• Protestantisme

     
     

    Protestantisme

     

     

    Le protestantisme regroupe l'ensemble des courants religieux chrétiens nés de l'opposition aux orientations prises par le catholicisme romain durant le Moyen Âge (et qui ont été définitivement affirmées par Rome au concile de Trente.) Cette rupture est connue comme Réforme et a été menée sous l'impulsion de théologiens tels que Martin Luther, Jean Calvin, Ulrich Zwingli parmi tant d'autres. John Wyclif, Jan Hus, Lefèvre d'Etaples sont considérés comme des précurseurs de la Réforme.

    A la suite de ces théologiens, le protestantisme comprend des courants théologiques très divers. Au sein de la seule fédération protestante de France, on dénombre vingt-six unions d'Églises, tandis que, au plan international, ce sont environ trois cent vingt Églises issues du protestantisme qui participent au conseil œcuménique des Églises, aux côtés d'une trentaine d’Églises orthodoxes et des Églises vieilles-catholiques.

    L'estimation du nombre de protestants dans le monde est assez variable, selon que l'on prend en compte les seuls protestants « historiques » (ceux remontant à la Réforme « magistérielle » du XVIe siècle : calvinistes, réformés, presbytériens ; luthériens ; anglicans low church, épiscopaliens ; méthodistes — XIXe siècle, dissidence anglicane — principalement), au nombre d'environ trois cent cinquante millions, ou que l'on y ajoute les descendants (baptistes et autres Églises), évangéliques, de la « Réforme radicale » (toujours au XVIe siècle mais aussi après), qui sont, en 2011, environ cinq cents millions dans le monde. Parmi les évangéliques, on estime à deux cents millions le nombre des pentecôtistes dans le monde. Les évangéliques et les pentecôtistes (apparus au tout début du XXe siècle et mettant l'accent sur le « baptême du Saint-Esprit ») sont très dynamiques et en constante expansion de par le monde (Amérique latine, Afrique, Asie... ).

    Histoire

    Origine

    Article détaillé : Réforme protestante.

    Les débuts du protestantisme sont généralement datés du 31 octobre 1517, le moine augustin allemand et docteur en théologie Martin Luther publie les 95 Thèses dénonçant les travers de l’Église catholique romaine comme la vente des indulgences, et affirme que la Bible doit être la seule autorité sur laquelle repose la foi.

    Protégé par le Duc Jean-Frédéric de Saxe (1503-1554), Luther brûle la bulle Exsurge Domine le menaçant d’excommunication en 1520.

    L'année 1521 est également considérée comme déterminante : en janvier, Martin Luther, devant la diète de Worms, refuse de se rétracter, s’estimant soumis à l’autorité de la Bible et de sa conscience plutôt qu’à celle de la hiérarchie ecclésiastique et est excommunié.

    Invoqués ici pour la première fois, l'appel direct à Dieu et à la conscience individuelle sont des marqueurs du protestantisme.

    Parmi les idées de Luther, l'accès de tous à la Bible sans discrimination sociale et l'égalité entre les hommes ont un fort écho dans la population majoritairement paysanne, à tel point qu'elles provoquent au printemps 1525 le Bauernkrieg (guerre des paysans) dans le Saint-Empire romain germanique.

    Afin de mettre un terme rapide à cette explosion de violence contre la classe dirigeante, les princes se réunissent lors de la première diète de Spire, en 1526. Ils conviennent du décret de l'état d'urgence et décident que chaque prince choisit le culte à pratiquer dans son État, les opposants étant contraints de fuir vers un autre État favorable à leur foi. Cette confessionnalisation est déjà initiée à la fin de 1526 par Jean Ier de Saxe qui institutionnalisa le luthéranisme.

    Cependant, absent de cette assemblée formée par ses électeurs, Charles Quint demeure hostile à ces dispositions. Accusé par le Saint-Siège de soutenir Luther, Charles Quint décide d'endiguer la propagation des thèses luthériennes. Il convoque donc en 1529, avec son frère Ferdinand Ier, une seconde diète de Spire lors de laquelle il révoque toutes les concessions faites par les princes aux paysans. Ainsi, il réinstaure le culte catholique et la messe en latin. Ces derniers réagissent immédiatement sous la conduite de Jean de Saxe en émettant une protestation. Les princes signataires sont appelés « protestants ».

    Le terme « protestant » est utilisé pour la première fois en 1529, quand les seigneurs et les villes qui suivaient la doctrine de Martin Luther se sont déclarés contre les décisions prises par la diète impériale à Spire à majorité catholique. Les protestants français, d'abord appelés « luthériens » au début par leurs adversaires, seront ensuite nommés par dérision « huguenots », puis « religionnaires ». Il s'agit de l'abréviation de « ceux de la Religion prétendue réformée », appellation officielle du protestantisme dans les actes royaux.

     
    Distribution du Protestantisme (rouge) et du Catholicisme (bleu) en Europe centrale (en 1618).

    Diffusion

    Le Luthéranisme se répand dans toute l'Europe le long des voies de communication commerciales. De nombreux princes allemands l'adoptent, ce qui va dans le sens de leur quête d'indépendance par rapport aux pouvoirs extérieurs qui régissent le Saint-Empire romain germanique : le Pape et l'empereur. L'empereur Charles Quint, justement, est aux prises avec les Turcs qui conquièrent de plus en plus de territoire européen depuis la chute de Constantinople et menacent à présent l'est de son empire ; il ne peut donc intervenir à l'encontre des princes qui deviennent protestants. Le Luthéranisme devient religion d’État en Suède en 1529, puis au Danemark en 1536. En 1536, Jean Calvin publie en latin l’Institution de la religion chrétienne. En 1545, le concile de Trente réaffirme les dogmes et la discipline de l’Église catholique. Il se termine en 1563.

    Aux XVIe et XVIIe siècles, la France bascule dans les guerres de religion (1562-98) puis après une période de tolérance sous l'Édit de Nantes, dans une proscription croissante du protestantisme associé à des violences : destruction de temples, enlèvement d'enfants, logement de troupes, interdiction d'exercice de certains métiers et charges, ce qui conduit, malgré l'interdiction faite également d'émigrer, à l'exode de quelque deux cent cinquante à trois cent mille personnes vers l'Allemagne, la Suisse, les Pays-Bas et l'Angleterre.

    Dans le Saint-Empire romain germanique, les troubles avaient pris fin dès 1555 avec la Paix d'Augsbourg, qui promulguait le principe « un prince, une religion » et permettait donc de facto une tolérance, ceux qui étaient résolu à conserver leur religion étant libre de se déplacer, parfois de quelques kilomètres seulement, pour l'exercer librement.

    Les Pays-Bas faisaient exception à cette règle, les troubles religieux venant doubler le rejet de la mise sous tutelle de la Flandre et des Pays-Bas par les Habsbourg espagnols. La paix n'intervient qu'en 1648 (Traité de Münster) à l'issue de la cruelle Guerre de Quatre-Vingts Ans et consacre la division politique et religieuse des Pays-Bas : au sud, les Pays-Bas espagnols catholiques où le protestantisme est interdit, au nord les Pays-Bas indépendants, dirigés par des protestants et où le catholicisme est tout juste toléré.

    En Angleterre, les convenances personnelles du roi Henri VIII en matière matrimoniale le conduisent à rompre avec Rome. Née de ce schisme, l'Église anglicane conserve d'abord tous les aspects extérieurs du catholicisme mais évoluera graduellement vers le protestantisme tandis que le catholicisme poursuit son évolution divergente par le biais des doctrines promulguées après la rupture.

    En Suisse, les cantons s'étaient déterminés séparément, les plus vastes et les plus puissants (Bâle, Zurich, Berne) basculant vers le protestantisme. En Europe du sud, les velléités de luthéranisme avaient été éteintes par l'inquisition. Seule exception notable, la communauté hérétique dite vaudoise : lors du synode de Chanforan, la majeure partie de l'Église vaudoise choisit d'adhérer à la Réforme en 1532. Malgré les persécutions (entre autres le massacre de trois mille vaudois du Luberon en 1545), cette petite communauté s'est maintenue dans le Piémont.

    Le protestantisme connaît ensuite une expansion mondiale au travers des mouvements missionnaires qui, le plus souvent, accompagnent la colonisation. Dans le cas des États-Unis, il est alimenté en outre par l'exil des non-conformistes religieux d'Angleterre ou d'autres régions d'Europe : ainsi les Quakers sont-ils très tôt et très largement implantés dans le Nouveau Monde, mais c'est le cas aussi des Anabaptistes germaniques (allemands, suisses, alsaciens) qui fondent de florissantes communautés mennonites et amish aux États-Unis.

    Pensée protestante

    Les protestants modernistes hésitent à parler de « doctrine » ou de « religion ». Ils préfèrent convictions, engagements ou valeurs. Ils préfèrent toujours préserver un espace de discussion et d'échange entre les fidèles, particulièrement pour leurs expressions de foi, même les plus conservatrices.

    Les Six Grands Principes

    Toutes sensibilités confondues, les protestants partagent ces points fondamentaux (les deux premiers concernent le salut) :

    • Sola gratia (« par la grâce seule »)
    L'homme ne peut pas mériter son salut auprès de Dieu, mais Dieu le lui offre gratuitement par amour. Ce qui rend l'homme capable d'aimer lui aussi. Ainsi, la valeur d'une personne ne dépend que de l'amour de Dieu, et non de ses qualités, ni de son mérite, ni de son statut social.
    • Sola fide (« Seule la foi compte »)
    Ce don se fait à l'occasion d'une rencontre personnelle avec Dieu, en Jésus-Christ (solo Christo, par Christ seul). C'est cela la foi, non une doctrine ou une œuvre humaine. D'une personne à l'autre, elle peut surgir brusquement ou être le fruit d'un cheminement. Chacun la vit de manière particulière, comme sa réponse à la déclaration d'amour de Dieu.
    • Sola scriptura (« par l'Écriture seule »)
    (A mettre en rapport avec le sacerdoce universel et l'éclairage indispensable du Saint Esprit)
    Considérée comme porteuse de la parole de Dieu, la Bible est à la fois la seule autorité théologique et le seul guide, en dernière instance, pour la foi et la vie. Elle est éclairée par la prédication de ministres appelés par l'Église et formés par elle (mais le Saint-Esprit peut appeler d'autres prédicateurs que seulement ceux-ci). À travers les témoignages humains qu'elle transmet, elle dessine des principes de vie à partir desquels s'exerce la responsabilité personnelle de chacun.
    • Soli Deo gloria (« à Dieu seul la gloire »)
    Il n'y a que Dieu qui soit sacré, divin ou absolu. Ainsi, aucune entreprise humaine ne peut prétendre avoir un caractère absolu, intangible ou universel, y compris la théologie. De plus, partant du principe que Dieu a donné la liberté aux hommes, les protestants sont généralement favorables à un système social qui respecte la pluralité et les libertés.
    • Ecclesia semper reformanda (« l'Église doit se réformer sans cesse »)
    Les institutions ecclésiastiques sont des réalités humaines. Elles sont secondes. « Elles peuvent se tromper », disait Luther. Ainsi, les Églises doivent sans cesse porter un regard critique sur leur propre fonctionnement et leur propre doctrine, à partir de la Bible. En revanche, les chrétiens catholiques pensent qu'il faut être guidé par l'Église de façon claire. La certitude peut aller dans certains cas jusqu'au dogme (vérité qui ne peut être reniée), prononcée par un concile, ou par le Pape en vertu de l'«infaillibilité pontificale».
    • Sacerdoce universel
    Principe de la Réforme protestante, que Luther considère comme central, selon lequel chaque baptisé est « prophète, prêtre et roi » sous la seule seigneurie du Christ. Ce concept anéantit les principes de hiérarchie au sein de l'Église. Chaque baptisé a une place de valeur identique, y compris les ministres (dont les pasteurs font partie). Issus d'études de théologie et reconnus par l'Église, ils sont au service de la communauté pour l'annonce de la Parole de Dieu (prédication et sacrements) et les missions particulières qui en découlent. Les femmes ont accès aux ministères de certaines Églises protestantes, cela a évolué en fonction des pays et des époques.

    Pratiques et croyances protestantes

    La doctrine protestante repose exclusivement sur les Écrits sacrés, à savoir la Bible, uniquement constituée de l’Ancien et du Nouveau Testament. Les écrits apocryphes ont été considérés par les Réformateurs comme intéressants mais non fondateurs de la foi et ne sont plus imprimés dans les Bibles protestantes depuis le XIXe siècle. Le protestant croit donc à la résurrection et à la vie éternelle (voir les Évangiles). À l'instar de toutes les confessions chrétiennes, la résurrection de Jésus-Christ peut sans doute être considérée comme le point essentiel de la foi protestante. (cf. 1re Épitre de S. Paul aux Corinthiens, chapitre 15, verset 14 : « si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vaine, et votre foi aussi est vaine. ») Les pratiques majeures sont communes avec celles de l’Église catholique (prières, lecture de la Bible, le culte dominical et la participation à l’Eucharistie, dénommée la Sainte-Cène).

    Le protestantisme comporte toutefois notablement moins de rites que les autres branches du Christianisme. Par exemple, les protestants ne pratiquent pas le signe de croix et n'utilisent pas d'eau bénite, car ils considèrent qu'il s'agit là de superstitions. L'appartenance à l'Église est concrétisée chez les protestants par la confession de foi et non par la participation aux rituels sacramentels qui a la préférence des catholiques.

    Les protestants célèbrent les fêtes de Noël, des Rameaux, de Pâques (ils célèbrent le Jeudi Saint et le Vendredi saint mais sans procession ni chemin de croix), de l’Ascension et de la Pentecôte.

    Le Baptême et la Sainte-Cène sont les deux seuls sacrements chez les protestants, qui partent du principe que, d'après le témoignage des textes bibliques, seuls ces deux actes ont été institués par Jésus-Christ. Dans certaines Églises protestantes, le baptême n'est administré qu'à l’âge adulte tandis que d'autres laissent le choix et pratiquent assez largement le baptême des enfants.

    Le mariage est la bénédiction divine d'un amour humain et, bien que le Protestantisme n'encourage pas la pratique du divorce, l'idée qu'un divorce peut être préférable à une vie de couple devenue très difficile est admise par un certain nombre ; le remariage de divorcés peut être possible.

    Le culte des funérailles est destiné à l’accompagnement de la famille et des amis, il est centré sur l'annonce de l’Évangile et la promesse de résurrection. Le défunt est enterré simplement, avec respect : lecture d’un passage de la Bible et prières pour les familles. Il n'y a pas de cérémonie pour les morts de type messe anniversaire. Les autopsies, les prélèvements d’organes ainsi que la crémation sont en général autorisés.

    Différences avec l'Église catholique

    Il existe de nombreuses différences entre le culte protestant et le culte catholique.

    Les protestants se référent uniquement à la Bible comme source de doctrine (sola scriptura). Ils récusent en particulier la tradition, autre source dogmatique admise par le catholicisme. Ils insistent sur le rôle de l'Esprit saint pour accéder à une compréhension véritable du sens du message biblique. Les protestants ne reconnaissent pas l'autorité du Pape, ni celle des cardinaux. Pour des raisons historiques, il existe une multitude de communautés protestantes non affiliées les unes aux autres. Les Églises protestantes sont organisées soit autour d'évêques parfois appelés inspecteurs ecclésiastiques (d'après le sens du mot grec episkopos), il est alors question de système épiscopalien (cas des Luthériens et des Anglicans), soit autour de conseils presbytéraux souverains, les paroisses adhérant volontairement à des unions d'Églises régies par une sorte d'assemblée générale dénommée synode, il est alors question de système presbytérien-synodal (cas des Églises réformées). Ces unions qui sont cantonnées à l'échelon national se regroupent par obédience (luthérienne, réformée, anglicane, baptiste, méthodiste, etc.) au sein de fédérations internationales qui sont en général elles-mêmes affiliées au Conseil œcuménique des Églises (COE).

    Les protestants n'accordent pas à leur clergé un rôle spécifique de prêtres. Les pasteurs sont des conseillers et des savants dont le rôle est de former les croyants, de leur indiquer la direction à suivre. Ils président le culte et administrent la Sainte-Cène mais, moyennant une officialisation par l'Église pour des raisons de bon ordre et de discipline, des laïcs peuvent parfaitement en faire autant, y compris la prédication moyennant formation théologique. C'est l'ensemble des croyants qui est investi de la prêtrise (doctrine dite du sacerdoce universel, fondée notamment sur des textes de l'Épître aux Hébreux). Dans l'Église catholique, le prêtre en prononçant les paroles de l'absolution au sein de la confession accorde effectivement le pardon de Dieu, le pasteur se borne à rappeler au cours de la liturgie la promesse de pardon acquise « à ceux qui se repentent et qui croient » ; le reste se passe directement entre le croyant et Dieu (exception : les anglicans utilisent le mot prêtre, sans toutefois y mettre le sens catholique).

    Comme explicité au paragraphe précédent, les protestants ne reconnaissent que deux sacrements (le baptême et l’eucharistie ou Sainte-Cène) contre sept chez les catholiques (le baptême, l'eucharistie, la confirmation, la réconciliation, le mariage, l'ordination et l'onction des malades). Certains de ces rites existent toutefois sur un mode mineur : la confirmation (qui se pratique environ deux ans plus tard que chez les catholiques lorsque l'enfant a développé son sens critique et sa personnalité), la confession des péchés (soit collective au cours du culte soit personnelle dans le secret de la prière, mais jamais auriculaire à la manière catholique ; les protestants n’ont donc pas de sacrement de réconciliation (le dialogue avec un prêtre) et le pasteur n'a pas le pouvoir de remettre les péchés, le mariage, l'ordination (des pasteurs luthériens) ou la reconnaissance des ministères (des pasteurs réformés) remplacent l'ordination des prêtres mais en sont très éloignées dans la forme comme dans le fondement théologique, la question de la prêtrise restant au fond la grande différence entre les conceptions catholiques et protestantes de l'Église.

    La question dite de la présence réelle de Jésus lors de la Cène est particulièrement embrouillée. Les protestants ne croient pas à la transsubstantiation, doctrine catholique qui affirme la transformation physique et matérielle des deux espèces de la communion en véritable chair et en véritable sang du Christ lors de l'eucharistie. La majorité des protestants croit à la présence réelle de Jésus de manière spirituelle lors de la Cène. Le fait que l'expression présence réelle — considérée comme un tant soit peu pléonastique — ne soit guère utilisée par les Protestants ne doit pas faire croire qu'ils réduisent la Cène à un symbole. Cette position existe toutefois également (depuis Zwingli) mais reste minoritaire. La communauté de Taizé avait trouvé une formulation qui convenait à l'ensemble des Églises chrétiennes, parlant d'un « mémorial sacrificiel ».

    Les concepts de purgatoire (lieu de souffrance auquel l'Homme accède après la mort pour se racheter et se purifier de ses péchés avant d'accéder au paradis), canonisation (pratique catholique, mais aussi orthodoxe, par laquelle un homme ou une femme est reconnu comme Saint ou Sainte) et d'indulgence (à l'époque il y avait possibilité pour un catholique de verser une somme d'argent au Pape en échange du pardon de ses péchés, aujourd'hui c'est surtout le pardon donné par le Pape pour les grandes fêtes, par exemple l'Indulgence Plénière de Noël, ou dans d'autres occasions) n'existent tout simplement pas. La notion de « saint », signifiant « mis à part », s'applique depuis Luther à tous les chrétiens puisque tous sont rachetés par Jésus-Christ et de ce fait sanctifiés. Il n'existe donc pas d'élite composée de chrétiens qui seraient exemplaires devant la communauté.

    L'excommunication (pratique par laquelle le Pape exclut quelqu'un de l'Église et de fait l'empêche temporairement ou définitivement de recevoir des sacrements) existe en principe également chez les protestants. Mutatis mutandis, elle serait prononcée soit par l'évêque (organisation de l'Église selon le système épiscopalien), soit par le conseil presbytéral (système presbytéro-synodal), mais elle est en général tombée en désuétude sauf chez certains évangéliques ; elle joue même un rôle de maintien de la cohésion des communautés Amish où l'excommunié est ipso facto mis au ban de la communauté au plan social.

    Les protestants ne donnent pas une place particulière à Marie. Ils ne croient pas à son Immaculée Conception, qui n'est pas un dogme du Protestantisme. Néanmoins, ils adhèrent à la naissance virginale de Jésus et Marie fait partie des témoins privilégiés au même titre que les disciples du Christ.

    Les protestants ne font pas appel à des intercesseurs comme Marie ou les Saints dans leurs prières. Selon eux le croyant est seul responsable devant Dieu et ne doit pas passer par des intermédiaires pour dialoguer avec Lui. Ils croient que Jésus est le seul intermédiaire entre Dieu le Père et eux-mêmes. Ils ne croient pas à l'utilité de la pratique catholique de la confession (voir plus haut le paragraphe sur la prêtrise.) Les pasteurs protestants ont le droit (voire le devoir) de se marier et les femmes exercent couramment le pastorat.

    Protestantisme et société

    Vie économique

    Max Weber a mis en évidence dans L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme la contribution unique du protestantisme à la création d'une culture favorable à la liberté d'entreprendre et au capitalisme, culture qui s'est à présent imposée à l'échelle mondiale. Weber met particulièrement en évidence le rôle des calvinistes et des puritains, caractérisés par un ascétisme qui mène à la thésaurisation donc à la formation de capital, et par une angoisse existentielle quant à leur élection et donc à leur salut : puisque selon la Bible il y a des élus et des réprouvés, ces protestants recherchaient partout, et notamment dans la réussite professionnelle, la confirmation de leur élection divine. Les activités industrielles, de négoce ou de banque menées par des protestants ont donc prospéré dans la durée. Des alliances réfléchies entre familles protestantes ont également permis de consolider et de diversifier ces activités économiques.

    Armée du salut

    L'Armée du salut naît en pleine révolution industrielle, à la fin du XIXe siècle. Elle est créée, en 1878, par le pasteur anglais William Booth, scandalisé par le spectacle des foules ouvrières qui s'entassent dans les quartiers pauvres de l'Est londonien (East End). Pour lui, le changement ne s'opère pas au niveau des masses mais en chaque individu (contrairement à l’idéologie de Karl Marx). Le progrès social, politique et économique doit découler d'une profonde transformation intérieure de l'homme, réconcilié avec lui-même par la puissance de l'Évangile. Mais William Booth sait qu'avant de parler à quelqu'un de religion, il faut pouvoir lui proposer des conditions de vie décentes sur terre. C'est l'origine de la devise devenue populaire : « Soup, soap, salvation » (Soupe, savon, salut).

    Églises et mouvements

    Au XXIe siècle, l'héritage protestant se vit à travers de nombreux mouvements, car le principe même du protestantisme se veut réformateur en permanence afin d'éradiquer le poids éventuel de la tradition. Ainsi, une multitude de mouvements, souvent proches, sont dénombrés.

    Dès le début, les Églises historiques multitudinistes sont organisées en plusieurs Églises en fonction des courants théologiques ou des circonstances historiques. Elles s'adressent dans le même mouvement à leurs membres et à la société (d'où le terme « multitude »). Il s'agit des Églises luthériennes, des Églises réformées (calvinistes ou zwingliennes) et de l'Église anglicane.

    En plus des luthériens, des réformés et des anglicans, la Réforme a connu très tôt un quatrième courant, non « magistériel », accusé par les autres de mettre à côté ou au-dessus de la Bible une illumination intérieure considérée comme subjective, et nommé par eux « illuminés » ((de) Schwärmer) ou « Anabaptistes » (parce que, ne reconnaissant qu'un baptême d'adultes, ils « rebaptisaient » ceux qui l'avaient été, enfants, ailleurs). Les tenants de cette Réforme radicale affirmaient, eux, que cette illumination intérieure était l'œuvre du Saint-Esprit. Sont les héritières directes de la partie pacifiste de ce courant les Assemblées mennonites, dont les Amish font partie. S'y rattachent spirituellement les Baptistes et autres groupes apparentés issus à diverses époques de l'anglicanisme, avec souvent une mise en valeur de la piété face au « monde ». Dans ce groupe, les Quakers occupent une place à part. Fondé en 1650 en Angleterre par George Fox, ce mouvement très ancré dans la culture anglo-saxonne se distingue des autres communautés issues du christianisme par l'absence de credo, de clergé et de hiérarchie. De nombreux Quakers ne ressentent pas leur foi comme entrant dans les catégories chrétiennes traditionnelles, bien que subsiste au sein du Quakerisme un large courant évangélique.

    Dans les siècles suivants, d'autres mouvements ont vu le jour à partir de « réveils » spirituels du XIXe siècle. Le principal, issu de la prédication de John Wesley, est le méthodisme. Conjuguant retour à la Bible, à la prière et à l'engagement social, il est le précurseur de mouvements socio-évangéliques tels l'Armée du salut, fondée par William Booth en Angleterre, à la fin du XIXe siècle. Refusant la prédestination, confessant la responsabilité de l'individu dans sa propre foi, il est aussi la source du pentecôtisme, né d'un Réveil plus récent. D'autres Églises indépendantes, privilégiant un aspect ou un autre de la foi ou de la pratique chrétienne, existent aussi : les Darbystes et autres « Assemblées de frères », les Adventistes du septième jour, etc. « Églises évangéliques » est le terme générique qui regroupe toutes ces dénominations. La plupart du temps, hormis dans le méthodisme classique, ce sont des « Églises de professants ou de confessants » et non « de multitude » : elles demandent un engagement et une profession de foi personnels à leurs membres et la plupart, de ce fait, ne baptisent que des adultes ou éventuellement des adolescents (elles sont « baptistes »). Certaines rebaptisent les chrétiens venus d'autres Églises, car elles ne reconnaissent que le baptême d'adultes fait par immersion. Ce terme s'applique aussi aux courants fondamentalistes d'origine nord-américaine.

    Personnalités

    Cette section contient une liste de pasteurs, de théologiens et de personnalités impliquées dans la pensée protestante.

    • Pierre Valdo (à l'origine de l'Église Vaudoise) : 1140-1206 XIIe siècle
    • John Wyclif : 1320-84
    • Jan Hus : 1369-1415
    • Martin Luther : 1483-1546
    • Ulrich Zwingli : 1484-1531
    • Thomas Cromwell : 1485-1540
    • Guillaume Farel : 1489-1565
    • Martin Bucer : (1491-1551)
    • Menno Simons (1496–1561)
    • Philippe Melanchthon : 1497-1560
    • Andreas Cellarius (théologien) : 1503-62
    • David Joris : 1501-56
    • Heinrich Bullinger : 1504-75
    • Jean Calvin : 1509-64
    • Henri VIII d'Angleterre : 1509-47
    • Thomas Cranmer :1489-1556
    • John Knox : 1513-72
    • Sébastien Castellion : 1515-63
    • Théodore de Bèze : 1519-1605
    • Guy de Brès : 1522-67
    • John Napier : 1550-1617
    • Philippe_Duplessis-Mornay : 1549-1623
    • Henri IV : 1553-1610
    • Catherine de Parthenay : 1554-1651
    • Moïse Amyraut : 1596-1664
    • John Dury : 1600-1680
    • Johann Bach : 1604-1673
    • Henry Xhrouet, dit Chrouet : 1621-91
    • George Fox : 1624–1691
    • David Martin : 1639-1721
    • Jean-Alphonse Turretin : 1671-1737
    • Jean-Frédéric Ostervald : 1663-1747
    • Elie Marion : 1678-1713
    • John Wesley : 1703-1791
    • Paul Rabaut : 1718-94
    • Adam Smith : 1723-1790
    • Emmanuel Kant : 1724–1804
    • Jean-Frédéric Oberlin : 1740-1826
    • Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne : 1743-93
    • François-Antoine de Boissy d'Anglas : 1756-1826
    • Jean de Visme : 1760-1819
    • Frédéric Schleiermacher : 1768–1834
    • Alexandre Vinet : 1797-1847
    • John Nelson Darby : 1800–82
    • Guillaume Adam de Félice : 1803-71
    • John Bost : 1817–81
    • Henri Dunant : 1828-91
    • Adolf von Harnack : 1851–1930
    • Max Weber : 1864-1920
    • Albert Schweitzer : 1875-1965
    • Marc Boegner : 1881-1970
    • Karl Barth : 1886-1968
    • Paul Tillich : 1886-1965
    • Emil Brunner : 1889–1966
    • Suzanne de Dietrich : 1891-1981
    • André Trocmé : 1901-1971
    • Dietrich Bonhoeffer : 1906-1945
    • Madeleine Barot : 1909-95
    • Jacques Ellul : 1912-94
    • Paul Ricœur : 1913-2005
    • Billy Graham : 1918-
    • Martin Luther King : 1929-68
    • Jean Baubérot : 1941-
    • Jean-Arnold de Clermont : 1941-

    Fêtes et rassemblements

    Dans les Églises historiques européennes, en plus des fêtes chrétiennes (référées à Jésus-Christ selon la Bible), on célèbre parfois :

    • Le Nouvel An, le 1er janvier ;
    • La fête de la récolte, le premier dimanche d'octobre (dans les milieux luthériens influencés par l'Europe du nord ou aux États-Unis) ;
    • La fête de la Réformation, le 31 octobre ou, à défaut, le dimanche précédent, commémorant l'affichage des 95 thèses de Luther ;
    • L'Assemblée du Désert au Musée du Désert, le premier dimanche de septembre, à Mialet dans les Cévennes, en souvenir des Camisards ; beaucoup de protestants français et issus des pays du Refuge s'y rendent généralement.

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