• Quête du Jésus historique

     

     

    Quête du Jésus historique

     

     

     

    Les quêtes du Jésus historique désignent les étapes historiographiques successives de l'étude de la vie de Jésus de Nazareth en tant que personnage historique.

    On distingue en général trois « quêtes ». La première — appelée également « quête libérale » et commencée à la fin du XVIIIe siècle — a consisté en différentes tentatives de reconstituer une « vie de Jésus » en tant que figure importante de la spiritualité humaine, en la débarrassant des dogmes chrétiens. Elle a buté sur le fait que les sources quasi-exclusives sur Jésus, les évangiles canoniques sont des écrits théologiques visant plus à témoigner de la foi des premières communautés chrétiennes qu'à rapporter la biographie de Jésus. Elle a donné des portraits disparates de Jésus « selon les a priori philosophiques implicites ou non des auteurs et des générations ».

    Une deuxième quête s'est engagée dans les années 1950, distinguant le « Jésus historique » (c'est-à-dire ce qu'on peut dire de Jésus sur la base des sources disponibles et des méthodes historico-critiques) et le « Jésus réel ». Elle s'est attachée à définir des outils de critique littéraire les plus objectifs possibles pour distinguer ce qui, dans les sources, relève d'élaborations théologiques et littéraires ultérieures, et ce qui peut être attribué à Jésus et aurait fait sa singularité au sein du judaïsme, sans qu'il n'y ait plus pour autant d'ambition de produire des Vie de Jésus.

    Enfin on parle d'une troisième quête, commencée au milieu des années 1980, et menée essentiellement par des chercheurs américains et allemands, et qui a visé au contraire à replacer Jésus dans le contexte religieux, social et politique du judaïsme du Ier siècle, bien plus diversifié que ce qu'il est devenu par la suite. Le débat porte alors « sur la continuité ou la rupture de Jésus par rapport au milieu idéologique et social d'origine ».

    Des harmonies des évangiles à l'analyse critique des textes

    Les principales sources sur la vie de Jésus de Nazareth sont les quatre évangiles canoniques. Trois de ces évangiles (Matthieu, Marc et Luc), dits synoptiques, sont proches, alors que celui de Jean est radicalement différent. La tradition chrétienne et l'ordre du Nouveau Testament suivent l'explication d'Augustin d'Hippone selon laquelle Matthieu aurait inspiré Marc qui aurait inspiré Luc. Mais dans la reconstitution d'une vie de Jésus, la comparaison de ces quatre textes fait apparaître de nombreuses différences et des contradictions chronologiques.

    La première tentative de faire une harmonie des évangiles, c'est-à-dire de fondre les quatre évangiles pour en faire un seul texte, est celle du Diatessaron de Tatien, dans la deuxième moitié du IIe siècle.

    La canonisation des quatre évangiles impose l'idée de l'inspiration divine des textes qui deviennent sacrés. Il y aura cependant toujours un débat entre les théologiens chrétiens entre une interprétation littérale des textes et une lecture plus souple, la validité de l'interprétation relevant toujours de la tradition et du magistère de l'église. La fiabilité mêmes des textes ne sera pas contestée jusqu'au XVIIIe  siècle.

    Avec la Réforme, la libre interprétation des écritures amène les théologiens luthériens à revenir directement aux textes. Luther ne voit pas d'intérêt à établir un ordre des événements rapportés dans les évangiles : à propos de l'expulsion des marchands du temple, qui, chez Jean se situe au début de la vie publique de Jésus, et dans les Synoptiques à la fin, il conclut : « Les Évangiles ne suivent aucun ordre en rapportant les actes et les miracles de Jésus, et, après tout, la matière n'est pas de grande importance. Si une difficulté surgit concernant l'Écriture Sainte que nous ne pouvons résoudre, il suffit de laisser tomber. » Du XVIe siècle au XVIIIe siècle, on dépensera néanmoins des trésors d'habileté pour compiler l'ensemble des événements rapportés et les organiser de façon chronologique. Ainsi Andreas Osiander (1498-1552), dans son harmonie des évangiles, (1537) soutient que « aucun mot des évangiles ne doit être omis, rien d'étranger ne doit être ajouté, et l'ordre d'aucun évangile ne doit être modifié ». Cela conduit au principe qu'un événement rapporté dans différents contextes dans les évangiles s'est produit plusieurs fois : on a ainsi deux expulsions des marchands du temple, plusieurs résurrections de la fille de Jaïre, etc.

     

     

    Histoire critique du vieux testament de Simon, 1685 chez Reinier Leers

     

    Une étape importante de l'analyse critique des textes de la Bible commence avec l'oratorien Richard Simon, avec son Histoire critique du Vieux Testament (1680), dont la première édition sera brûlée sous l'influence de Bossuet et devra être publiée par la suite en Hollande. Il y publiera en 1689 l'Histoire critique du texte du Nouveau Testament). Un de ses continuateurs sera Jean Astruc, avec ses Conjectures sur les mémoires originaux dont il paroit que Moyse s'est servi pour composer le livre de la Genèse (1753).

    Au cours du XVIIIe siècle, avec la philosophie des Lumières en France, en Allemagne et en Angleterre, l'analyse critique des textes sera une arme du rationalisme contre le dogmatisme religieux. Elle pointe d'une part les contradictions et les invraisemblances, rejetant la vérité éternelle des évangiles, et d'autre part les écarts entre le Jésus des évangiles et le Christ des dogmes. Ces dogmes sont combattus par les athées, et par les déistes qui voient en eux des obstacles à la religion naturelle.

    La première quête du Jésus historique

    La première quête est celle des tentatives de reconstitution historique de la vie de Jésus. Elle commence en 1774-78 avec la publication par Lessing des travaux de Reimarus et s'achève avec l'ouvrage de synthèse d'Albert Schweitzer en 1906. Elle est intimement liée aux premières formulations du problème synoptique, et est initiée principalement par les protestants libéraux allemands.

    Elle est notamment marquée par le retentissement en Allemagne de l'ouvrage de David Strauss : La vie de Jésus ou Examen critique de son histoire (1835) et celui en France de La Vie de Jésus de Renan (1863).

    Elle s'organise en diverses écoles.

    Reimarus

    Hermann Samuel Reimarus (1694-1768), professeur de langues orientales, déiste initie la première quête. Avant lui, personne n'a essayé de concevoir une histoire de la vie de Jésus.

    Son ouvrage de 4000 pages Les Objectifs de Jésus et de ses disciples ne fut publié qu'après sa mort, de 1774 à 1778, par le philosophe Lessing.

    Pour Reimarus, Jésus est né et mort juif, et n'a jamais voulu fonder de nouvelle religion ou d'Église. Il prêchait l'arrivée prochaine du royaume de Dieu, c'est-à-dire la restauration du royaume d'Israël, alors occupé depuis des siècles. C'est dans ce sens qu'il était considéré comme le messie par ses disciples. Ceux-ci, après sa crucifixion et l'échec apparent de ses prophéties transférèrent leurs espérances dans celle de son retour. Cette thèse, qui réintègre complètement Jésus dans le judaïsme de son temps, et sape les fondements de la foi chrétienne, fit scandale. Il est le premier à avoir souligné l'importance de l'eschatologie dans le message de Jésus, et à avoir recherché des relations de cause à effet dans l'histoire de Jésus et des débuts du christianisme.

    De Reimarus à l'école rationaliste

    Dans la lignée du rationalisme, de Reimarus à Paulus, on trouve Johann Jakob Hess (1774), Franz Volkmar Reinhard (1781), Karl Bahrdt (1786), rendu célèbre avec son explication de la multiplication des pains selon laquelle Jésus inaugure le partage des provisions tandis que les autres le suivent et partagent des repas tirés des sacs de ceux qui avaient des provisions, Johann Gottfried von Herder (1797) et Karl Heinrich Georg Venturini (1806), qui présente Jésus comme un agent de la secte des Esséniens.

    École rationaliste

    L'école rationaliste s'enracine dans les travaux des penseurs des Lumières du XVIIIe siècle, à l'exception de Rousseau et de Kant.

    Représentée par Heinrich Eberhard Gottlob Paulus dans Das leben Jesu als Grundlage einer reinen Geschichte des Urchristentums(1828) et Friedrich Schleiermacher (1832) l'école rationaliste nie ou rejette l'explication surnaturelle des miracles et de la résurrection de Jésus, et cherche à les expliquer comme des faits parfaitement naturels que les contemporains de Jésus n'auraient pas compris.

    Paulus construit une figure de Jésus guérisseur populaire qui trouvera une certaine pérennité.

    Ces travaux ne reposent pas à proprement parler sur l'analyse critique des textes. Comme l'interprétation chrétienne traditionnelle, le portrait que dressent ces auteurs de Jésus compile plus ou moins adroitement les informations tirées des synoptiques et du corpus johannique.

    L'école mythologique

    David Strauss

    David Strauss (1808-1874) fut d'abord influencé par Schleiermacher. En 1835 il publie La Vie de Jésus examinée d'un point de vue critique. Cette publication eut un retentissement considérable et marque une date importante de l'histoire de la critique évangélique. S'inspirant de la philosophie de Hegel, il s'écarte radicalement du dogme. Il distingue Jésus, réduit à de maigres contours d'une histoire personnelle et le Christ des évangiles. Pour lui l'idée fondamentale de la religion chrétienne est l'incarnation divine, et les premiers évangiles n'ont pas été écrits dans un but historique mais pour exprimer cette idée au moyen de mythes. Le mythe n'est pas simplement une fiction, mais l'expression symbolique d'une croyance. Rejetant tant l'explication surnaturelle des miracles, que les explications des rationalistes, il en fait le résultat de l'usage par les premiers chrétiens de idées messianiques juives, pour exprimer la conviction que Jésus est bien le messie.

    La Vie de Jésus de Strauss introduit aussi pour la première fois le problème de la relation entre les synoptiques et l'évangile de Jean. Pour Strauss ces deux traditions sont irréconciliables, et il conclut en défaveur de l'historicité de l'évangile de Jean.

    En 1846 l'ouvrage sera traduit en anglais par George Eliot (Mary Ann Evans). La distinction que fera Strauss en 1865 dans son ouvrage Christus des Glaubens und der Jesus der Geschichte (Le Christ de la foi et le Jésus de l'histoire) demeure d'usage courant.

    Ferdinand Christian Baur et l'École de Tübingen

    La thèse de Strauss sera critiquée par Ferdinand Christian Baur parce qu'elle ne se fonde pas sur une critique textuelle suffisamment précise. Pour Baur les évangiles sont le reflet des conflits théologiques entre les premiers chrétiens, et permettent de remonter à l'histoire de ces controverses. Ce travail sera fait par Baur et ses disciples, l'école de Tübingen, qui s'inspirant de la philosophie hégélienne de l'histoire rejette à la fois le dogme de la vérité historique des évangiles, et leur interprétation rationnelle qui les prive de leur sens mythique. Le travail d'analyse des textes sera aussi continué par des opposants aux thèses de l'école de Tübingen, comme Christian Hermann Weisse, Christian Wilke, Joseph Eugen Reuss, Albert Réville, Heinrich Julius Holtzmann, Bernhard Weiss.

    Le résultat de ces discussions fut un consensus en faveur de l'hypothèse des deux sources : les sources de la littérature évangélique sont l'évangile de Marc, dans sa forme actuelle ou sous une forme primitive appelée proto-Marc, et un recueil de paroles (logia). L'évangile de Jean est généralement considéré comme issu d'une tradition postérieure, et dominé par des idées allégoriques et dogmatiques.

    Le problème synoptique et la théorie des deux sources

    Hypothèse de Griesbach

    En 1774-1775, Johann Jakob Griesbach publie la première synopse, édition en colonnes parallèles, permettant la lecture d'un seul regard des trois premiers évangiles. Il propose aussi la première formulation critique du problème synoptique, en se démarquant de l'hypothèse augustinienne. Matthieu serait le premier évangile dont Luc se serait inspiré, puis Marc aurait utilisé les deux autres.

     

    hypothèse de l'évangile primitif (UrG)
     

    Vers 1780, G. E. Lessing, qui a publié les travaux de Reimarus, suggère que les trois évangiles ont été écrits par abréviation d'une traduction grecque d'un évangile primitif (qui aurait pu être l’évangile des Hébreux ou l’évangile des Nazoréens dont parlent les Pères de l'Église).

    hypothèse des deux sources
     

    Mais c'est en 1838 que Christian Hermann Weisse introduit l'hypothèse des deux sources selon laquelle Matthieu et Luc s'inspirent à la fois de Marc et d'un recueil aujourd'hui perdu de paroles (logia) de Jésus. Cette hypothèse sera développée en 1863 par H.J. Holtzman, et la deuxième source sera appelée source Q (abréviation de l'allemand Quelle : source) par Johannes Weiss en 1890. De nombreuses autres hypothèses ont été faites, mais c'est celle-là qui a aujourd'hui la faveur de la plupart des spécialistes.

    Ces théories placent les évangélistes dans une deuxième ou troisième génération de disciples ayant repris des traditions antérieures, et non comme des témoins proches ou même directs de la vie de Jésus, comme la tradition chrétienne le voulait, notamment pour les apôtres "Matthieu" et "Jean".

    Bruno Bauer

    Dans la lignée de Baur, on trouve Bruno Bauer, qui soutient en 1841 la priorité de l'évangile de Marc, les différences des autres textes étant le fait de l'"invention créative des évangélistes", dans laquelle il montre clairement la part jouée par des notions théologiques et dogmatiques.

    Mais il poussa sa thèse plus loin en soutenant que ces notions qui avaient fait évoluer la tradition évangélique, étaient aussi à l'origine de l'évangile de Marc. Selon lui le christianisme n'apparaît qu'au début du IIe siècle d'un syncrétisme de courants de pensées juifs grecs et romains, et Jésus est une fiction littéraire, un produit et non l'origine du christianisme. Ces idées eurent peu d'influence à l'époque. Elle trouvera un écho dans les travaux de l'école hollandaise de critique radicale et des mythistes modernes.

    La thèse mythiste

    Article détaillé : Thèse mythiste.

    Dans la première moitié du XXe siècle, se développèrent les thèses mythistes, qui nient l'existence historique de Jésus. Leurs principaux partisans furent le philosophe allemand Arthur Drews, le journaliste rationaliste britannique John M. Robertson, les Français Paul-Louis Couchoud et Prosper Alfaric. Ces thèses furent rejetées par les spécialistes de l'époque (notamment l'historien athée Charles Guignebert et le protestant Maurice Goguel), et, depuis le début de la deuxième quête, n'ont plus de réception ou de soutien qu'en dehors du milieu académique. Elle a continué d’être reprise régulièrement par des auteurs en dehors du milieu académique, se diffusant notamment sur internet.

    École libérale

    Se démarquant de l'école mythologique, les auteurs de l'école libérale vont faire de Jésus une grande figure spirituelle.

    Ernest Renan

    Ernest Renan (1823-1892) obtient la chaire de langues sémitiques au Collège de France en 1862. En 1863, il publie La Vie de Jésus - la première en France et dans le monde catholique. Elle reçoit un succès considérable (huit éditions en trois mois, et cinq traductions en allemand dans l'année), et fait scandale : le pape Pie IX, le considère comme un blasphémateur européen. En 1864, ministre de l'Instruction publique Victor Duruy supprime sa chaire, qu'il ne recouvrera qu'en 1871 avec la Troisième République.

    Renan reprend et vulgarise les travaux historiques et philologiques de la critique allemande. La qualité littéraire de La vie de Jésus, qui unit la vision positiviste de l'histoire et l'imagination romantique, est unanimement reconnue. Renan fait de Jésus un doux rêveur, promeneur dans la campagne de Galilée, le sourire aux lèvres et surpris par le drame auquel il participe. Après sa mort, la passion d'une femme donne au monde un dieu ressuscité.

    Malgré son succès littéraire, l'ouvrage de Renan déçut l'émergente école française protestante de critique théologique, et notamment T. Colani, pour qui le Jésus de Renan n'est pas celui de l'histoire, celui des synoptiques : « Le Christ de Monsieur Renan est le Christ du quatrième évangile [i.e. de Jean], mais dépourvu de son auréole métaphysique, et retouché par un pinceau où se mêlent étrangement le bleu mélancolique de la poésie moderne, le rose de l’idylle du XVIIIe siècle ».

    Les vies de Jésus libérales

    Durant les 40 années qui suivent, nombre de livres de vulgarisation paraissent avec des points de vue variés sur les miracles, mais tous tentent une explication psychologique de la messianité de Jésus.

    Ainsi, David Friedrich Strauss. Daniel Schenkel Karl Heinrich Weizsacker, Heinrich Julius Holtzmann, Theodor Keim, Karl Hase Willibald Beyschlag et Bernhard Weiss.

    École apocalyptique

    Un nouveau changement de perspective se produit. La problématique mise en avant est celle de la conscience messianique de Jésus ; en clair, Jésus avait-il conscience d'être le Messie attendu depuis la fin de la royauté en Israël ? Dans cette question, Israël doit être compris comme le royaume du Nord de Syrie Palestine dont le dernier roi archéologiquement attesté est Omri au IXe siècle av. J.-C.

    Les francophones

    • Les plus rationalistes comme le pasteur Timothée Colani Jésus-Christ et les croyances messianiques de son Temps (Strasbourg, 1864), traite les traces de cette pensée comme des interpolations. (plus sur Renan et Colani).
    • Louis-Auguste Sabatier pense que Jésus utilise des métaphores propres à son époque. En cela, il se rapproche de travaux récents qui ont montré que le messianisme est fréquent dans le judaïsme du deuxième Temple entre le Ier et le IIe siècle av. J.-C.
    • Auguste Wabnitz sur l'Idéal messianique de Jésus (thèse à Montauban, 1878),
    • Charles Renouvier, dans l'Année philosophique, 1893, marche aussi contre cette conscience

    Les autres Européens

    • Johannes Weiss (1892) qui, en 1890 donne son nom au document Q comme Quelle (de) qui signifie source
    • Albert Schweitzer (1902) : Il établit que les évangiles canoniques sont de la pseudépigraphie. Avec Karl Martin August Kähler (1892) et Wilhelm Wrede (1901), il représente une certaine crise de la deuxième quête qui constate, qu'avec les textes dont ils disposent, on ne peut aller plus loin.

    École histoire des religions

    Fondée par Hermann Gunkel (en) et Wilhelm Bousset (1896), la Religionsgeschichtliche Schule observe la naissance du Christianisme dans un contexte historique et social qui se déroule sous l'influence des diverses religions environnantes. Elle établit

    • ses dépendances directes et indirectes des religions à mystères hellénistiques et orientales.
    • les premières hypothèses sur ses dépendances envers le judaïsme.

    Ses représentants sont Richard August Reitzenstein (en) (1910) et Julius Wellhausen(1894), l'un de deux auteurs de la théorie de Graff-Wellhausen pour l'Ancien Testament.

    Entre Schweitzer et la nouvelle quête

    La quête du Jésus historique et la science catholique : la crise moderniste

    En France, à la suite de Renan et avec la IIIe République, le tournant du XIXe siècle et du XXe siècle voit le développement des études laïques sur la religion : une section des sciences religieuses apparaît à l'École pratique des hautes études, et des chaires d'histoire des religions s'ouvrent en Sorbonne et au Collège de France. L'opposition entre les exégèses laïques et religieuses sera marquée par les personnalités de l'abbé Alfred Loisy et du dominicain Marie-Joseph Lagrange.

    Alfred Loisy publie en 1902 L'Évangile et l'Église et en 1903 Autour d'un petit livre. Il y vulgarise la critique textuelle et historique allemande ainsi que la théorie des deux sources. On lui doit la phrase célèbre « Jésus annonçait le Royaume et c'est l'église qui est venue ». Malgré les ouvertures de l'encyclique Providentissimus, (1893), le raidissement de la Commission Biblique vaticane amène l'encyclique Lamentabili, et conduit à la crise moderniste et à l'excommunication de Loisy en 1908, qui est par la suite nommé au Collège de France, et publie en 1910 Jésus et la tradition évangélique.

    Les autres figures de l'"exégèse indépendante" seront le libre penseur Charles Guignebert, élève de Renan et Professeur en Sorbonne, et Maurice Goguel (1870-1955), professeur à la faculté protestante de Paris. Ce dernier, reprenant une phrase de Renan en 1849 : « À peine, peut-être, en exprimant de tous les évangiles ce qu'ils contiennent de réel, obtiendrait-on une page d'histoire sur Jésus » dira : « Là où Renan parlait d'une page, certains critiques ne parlent plus que d'une ligne. »

    Du côté de la "science catholique", le dominicain Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), fondateur de l'École biblique et archéologique française de Jérusalem, s'oppose au radicalisme critique de Loisy, à la mise en doute de l'historicité des évangiles. Il soutient la tradition apostolique de leur écriture et s'oppose à leur composition tardive par la deuxième génération des communautés chrétiennes. Il est cependant soupçonné de modernisme et ses travaux seront mis à l'index. Autour de lui s'organise cependant l'exégèse catholique qui analysera les liens entre l'inspiration divine des évangiles et leurs aspects variés et littéraires.

    Dans la lignée de Lagrange on trouve des jésuites libéraux comme Léonce de Grandmaison (1868-1927), qui énonce une équation de proportion entre la cause (la réalité de Jésus-Christ) et l'effet (l'expansion du christianisme).

    L'école de la critique des formes littéraires

    À partir des années 1920, se développe ce qu'on a appelé l'école de la critique des formes littéraires, (Formgeschichte) dont les initiateurs seront les théologiens protestants allemands avec Martin Dibelius, avec Die Formgeschichte des Evangeliums (1919), et Rudolf Bultmann avec Die Geschichte der synoptischen Tradition (1921).

    Ce dernier s'inscrit dans la lignée de Willhem Bousset et de l'école « histoire des religions ».

    Les conclusions de ce travail ont été résumées par Maurice Goguel :
    « - Le cadre des récits évangéliques est artificiel, les transitions y sont schématiques et rédactionnelles, elles ne réalisent pas d'enchaînement organique et ne font que masquer le fait que la narration évangélique était originellement formée d'une multiplicité d'éléments isolés les uns des autres.
    - Les évangiles ne sont pas des documents d'histoire. Ils n'ont pas été composés ni conservés pour faire connaître le Jésus qui a vécu et enseigné en Galilée et en Judée et qui est mort à Jérusalem. Ce sont des documents religieux qui présentent ce que Jésus était pour la foi et pour la piété des milieux dans lesquels ils ont été composés.
    - Les diverses formes sous lesquelles se présentent les matériaux évangéliques montrent qu'ils ont été élaborés en vue des diverses fonctions de la vie de l'église ; ils y sont si étroitement adaptés qu'il serait chimérique de prétendre en dégager un noyau historique. »

    Joseph Klausner et l'école juive du Nouveau Testament

    Article détaillé : Historiographie juive du Nouveau Testament.

    Yosef Klausner publie en hébreu en 1922, traduit en anglais 3 ans plus tard Jesus of Nazareth: His Life Times and Teachings London: George Allen and Unwin, 1925 et en allemand 5 ans plus tard Jesus von Nazareth. Seine Zeit, sein Leben und seine Lehre. Walter Fischel, Berlin 1930, et sur les origines du christianisme, From Jesus to Paul London: Allen and Ulwin, 1942. Joseph Klausner rend à Jésus sa judéité. Il montre que ses enseignements s'enracinent dans le terreau pharisien de l'école de Hillel.

    La 2e quête du Jésus historique : la nouvelle quête

    Début : Ernst Käsemann vers 1950 ; fin : vers 1980-85

    noms : Günther Bornkamm, Joachim Jeremias, Eduard Lohse, Herbert Braun, Heinz Schürmann, Étienne Trocmé, Norman Perrin

    Après l'impasse de la première quête constatée par Schweitzer et Wrede au tout début du XXe siècle, il faudra une cinquantaine d'années pour qu'une nouvelle quête du Jésus historique soit lancée. Elle s'appuiera sur les travaux de l'école de l'histoire des formes, qui avaient montré que les évangiles étaient des sources premières pour l'étude de l'histoire du christianisme primitif, mais seulement secondairement pour l'histoire de Jésus. Cela impliquera une restriction de ce que l'on entend par « Jésus historique », qui n'est plus Jésus de Nazareth tel qu'il a été (par opposition au Jésus-Christ du christianisme), mais ce que l'on peut savoir objectivement de Jésus en utilisant les méthodes scientifiques des historiens.

    La seconde quête s'est surtout développée en Allemagne, ses exégètes insistant alors beaucoup sur la rupture entre Jésus et le judaïsme. Cette étape tente d'assurer les bases d'une démarche historique valable en recherchant ce qui différencie et singularise Jésus par rapport à son milieu ambiant. Elle s'attache à chercher l'historicité et l'authenticité ou non des paroles et gestes de Jésus indépendamment du vernis christologique.

    Ces travaux ont plusieurs aspects communs : ils renoncent à décrire le détail de la biographie et la psychologie de Jésus, et se concentrent sur certains aspects de sa prédication (paroles, paraboles, gestes et controverses), entre la rencontre avec Jean le Baptiste et la crucifixion. Le point central de la prédication de Jésus est l'avènement, imminent ou proche, du Royaume de Dieu. Jésus n'a pas eu de revendication messianique et son identification au Christ (en particulier dans l'évangile de Jean) est le fait des chrétiens après sa mort. Ils se focalisent sur le critère d'historicité de dissimilarité, qui permet de cerner la singularité de Jésus tant vis-à-vis du judaïsme que du christianisme primitif.

    Les critères d'historicité

    Les historiens ont élaboré un certain nombre de critères pour l'analyse des sources historiques. Ils doivent être utilisés conjointement et n'ont pas une valeur absolue, et servent à systématiser les arguments. Ernst Käsemann trace un premier critère de discernement important, critère dit de dissimilarité :

    • La dissimilarité : On peut attribuer à Jésus les paroles et gestes qui ne relèvent ni du judaïsme contemporain de Jésus ni des premières communautés chrétiennes. Si le critère ne permet évidemment pas de brosser un portait complet de Jésus, c'est un outil qui peut permettre d'en dégager certains traits spécifiques.

    D'autres critères s'ajoutent à ce critère initial :

    • L'embarras ecclésiastique : est en faveur de l'authenticité ce qui se trouve dans les textes alors que cela constitue une difficulté pour les rédacteurs du Nouveau Testament. (exemples : la parole de Jésus sur la croix (Mc 15, 34), le baptême de Jésus par Jean qui le place dans une position inférieure)
    • L'attestation multiple dans des sources littérairement indépendantes
    • La cohérence d'une part entre actes et paroles de Jésus, et d'autre part la cohérence globale du Jésus reconstruit (ce qui permet dans une certaine mesure de récupérer certains éléments ne rentrant pas dans le critère de dissimilarité)

    De la deuxième à la troisième quête

    La quête se clôt vers 1985 quand s'ouvre ce que l'on appelle de manière conventionnelle la troisième quête, qui prend naissance essentiellement aux États-Unis et qui, dans un revirement spectaculaire, met plutôt l'accent sur l'appartenance de Jésus au judaïsme.

    La 3e quête du Jésus historique

    Elle commence dans les années 1980, essentiellement aux États-Unis en intégrant trois nouveaux aspects : le principal est qu'elle réintègre Jésus dans sa judéité (par opposition à la deuxième quête qui mettait l'accent sur la rupture), l'ajout de sources de littérature apocryphe en plus des évangiles canoniques, et l'introduction de méthodes sociologiques.

    Les travaux de la 3e quête du Jésus historique seront popularisés aux États-unis à partir du milieu des années 1980 par le Jesus Seminar, et en France à partir du milieu des années 1990 par la série documentaire Corpus Christi.

    Le Jesus Seminar

    Le Jesus Seminar (Séminaire sur Jésus) est un groupe fondé aux États-Unis en 1985 par Robert Funk dans le cadre du Westar Institute. d'environ 200 personnes, pour la plupart des spécialistes universitaires en études bibliques ou en science des religions, souvent des auteurs reconnus dans leurs spécialités (parmi lesquels Funk lui-même, John Dominic Crossan, Marcus Borg, Harold W. Attridge, Arthur J. Dewey, Stephen L. Harris, John S. Kloppenborg, Robert M. Price, James M. Robinson...

    L’objectif du séminaire est de déterminer les paroles, paraboles et gestes que l’on peut effectivement attribuer à Jésus. Ce travail se fait selon les méthodes historico-critiques classiques, les originalités étant l’utilisation de l’évangile selon Thomas en plus des évangiles canoniques, et l’accent mis sur le critère d’attestation multiple (un passage se trouve dans plusieurs sources littérairement indépendantes). Après le travail d’exégèse, le consensus entre les fellows est décidé par un système de votes avec des ardoises de couleur.

    Là-dessus, postérieurement au travail d’exégèse classique, chacun des Compagnons du Jesus Seminar s’est livré pour son compte à un travail d’exégèse littéraire ; ils aboutissent à des portraits de Jésus assez contrastés. Ainsi,

    • John Dominic Crossan en arrive à un Jésus paysan galiléen ;
    • d’autres en font un révolutionnaire du changement social ;
    • d’autres décodent un Jésus politique ;
    • alors que d’autres reprennent à nouveau frais les thèses gnostiques et décodent un Jésus uniquement spirituel.

    Ces différences s’expliquent facilement en regardant la proportion des textes de chaque Évangile canonique qu’ils retiennent, la proportion de Paul qu’ils y mêlent, le ratio d’intérêt qu'ils portent aux apocryphes et particulièrement, le goût du Jesus Seminar pour le recueil du Logion de Thomas.

    Les opposants à la thèse cryptique déclarent que les Jésus de ces exégèses littéraires deviennent une projection des idées de l’auteur. L’histoire des conciles christologiques atteste que les créateurs des dogmes et doctrines ne procédaient pas autrement, quoique l’exégèse scientifique qui précède, dans le cas du Jesus Seminar, ait été absente de l’exégèse patristique.

    Datant de 1985, les thèses du Jesus Seminar restent largement méconnues en pays francophones.

    Pratiquement :

    • Les Compagnons reconnaissent l’historicité de Jésus, rabbin enseignant du premier siècle
    • Ils séparent les enseignements de Jésus des apports de la tradition de l’Église primitive.

    Jésus et le judaïsme

    Les travaux de la deuxième quête avaient mis l'accent sur la rupture de Jésus et de ses enseignements avec un judaïsme rigoriste et légaliste9. Les recherches plus récentes, (fondées sur l'étude du judaïsme hellénistique (Philon, Flavius Josèphe, ainsi que sur les Manuscrits de Qumrân découverts dans les années 1950), révèlent un judaïsme bien plus divers (avec les pharisiens, les sadducéens, les Esséniens, les zélotes, et divers mouvements prophétiques...) que le judaïsme rabbinique qui apparaitra après la destruction du Temple en 70, nouveau contexte dans lequel seront écrits les évangiles. Certains chercheurs parlent de judaïsmes au pluriel. C'est dans ce contexte que les travaux de la troisième quête replacent Jésus, juif « marginal », comme beaucoup d'autres, en conflit au sein même du judaïsme et non contre le judaïsme.

    Méthodologiquement, le critère de dissimilarité, essentiel dans la deuxième quête, va être tempéré par un critère de plausibilité historique, introduit par l'allemand Gerd Theissen : la reconstitution du Jésus historique doit être plausible avec le judaïsme de son temps, et en même temps avec l'évolution du christianisme primitif.

    Les nouvelles sources

    L'évangile selon Thomas

    L'évangile selon Thomas est un texte apocryphe gnostique, dont quelques fragments en grec (datés ~200), ont été retrouvés dans les papyri d'Oxyrhynque au début du XXe siècle, et dont une version presque complète en copte (datée de ~350) a été découverte en 1945 dans la bibliothèque de Nag Hammadi. Il comprend 114 paroles de Jésus. La question qui divise les spécialistes à l'heure actuelle, est de savoir s'il s'agit d'une création secondaire tardive du IIe siècle, ou bien s'il repose sur une tradition indépendante des synoptiques, et antérieure à leur composition, sur laquelle seraient venues se greffer des considérations gnostiques.

    Dans le cadre des travaux du Jesus Seminar, où l'évangile de Thomas a été considéré comme un cinquième évangile, et où le critère d'historicité essentiel a été celui des attestations indépendantes multiples, cela a conduit a éliminer la quasi-totalité des paroles de l'évangile de Marc (considéré comme le plus fiable historiquement pendant la deuxième quête). Ainsi, alors que seulement quelques paroles propres à l'évangile de Thomas ont été retenues comme authentiques, tout ce qui concerne l'annonce du Royaume de Dieu est également exclu, car absent de Thomas. Ce qui reste fait de Jésus un maître de sagesse plutôt qu'un prophète eschatologique.

    L'évangile selon Pierre

    L’Évangile de Pierre est un texte apocryphe du IIe siècle, traditionnellement attribué à l'apôtre Pierre, mais condamné par les pères de l'Église pour hérésie docéte. Il n'était connu que par quelques citations. En 1886-87 un manuscrit du VIIIe siècle est retrouvé dans la tombe d’un moine, sur le site d’Akhmîm en Haute-Égypte. Ce manuscrit contient un récit du procès, de la crucifixion et de la résurrection de Jésus. Deux autres brefs fragments ont été retrouvés parmi les papyri d'Oxyrhynque.

    La reconstitution de la source Q

    De nombreux travaux de critique textuelle ont été faits pour reconstituer la source Q, c'est-à-dire la deuxième source, aujourd'hui disparue, qui avec Marc aurait été utilisée pour les évangiles de Matthieu et de Luc. À la suite de Lührmann, les travaux de John S. Kloppenborg, The formation of Q. Trajectories in ancient wisdom collections (1987) ont été marquants. Il se serait agi d'un recueil de paroles (Logia) comme l'évangile de Thomas. L'étude des différentes strates d'écriture montrerait que la couche la plus archaïque serait essentiellement sapientale, les éléments apocalyptiques ayant été rajoutés par la suite.

    En 2000, James M. Robinson, Paul Hoffman, et John S. Kloppenborg ont publié The Critical Edition of Q: Synopsis including the Gospels of Matthew and Luke, Mark and Thomas with English, German, and French Translations of Q and Thomas.

    La version slavonne de la Guerre des Juifs de Flavius Josèphe

    La version slavonne de la Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, qui se présente comme une traduction effectuée par des moines russes au XIe siècle ou au XIIe siècle, est un texte redécouvert en Occident en 1906 lors de la publication par Alexander Berendts d'une traduction et d'un commentaire sur les passages relatifs au Nouveau Testament. Après en avoir défendu l'authencité, Étienne Nodet estime dans un ouvrage paru en 2002 que c'est une source historiographique importante sur Jésus et Jean-Baptiste ainsi que sur les esséniens.

    Autres auteurs

    article détaillé : Historiographie juive du Nouveau Testament.

    En Europe, ces auteurs bénéficient d'une plus grande notoriété que les fellows du Jesus Seminar sans pour autant atteindre pleinement le grand public. Voir l'article détaillé

    Geza Vermes

    • Les livres de Geza VermesSon concept est résumé dans un interview au Point no 1723 du 22 sept. 2005
      • Enquête sur l’identité de Jésus : nouvelles interprétations (Bayard, 2003)
      • Jésus le juif (Desclée, 1978)

    Contrairement à l'image divinisée qui a commencé à s'élaborer à partir de l'apôtre Paul, Jésus était un homme simple, modeste. C'est un prophète dans la tradition des Élie et Élisée de la Bible, eux aussi actifs dans les provinces excentrées du nord de la Palestine. Comme eux, Jésus est doté d'un pouvoir charismatique extrême. Les Évangiles le montrent : c'est un guérisseur capable de soulager les maladies (paralysie, cécité…), un exorciseur qui chasse les démons, un faiseur de miracles. Un statut qui n'a en soi rien d'extraordinaire à l'époque : la littérature des rabbins cite ainsi d'autres « guérisseurs » connus à l'époque et Flavius Josèphe parle de Jésus comme d'un « homme sage » qui savait accomplir des prodiges.

    Guy G. Stroumsa

    Guy G. Stroumsa est professeur de religion comparée à l'université hébraïque de Jérusalem. On ne peut le classer, à proprement parler, parmi les penseurs de la quête du Jésus historique. Pourtant, au fil de son livre La Fin du sacrifice (Éd. Odile Jacob, 2005), il porte un regard historien sur le personnage de Jésus, en défendant un concept : la figure du prophète parfait.

    Autres auteurs

    Certains d'entre eux (Christian B. Amphoux, Pier Franco Beatrice, Pierre-Antoine Bernheim, François Bovon, François Blanchetière, Paula Fredriksen, Christian Grappe, Martin Hengel, Moshe David Herr, Simon Légasse, Jean-Pierre Lémonon, Emmanuelle Main, Daniel Marguerat, Etienne Nodet, Enrico Norelli, Serge Ruzer, Daniel Schwartz, Graham Stanton, Ekkehard W. Stegeman, Guy Gedaliahu Stroumsa, David Trobisch, François Vouga, Hyam Maccoby, Marie-Emile Boismard) ont connu une certaine notoriété par leur présentation au grand public dans les deux séries d'émissions de Arte de Jérôme Prieur et Gérard Mordillat : Corpus Christi et L'Origine du christianisme.

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