• Le mois de Marie de l'Immaculée conception 26 décembre

     
     

    Le mois de Marie de l'Immaculée conception

    26 décembre

     

    Le mois de Marie de l'Immaculée conception 26 décembre

     

    Source : Livre "Le mois de Marie de l'Immaculée conception" par A. Gratry

     

    XXVIe MÉDITATION.

     
    Siège de la Sagesse, priez pour nous !

    Que si vous bénissez tout l'homme, et même son corps, ô sainte et bien-aimée protectrice, que sera-ce de l'esprit humain, quand vos vertus viendront le contenir, le déployer dans la lumière ?

    L'humilité, la chasteté, la charité, quelles ressources pour l'avenir de la lumière et de la science parmi les hommes ! O Siège de la Sagesse, priez pour nous, afin que, sortant de nos ténèbres, de nos querelles et de nos divisions, de nos fluctuations puériles et de nos ignorances barbares, nous arrivions à la lumière et à la paix, à la paix de la Sagesse et de la science de Dieu.

    « Il faut savoir, dit un pieux et profond auteur, qu'il y a trois espèces de sciences : la première est purement humaine, la seconde est divine simplement, et la dernière est divine et humaine tout ensemble. La science purement humaine était celle des païens, qui n'étudiaient que dans un principe humain et par le seul effort de leur propre puissance. Ils n'étudiaient non plus que pour une fin naturelle, telle que la satisfaction de leur propre esprit, la vue de leur propre perfection, et enfin pour l'estime et les louanges humaines : il n'y a que trop de chrétiens qui étudient de la sorte.

     

    La science infuse et proprement divine est l'un des dons du Saint-Esprit. C'est celle que Dieu a donné autrefois aux apôtres et à quantité d'autres saints.

    La troisième est divine et humaine tout ensemble ; c'est proprement la vraie science des chrétiens et celle dont parle le sage, lorsqu'il dit : Dieu lui a donné la science des Saints et a complété ses travaux. Celle-ci n'est point donnée par infusion et sans travail ; elle participe de l'une et de l'autre. 

    La science que nous vous demandons d'obtenir pour nous, ô Marie, Siège de la Sagesse, vous qui avez donné au monde la Lumière éternelle, c'est proprement la vraie science des chrétiens ; c'est celle qui est conforme à votre Fils, à la fois Dieu est homme ; science qui vient de Dieu et de l'homme : de Dieu, inspirant l'homme par sa lumière et par sa grâce, et de l'homme, travaillant et priant, cherchant, creusant et méditant sous la lumière et sous l'inspiration de Dieu.

    Tous les grands docteurs de l'Église et les théologiens du premier ordre ont eu cette science, et quelquefois elle a été donnée à des femmes dans la solitude des couvents.

    Jamais peut-être on n'a écrit, sur le côté divin de la vraie science et les moyens pratiques de l'obtenir, de plus admirables paroles que celles d'une Sainte inspirée de Dieu. Écoutez cette magnifique exhortation à la lumière :

    Vous, mon peuple, peuple de religion sans fraude, qui avez posé dans vos cœurs le dessein de vaincre le monde et de porter le ciel en vous, ne vous détournez pas, soyez stables dans la voie de vision que vous avez choisie, et purifiez vos yeux, pour les pouvoir élever à la contemplation de la lumière où habite votre vie et votre rédemption. Ce qui purifie l'œil du cœur et le rend propre à s'élever à la véritable lumière, le voici : le mépris des soucis du siècle, la mortification du corps, la contrition du cœur, la pure et fréquente confession de tout mal, le bain des larmes ! Et lorsque toute impureté est expulsée, voici ce qui élève le regard : la méditation de l'admirable essence de Dieu et de sa chaste vérité ; la prière forte et pure, la joie en Dieu, l'ardent désir du ciel. Embrassez tout cela pour toujours, et avancez vers la lumière qui s'offre à vous comme à ses fils, et descend d'elle-même dans vos cœurs. Ôtez vos cœurs de vos propres poitrines et donnez-les à Celui qui vous parle, et il les remplira de splendeurs déifiques, et vous serez fils de lumière et anges de Dieu.

    Fils d'Adam, vous semblerait-il méprisable de devenir enfants de Dieu ? Pourquoi donc détournez-vous vos regards de la face de Celui qui donne aux hommes une telle puissance, vous surtout qui avez voulu demeurer pacifiques en ce monde et vivre sur la terre comme des anges ? Vous qui êtes des flambeaux ardents, que le Maître a placés sur la montagne pour éclairer les hommes par vos paroles et vos exemples, prenez garde que l'orgueil et la cupidité n'éteignent votre lumière. Fils de la paix, détournez vos oreilles des cris du monde, et faites silence pour écouter l'esprit qui parle en vous. »

    A ces très-saints efforts pour acquérir le côté divin de la science, ajoutez le travail sévère, persévérant, d'une vie entière ; l'étude patiente et comparée des mystères de la nature visible, des leçons de l'histoire, de la grande tradition de l'esprit humain, et surtout de la divine tradition de l'Église, et vous obtiendrez, vers l'automne de la vie, une science certainement supérieure à celle que le monde peut donner.

    Peut-être, ô Vierge lumineuse, ô Siège de la Sagesse, le genre humain, si les peuples chrétiens se donnent à vous par la pratique plus abondante de vos vertus, le genre humain, vers l'automne de l'histoire, obtiendra-t-il une science plus haute, plus pleine, plus étendue que celle qu'il a pu acquérir jusqu'ici.

     

    Beaucoup de saints ont eu la science purement divine ; beaucoup de païens ont eu un peu de science humaine. Les chrétiens, non sans une visible influence de la lumière et de la grâce du Christ, ont développé, d'une manière admirable, la science purement humaine. Mais la science à la fois divine et humaine, étendue à l'ensemble des vérités, n'est point encore développée. Elle a son germe dans la théologie des grands docteurs du premier ordre ; mais ce germe, plein de vie implicite, ne s'était pas, jusqu'à présent, assez nourri des sucs terrestres, des éléments du monde visible. Le temps vient où cet aliment inférieur de la science, mieux préparé, sera pénétrable à l'esprit, et peut-être sera dompté et pénétré par l'élément supérieur de la science. Où sont les esprits qui sauront concevoir à la fois cet ensemble divin et humain ? Qui aura le corps assez chaste pour tout porter, l'esprit assez vaste pour tout embrasser et assez humble pour tout recueillir ; le cœur assez ardent pour tout consacrer par l'amour ? O Marie, ceux-là seuls qui sauront vous servir, et à qui vous aurez obtenu vos vertus : l'humilité, la chasteté, la charité ; ceux-là seuls seront capables de la science divine et humaine, qui sera celle du siècle à venir, du royaume de Dieu sur la terre. Peut-être un jour l'enseignement se bornera-t-il moins au côté humain de la science, et à ces leçons littérales que l'on applique, par le dehors, au cerveau et à la mémoire de l'enfant.

     

    Peut-être Jésus enfant, qui attend parmi nous une autre éducation de son enfance, nous enseignera-t-il par vous à ouvrir la source sainte déposée dans l'âme de l'enfant ; peut-être, quand l'enfant nous interrogera sur ce qu'il entend dans son cœur, sur ces murmures mystérieux et profonds qui l'émeuvent et l'appellent, sur ces clartés lointaines qu'il croit apercevoir dans le vie de son âme ; peut-être ne nous bornerons-nous pas à lui dire, comme le grand-prêtre Hélie : « Ce n'est rien, dormez toujours ! » Peut-être saurons-nous à propos ouvrir les yeux, comme le fit enfin le grand-prêtre à l'égard de l'enfant Samuel, et dire aussi à cet enfant, qui ne connaissait pas encore la voix de Dieu en lui : « Allez, et, si l'on vous appelle encore, dites à Dieu : Parlez, Seigneur, parce que votre serviteur vous écoute ! »

    O Marie, Reine et Mère des enfants, ne permettez pas que le monde et sa superficielle sagesse, son inintelligence et sa moquerie, éteignent dans l'âme des enfants le germe de la vraie science, la source de la sagesse divine, la lumière de l'inspiration. Mais plutôt que la voix des maîtres, animés d'un esprit de mère, puisé en vous, Mère des chrétiens, dise efficacement à ces âmes encore enveloppées, à ces intelligences en germe, les paroles que le Saint-Esprit leur adresse : « Écoutez-moi, germes divins ! développez-vous comme le rosier planté sur le bord des eaux ; donnez vos fleurs et vos parfums comme le lis ; poussez des branches de grâce, et apprenez à louer Dieu et à le bénir dans toutes ses œuvres. »

     

    Et peut-être, ô Marie, par vous, nous sera-t-il donné de savoir préparer l'enfance à l'acquisition future de la science et de la sagesse.

    Pour mon esprit comme pour mon corps, ô Dieu, j'ai pris le change. Loin de chercher la vie de mon esprit d'abord en vous, puis en mon âme, puis au dehors, j'ai fait l'inverse.

    Pour m'instruire je ne connais que les livres, comme pour rendre la force à mon corps je ne connais que l'aliment qui a de la masse et du poids. Je ne sais point assez ce que peut l'air, l'esprit de la nature, et encore moins ce que peut l'âme, et surtout la force de Dieu, venant à moi par la prière. De même je ne connais pour mon intelligence d'autre aliment que l'aliment visible que touchent mes mains et que dévorent mes yeux, les livres et la terre. Je ne sais pas interroger mon âme, moins encore sais-je interroger Dieu. Si je savais regarder dans mon âme et regarder en Dieu, sans cependant négliger les livres par qui me parlent les autres hommes, je comprendrais le sens des livres, je les lirais dans la lumière qui les dicta, plus encore que dans leurs pages mêmes, où j'épelle si laborieusement les mots et les syllabes, trace refroidie de la pensée qui vivait autrefois.

    Mais, ô mon Dieu, pourquoi ne sais-je pas lire dans mon âme et en vous ?

    Parce que l'âme doit être pure, humble, chaste et recueillie, pour être le miroir de Dieu. Car il est dit : « Heureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu'ils verront Dieu. »

    Si j'avais vos vertus, ô Marie, je lirais donc dans la lumière ; je puiserais la vie de mon esprit à la source la plus élevée.

    Je veux donc, ô Mère immaculée, vous donner mon esprit, comme je veux vous donner mon corps, afin que vous me rendiez tout entier à Dieu, esprit et corps.