• Le mois des âmes du purgatoire : 16 novembre

     
     

    Le mois des âmes du purgatoire : 16 novembre

     

    Le mois des âmes du purgatoire : 16 novembre

     

    Source : Livre "Mois des âmes du purgatoire ou méditations, prières et exemples pour le mois de novembre"

     

    XVIe JOUR

    Des moyens de soulager les âmes du purgatoire. 
    Premier moyen : la Prière.

    Tout ce que vous demanderai à mon Père en mon nom il vous l'accordera.

    ler Point. Après avoir considéré dans les chapitres précédents quels étaient les motifs qui devaient nous engager à exercer la miséricorde envers les saintes âmes du purgatoire, nous allons maintenant nous occuper des moyens les plus efficaces que la bonté de Dieu a mis en notre pouvoir pour les soulager. Le premier de ces moyens est la prière, et celui-là est à la portée de tous, des pauvres comme des riches, des faibles comme des forts ; personne ne peut alléguer de motifs raisonnables pour s'en dispenser. Quand il s'agit de l'aumône, du jeûne, de la pénitence, l'un peut alléguer son indigence, l'autre la faiblesse de sa santé et ses infirmités ; mais quel est celui d'entre nous qui n'est pas assez riche pour faire aux âmes du purgatoire l'aumône d'une prière ? Quel est celui qui est trop faible, trop infirme pour ne pas pouvoir élever son cœur vers Dieu et lui demander d'avoir pitié de ses frères souffrants et de leur faire miséricorde ? Tous le peuvent, et la mauvaise volonté seule ou une coupable indifférence empêchent de remplir un devoir si si facile et si doux.

     

    Il y a, nous le savons, des esprits orgueilleux ou impies qui désapprouvent la prière pour les morts, couvrant leur dureté, d'un prétexte spécieux qu'il est facile de réfuter. Quand Dieu, disent-ils, condamne une âme aux peines du purgatoire, ou il ignore le temps qu'elle doit y rester, ou il le sait ; dire qu'il l'ignore serait une impiété et un blasphème, et puisqu'il le sait, à quoi serviront nos prières ? ne seraient-elles pas insensées puisque nous demanderions à Dieu, qui est immuable par nature, de changer des décisions qui sont irrévocables : d'où ils concluent qu'il ne faut jamais prier pour les morts.

    Une telle doctrine n'est pas seulement cruelle, puisqu'elle ne tend à rien moins qu'à priver les saintes âmes du purgatoire du soulagement que nous pouvons leur donner ; mais elle est en opposition formelle au précepte de Jésus-Christ, qui a dit : « Demandez, c'est-à-dire priez, et on vous donnera, elle est contraire à l'enseignement et à la pratique de l'Eglise, qui prie tous les jours pour ses enfants décédés, et qui nous engage à prier également tous les jours pour le repos éternel de ceux que nous avons perdus.

    Du reste, il est facile de démontrer la fausseté du raisonnement que nous avons cité, et nous allons le faire brièvement.

    Quand Dieu condamne une âme aux peines du purgatoire, il examine dans sa justice ce qu'elle lui doit encore de réparation pour les fautes qu'elle a commises, et il connaît le temps précis de la peine qu'elle doit subir. Supposons que cette peine soit de dix années, l'âme a deux voies pour satisfaire à Dieu. La première est de payer sa dette par elle-même, c'est-à-dire, en satisfaisant sans que personne lui vienne en aide ; la seconde est de payer en tout ou en partie par l'entremise des autres, c'est-à-dire, par les satisfactions que lui transmettent la compassion et la libéralité des cœurs qu'elle a laissés sur la terre.

     

    Or, avant de déterminer le temps qu'une âme doit passer en purgatoire, Dieu prévoit si cette âme sera secourue par les suffrages des vivants ou abandonnée par eux. Si personne ne doit venir à son aide, elle n'aura aucune grâce, et ne sortira du purgatoire qu'au temps fixé par sa justice. Si au contraire elle doit Être secourue par les satisfactions étrangères, Dieu abrégera le temps, il adoucira la peine selon la valeur des œuvres qui seront offertes en sa faveur.

    La justice humaine en donne un exemple. Un homme est condamné à la prison pour une dette considérable. Il a deux moyens d'échapper à la sentence, ou en payant sa dette de ses propres deniers, ou en demandant à ses amis de la payer pour lui. S'il n'a ni argent, ni amis qui veulent payer pour lui, il faut qu'il subisse la peine à laquelle il a été condamné. Si, au contraire, il n'a pas d'argent, mais qu'il ait des amis généreux et dévoués qui lui ouvrent leurs bourses, on lui remet la moitié de sa peine, s'ils acquittent la moitié de sa dette ; s'ils acquittent la dette toute entière, on lui remet aussitôt la peine tout entière.

    D'un autre côté, si les amis de ce pauvre prisonnier pour dettes étaient pauvres eux-mêmes, et dans l'impossibilité de le libérer, ils pourraient encore fléchir son créancier par leurs prières et par leurs larmes, toucher son cœur, l'émouvoir en faveur de leur malheureux ami, et obtenir qu'il renonce à ses droits et lui remette sa dette.

    Ainsi en est-il pour les âmes condamnées aux peines du purgatoire. Nous y avons des parents, des amis qui ont encore à satisfaire pour des fautes qui n'ont pas été entièrement réparées ; mais Dieu savait que nous nous mortifierions, que nous ferions des aumônes pour elles, que nous le prierions en leur faveur, il a résolu d'avoir égard à ce que nous ferions pour elles. Faisons beaucoup, il leur remettra beaucoup : que nos satisfactions égalent ce qu'elles doivent, il leur remettra aussitôt toute la peine qu'elles devaient subir. Mais si nous sommes dans l'impuissance d'offrir à la justice divine des œuvres satisfactoires pour l'acquit de la dette des âmes qui nous sont chères, nous pouvons la fléchir par nos prières, toucher le cœur de Dieu par nos supplications, et obtenir qu'il leur fasse grâce et leur remette la peine due à leur faute en tout ou en partie.

    IIe Point. Pour bien comprendre l'efficacité de la prière pour les âmes du purgatoire, il faut savoir que la prière a trois qualités remarquables :

    1° elle est méritoire, c'est-à-dire digne de récompense ;

    2° satisfactoire, c'est-à-dire suffisante pour payer la dette des péchés déjà pardonnés ;

    3° impétratoire, c'est-à-dire capable d'obtenir ce qu'elle demande. 

    Le mérite de la prière, comme celui de toutes les bonnes œuvres, est personnel et ne peut se transmettre à un autre ; mais elle peut toucher le cœur de Dieu en faveur de ceux pour lesquels nous le prions et le disposer à leur accorder gratuitement les grâces que nous sollicitons pour eux.

    La prière est satisfactoire parce qu'elle est difficile. Au premier abord, ce que j'avance paraîtra peu vraisemblable, car il semble que la prière devrait s'échapper naturellement de notre cœur, et on peut me répondre : Est-il donc difficile de prier en face des merveilles que la puissance et la bonté de Dieu ont multipliées autour de nous ? Comment encore ne pas prier au souvenir des bienfaits dont le Seigneur a environné notre vie tout entière ? Comment enfin ne pas prier lorsque nous sommes courbés sous le poids accablant de tant de misères et de douleurs ? Est-il donc difficile d'implorer la pitié et de demander du secours à celui-là seul qui peut apporter du soulagement à nos maux ? Je conviens de tout cela ; j'avoue que la prière n'est pas seulement un devoir pour nous, mais qu'elle est un besoin pour notre cœur, ce qui n'empêche en aucune manière qu'elle ait des difficultés réelles.

    Il nous est difficile de prier, dit un ancien Père, parce que tout l'enfer se déchaîne pour nous troubler dans ce saint exercice, et pour mettre obstacle à nos prières. Il nous est difficile de prier, parce que lorsque nous voulons le faire, une foule de pensées étrangères se présentent à notre esprit et détournent notre attention de Dieu et de ce que nous lui demandons. Le passé nous poursuit de ses souvenirs, le présent de réalités souvent douloureuses et accablantes, l'avenir de ses incertitudes qui nous remplissent d'inquiétudes et de craintes.

    Il nous est difficile de prier, parce que mille objets extérieurs nous dissipent : nos yeux veulent tout voir, nos oreilles tout entendre, nos sens ne nous laissent aucun repos. Je ne dis rien des passions qui nous agitent et s'éveillent en nous au moment même où nous voudrions le plus être à l'abri de leurs atteintes.

    Je ne m'étendrai pas non plus sur les différentes vertus qui doivent accompagner la prière, je me contenterai de les désigner, et cela suffira pour montrer qu'il n'est pas facile de bien prier. Il faut que la foi éclaire la prière, que l'espérance l'anime, que la charité l'embrase, que l'humilité la soutienne, que la persévérance la couronne.

    Hélas ! nous connaissons par notre propre expérience les difficultés de la prière. Quel est celui d'entre nous qui n'a pas à combattre la légèreté de son esprit, la dissipation de son cœur, et qui n'a pas à lutter contre des distractions sans cesse renaissantes. N'entendons-nous pas tous les jours les âmes les plus pieuses, les plus saintes même, se plaindre de ne pouvoir prier comme elles le voudraient. C'est ce qui faisait dire au grand Origène que la prière est un véritable combat, puisqu'il faut y soutenir les assauts de si nombreux et de si puissants ennemis. »

    Mais ce sont ces difficultés de la prière qui la rendent méritoire, et qui la rendent aussi satisfactoire, puisque la difficulté des bonnes œuvres est leprincipe du mérite et de la satisfaction : d'où nous devons conclure que la prière est un moyen trèsefficace de soulager les âmes du purgatoire.

    La prière est impétratoire ; le but de l'âme qui prie est de faire connaître à Dieu ses besoins, ses désirs, et d'obtenir de sa bonté ce qu'elle lui demande. Or Dieu, dont la charité et la libéralité sont infinies, ne nous permet pas seulement de lui demander pour nous les grâces qui nous sont nécessaires, il nous permet encore de le prier pour nos frères ; non-seulement il nous le permet, mais il désire que nous le fassions, et quand nous nous oublions pour eux, il se souvient de nous et répand sur notre âme des grâces et des bénédictions plus abondantes.

    Voulons-nous donc faire un acte de charité qui soit agréable à Dieu et ouvrir les portes du purgatoire aux âmes qui y sont captives, prions pour elles et Dieu se laissera fléchir, car la prière est toute-puissante sur son cœur. L'Ecriture sainte nous fournit une multitude d'exemples de cette puissance. Moïse est au milieu d'un désert affreux, il voit autour de lui tout un peuple qui meurt de faim, et pour le nourrir toutes les ressources humaines lui manquent. Que fait l'homme de Dieu ? Il lève les mains au ciel, il expose au Seigneur la détresse du peuple qu'il lui a confié, il le conjure d'avoir pitié de lui, et Dieu, touche : des prières de son serviteur, fait tomber des nues un pain miraculeux.

    David va au devant de Goliath ; son ennemi est puissant, il est terrible ; où prendra-t-il des forces pour le vaincre et pour le terrasser ? Il prie, Dieu met sa force dans la faible main de l'adolescent, et frappé à mort par la pierre que David a ramassée sur le bord du torrent, l'orgueilleux tombe sans vie sur la poussière.

    Mais il y a une parole plus forte, plus persuasive que tous les exemples, c'est la parole de Jésus-Christ lui-même. Priez, nous dit-il, et vous obtiendrez tout ce que vous désirez. Et ailleurs : mon Père ne vous refusera rien de ce que vous lui demanderez en mon nom. »

    Puisque la prière est toute-puissante sur le cœur de Dieu, et que nous pouvons en appliquer la valeur et la satisfaction aux saintes âmes du purgatoire, elle a donc vraiment le pouvoir de les soulager dans leurs souffrances. Nous verrons dans le chapitre suivant comment nous devons nous servir de la prière pour atteindre ce but.

    PRIÈRE.

    Qu'il est doux, qu'il est consolant pour mon cœur, ô mon Dieu ! de savoir que la voix de mon humble prière peut toucher le vôtre et fléchir votre justice, non-seulement lorsque j'implore votre miséricorde pour moi-même, mais encore lorsque je la sollicite en faveur de ceux dont la mort m'a séparé, mais qui n'ont pas cessé de m'être chers. Daignez écouter, Seigneur, les supplications que je vous adresse en leur faveur ; faites que le souvenir et l'affection que je leur garde leur soient encore utiles, et que mes larmes, les regrets que je donne à leur mémoire, sanctifiées par la résignation, par la soumission à votre volonté qui a voulu notre séparation, soient devant vous comme un sacrifice que je vous offre pour l'acquit de leurs dettes. Daignez l'agréer, ô mon Dieu ! ne refusez pas l'offrande de mon indigence, puisque je l'unis pour vous la présenter aux mérites de Jésus-Christ notre adorable Sauveur, et que c'est en son nom que je vous supplie d'avoir pitié des âmes de mes parents, de mes amis, de mes bienfaiteurs et de tous les fidèles trépassés. Adoucissez leurs souffrances, o mon Dieu ! abrégez le temps de leur expiation et accordez-leur bientôt le repos, la lumière et le bonheur éternels. Ainsi soit-il.

    EXEMPLE.

    L'empereur Théophile, après avoir été pendant sa vie un persécuteur déclaré des saintes images, reconnut son erreur avant de mourir et détesta sincèrement ses fautes ; mais il ne put dans ses derniers moments les expier par la pénitence qui lui resta à subir dans le purgatoire. Son épouse Théodora, qui avait tant fait pour le convertir, fit davantage encore pour le délivrer des peines de l'autre vie. Non seulement elle versait des larmes abondantes et faisait de ferventes prières avec toute sa cour, mais elle demanda des messes et d'autres suffrages dans tous les monastères, et par l'intermédiaire de saint Méthodius, patriarche de Constantinople, elle fit multiplier les prières publiques et privées dans le clergé et dans le peuple. Le cœur de Dieu ne put résister à la force de tant de supplications ; et le vénérable prélat, se livrant dans l'église de Sainte Sophie aux actes de ces dévotions solennelles, vit apparaître un envoyé divin qui lui dit : « Évêque, tes prières sont exaucées et Théophile a obtenu sa grâce. » Théodora eut en ce même temps une vision qui lui annonça que ses prières et celles de ses prêtres avaient délivré Théophile du purgatoire. Aussi les supplications se changèrent en actions de grâces, et toute la ville de Constantinople se réjouit d'avoir obtenu la glorification de son empereur défunt.(Le Mois des Âmes du Purgatoire, traduit de l'italien, par l'abbé de Valelle.)

    PRATIQUE.

    Prendre la résolution de ne laisser passer aucun jour sans prier pour les âmes du purgatoire ; offrir en leur faveur la peine que nous cause soit les distractions que nous avons à combattre pendant la prière, soit l'aridité de notre cœur pendant ce saint exercice.