé de garçons et l’autre de filles et formaient la chaîne pour danser le rondeau.
Les deux chœurs chantaient ensemble à trois reprises, en faisant autant de révolutions. Qui marierons-nous ?
le chœur des filles répondait en nommant celle d'entre elles qui était la plus âgée ou la plus digne d'être mère. L'élue quittait la chaîne pour se placer au centre et attendre l'amant qui lui était destiné.
Les deux chœurs continuaient à chanter et à danser en faisant trois révolutions, à chacune desquelles l'élue répétait en refrain : j'aimerai qui m'aimera.
On répétait la première question dans les mêmes formes pour le choix d'un amant, et le chœur des garçons l'indiquait.
Lorsque le couple était formé, les deux chœurs chantaient et dansaient, faisant encore trois révolutions autour du couple, à chacune desquelles les deux chœurs lui ordonnaient de s'embrasser.
Les deux amants rentraient dans la chaîne et ne se quittaient plus.
On agissait ainsi tant qu'il y avait des couples à unir.
On appelait ce premier jeu donner les faschenottes. Les filles ne quittaient un moment leurs amants que pour allumer, avec des brandons, apportés de l'église, les bures autour desquelles on devait reprendre le rondeau et danser jusqu'à l'extinction des feux.
Chaque couple s'emparait d'un tison et se dirigeait vers la maison de la fille, sous la surveillance des parents qui avaient assisté à la danse, et de ces jeux naissaient presque tous les mariages de l'année.
C'étaient les valentins et les valentines qu'en d’autres lieux on tirait au sort.
Cet usage généralement abandonné, ajoute M. Gravier, au commencement des guerres du dix-septième siècle, et dont l'origine remontait au culte de Diane ou de la Lune, était tombé en désuétude depuis que ces réunions avaient perdu leur premier mérite, le rapprochement des sexes dans les temps ou chaque famille vivait dans l'isolement.
Tout y était emblématique et se ressentait de son antique origine : le nombre trois, révéré par tous les peuples anciens comme sacré, puissant et parfait, employé dans les enchantements, comme dans les cérémonies les plus religieuses ; la figure ronde, les mouvements circulaires si fréquents dans les opérations de magie, la présence de l'élément régénérateur ; tout justifiait le nom de faschenottes (du latin fascinatio, charme enchantement) donné à la danse des bures. Ce dernier nom tire aussi son origine du verbe latin uro ou buro, je brûle. »
Encore, aujourd'hui, une cérémonie a lieu à Goviller, arrondissement de Nancy. La veille du jour des brandons, à la nuit tombante, les habitants de cette commune, munis de flambeaux et de torches, appelés aussi brandons, font processionnellement le tour de la côte d‘Anon, pratique empruntée au paganisme, suivant l'auteur de la statistique de la Meurthe.
A Pouxeux, près de Remiremont, les enfants allument encore, le jour des bures, un grand feu auquel ils donnent le nom de chavonne et qu'ils alimentent au moyen de quelques morceaux de bois, adroitement dérobés à leurs parents. Quand ce feu a cessé de brûler, ils promènent dans le village un petit char à deux roues qu’ils conduisent avec toute la rapidité que peut le permettre leur âge.
Source : Livre "Traditions populaires, croyances superstitieuses, usages et coutumes de l'ancienne Lorraine" par Nicolas Louis Antoine Richard
Le premier dimanche du Carême s'appelle dimanche de la « Quadragésime » dans la tradition catholique et latine.
Il porte le nom de « dimanche de l'Orthodoxie » dans l'usage orthodoxe de Byzance.
Dans certaines régions, on le fête sous le nom de « dimanche des Brandons ».
Catholicisme latin
Les mots Quadragésime et Carême forment un doublet lexical issu de l'adjectif latin quadragesimus, « quarantième » : le Carême dure quarante jours.
Ce premier dimanche est inscrit dans une démarche globale de pénitence (prière, aumône et jeûne) qui verra son aboutissement avec la fête de Pâques.
Cette journée peut être considérée comme le premier pas vers la pureté recherchée par le Carême; les rites qui l'accompagnent ne sont pas différents de ceux que l'on observe lors des autres dimanches de cette période. La station liturgique se fait à Saint-Jean de Latran.
Orthodoxie
Le nom de dimanche de l'Orthodoxie rappelle, après 120 années d'iconoclasme, la restauration définitive des saintes icônes le dimanche 11 mars 843.
Dimanche des brandons
Fête des brandons à Junglinster au Luxembourg
Dans certaines régions françaises, belges ou d'ailleurs, la tradition consistait, en ce dimanche des Brandons, à allumer des feux, danser à l'entour et parcourir les rues et les campagnes en portant des brandons ou des tisons allumés.
Belgique
On trouve en Belgique à cette même période les grands feux de Bouge (Belgique).
France
- En Auvergne, Pommerol, qui analyse cette manifestation en 1901, y voit les restes d'un ancien culte solaire, lié à une invocation du dieu celtique Grannus.
- À Régny, dans la Loire, les garçons de la ville chargeaient des fagots sur une charrette à laquelle ils attelaient les hommes mariés, puis rassemblaient ces fagots sur la place en une pyramide, avant d'y mettre le feu.
- Dans le Berry, la fête des brandons était aussi appelée fête des bordes.
- À Miribel, dans l'Ain, le dimanche des brandons ou des bordes, la dernière mariée du village allume un bûcher.
- À Chambly (Oise), a lieu chaque premier dimanche de Carême, la Fête Légendaire du Bois-Hourdy, existant depuis 1248.
Luxembourg
Au Grand-Duché de Luxembourg la fête des brandons (Buergbrennen) constitue encore aujourd'hui une fête organisée par la jeunesse des villages, qui se termine le soir par la mise en feu d'un grand bûcher, généralement garni d'une croix.
« Dimanche des brandons, le premier dimanche de carême, ainsi dit à cause de l'habitude de porter, en ce jour, des brandons allumés. Danse des brandons, sorte de danse rustique ou plutôt course dans la campagne avec des brandons, à l'occasion de certaines fêtes. »
Suisse
À Cartigny, au cours du Premier dimanche de carême, on fête les Failles, tradition consistant à brûler des perches enrobées de paille, de sarments et de roseaux le soir à l'apparition de la première étoile.
Cette fête également observée au hameau de Certoux, sur la commune de Perly-Certoux.
Les failles sont l'équivalent des fête des brandons ailleurs en Suisse.
La ville de Payerne organise son carnaval sous le nom de Brandons de Payerne.
La tradition des cheminements dans la ville suivis de grands feux marquant la fin de l'hiver se retrouve aussi dans les carnavals de plusieurs régions d'Europe.
C'est en particulier le cas dans les carnavals de la Région du Centre en Belgique ou des Brandons de Payerne, en Suisse.
Ce feu peut se retrouver pendant les rondeaux au carnaval de Nivelles ainsi qu'au Feureu.
Ces feux proviennent de la tradition gauloise dans laquelle on honorait du Dieu Grannos en raison du retour du Soleil durable.
Source :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Dimanche_des_brandons
En savoir plus :
http://www.brandonspayerne.ch/
http://www.brandonsyverdon.ch/
http://www.regardsetviedauvergne.fr/2012/03/fete-des-brandons-en-auvergne.html
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