• Premier vendredi d'octobre

     
     

    Considération pour le premier vendredi d'octobre

    Humilité du sacré cœur de Jésus

     

    Les gifs animés de Jésus page4

     

     

    Si nous voulons élever bien haut l'édifice de notre sainteté, nous devons lui donner l'humilité pour base et creuser ses fondements bien avant dans la connaissance de notre néant et de notre bassesse. L'humilité, voilà le secret de la perfection, le cachet que nous devons appliquer à toutes nos vertus si nous voulons qu'elles soient agréables à Dieu, le piédestal sur lequel nous devons monter si nous voulons que l'œil du Seigneur s'abaisse sur notre petitesse, la clef enfin qui seule pourra nous ouvrir le séjour de gloire d'où l'orgueil est à jamais banni.

    Mais si l'humilité est la plus indispensable des vertus, elle est encore la plus difficile, celle dont la pratique trouve le plus d'opposition dans notre cœur. L'orgueil est inné en nous ; il croît, se développe avec nous, et ne s'éteint qu'avec notre dernier soupir. L'homme éprouve un penchant presque invincible, et que la grâce seule peut lui faire surmonter, à s'élever, à se complaire dans sa propre excellence, à se préférer à autrui, et il éprouve une répugnance non moins grande pour tout ce qui l'abaisse à ses propres yeux et à ceux des autres, pour tout ce qui froisse son orgueil ; il s'estime, et il veut être estimé ; il se loue au fond de son âme, et il souhaite que la langue de ses frères proclame hautement les louanges qu'il se donne en secret. C'est ce penchant à nous élever, cette répugnance à nous abaisser, que nous devons combattre par l'humilité. Mais qu'est-ce que l'humilité ?

    L'humilité, c'est d'abord la connaissance de nous-mêmes, de notre néant, de notre faiblesse, de nos défauts, de nos imperfections. Pour être humbles, il n'est pas nécessaire de méconnaître les dons de Dieu et les bonnes

    qualités qu'il a mises en nous ; l'humilité n'est pas l'ingratitude, et nous serions ingrats en niant les bienfaits du Seigneur. Mais nous devons reconnaître que tout ce qu'il y a de bon en nous, nous l'avons reçu de lui, nous le tenons de sa libéralité, et, bien loin de nous en glorifier, nous devons en faire remonter à lui seul toute la gloire. Pour être humbles, il faut reconnaître encore que, si nous n'avons rien que nous n'ayons reçu, nous ne pouvons rien encore sans la grâce ; que, dépourvus de son secours, nous sommes la faiblesse et l'impuissance mêmes, que nous ne pouvons ni faire le bien ni résister au mal.

    Mais l'humilité ne consiste pas seulement à avoir de bas sentiments de soi-même ; pour qu'elle soit réelle, il faut encore que nous consentions à ce que les autres nous jugent comme nous nous jugeons et pensent de nous ce que nous en pensons nous-mêmes. Mais, hélas ! c'est là l'écueil où vient se briser notre courage. Il est aisé de reconnaître ses défauts, ses imperfections, d'en convenir et de les avouer soi-même, mais il n'est pas aussi facile de se les entendre sans émotion reprocher par autrui. Il est facile encore d'être humble dans ses paroles, mais il ne l'est pas autant de l'être en réalité. On avoue souvent qu'on est digne du mépris de Dieu et des hommes, et on veut jouir de l'estime de tous ; et, tout en faisant cet aveu, on s'attend à des respects, à des déférences auxquelles intérieurement on croit avoir des droits, on s'irrite d'un manque d'égards, et l'amour-propre blessé ne sait pas pardonner la plus légère insulte. Cependant l'âme sincèrement humble supporte non seulement le mépris, mais elle aime et recherche l'humiliation, elle en fait ses délices et la préfère aux honneurs, aux applaudissements . aux louanges que le monde pourrait lui donner.

    Jésus, notre divin Maître, connaissait bien notre cœur, il savait combien l'humilité y trouverait d'obstacles, lorsqu'il nous disait d'apprendre de lui cette science céleste, cette sublime vertu. Il ne nous a pas dit : Apprenez de moi à être humbles dans vos paroles, dans vos actions, mais : Soyez humbles de cœur. Aussi, avant de nous faire cette leçon, l'exemple avait précédé le précepte : pour nous aplanir les difficultés de cette vertu, il l'a pratiquée le premier. L'humilité a été la vertu favorite de son cœur adorable ; il a embrassé volontairement les humiliations, les opprobres, et sa vie tout entière a été la condamnation de notre orgueil, un acte continuel d'anéantissement et d'humilité.

    Il s'est humilié dans l'incarnation jusqu'à l'anéantissement, en se dépouillant de sa grandeur et de sa gloire pour se revêtir de notre humanité et de nos faiblesses. Il aurait pu, s'il l'avait voulu, unir sa divinité au corps d'un homme parfait et dans la force de l'âge, sans s'assujettir aux infirmités de l'enfance, sans qu'il eût besoin de passer par les différents âges de la vie humaine pour atteindre la force et l'accroissement d'un homme fait. Au lieu de cela, il demeure, comme un enfant ordinaire, enfermé neuf mois dans le sein de sa Mère ; il naît petit et faible comme le dernier de nous ; il a besoin du lait et des soins de sa Mère ; et celui qui est la force de Dieu, dont la main puissante soutient l'univers, paraît à nos yeux sans force, sans puissance ; il est faible, débile ; il ne peut faire un pas ; il cache sa sagesse, sa science divine, et la bouche du Verbe reste longtemps muette. Il est dépendant, petit ; son enfance réclame les mêmes soins, la même sollicitude qu'a réclamée la nôtre. Quelle humiliation pour un Dieu !...

    L'orgueil de l'homme se nourrit de l'éclat des richesses, d'un nom illustre, d'une haute origine ; Jésus vient au monde pour combattre l'orgueil, pour détruire ces vains préjugés qui flattent notre vanité et entretiennent notre amour-propre, et, pour y réussir, il nous instruit plus encore par ses exemples que par ses leçons. Il sait que de tout temps la pauvreté a été un opprobre aux yeux du monde ; aussi il l'embrasse, il veut ne rien posséder sur la terre, il naît, il vit, il meurt dans le dénuement le plus absolu. Le sang des rois de Juda coule dans ses veines, mais les descendants de David n'occupent plus le trône d'Israël ; leur grandeur s'est éclipsée sous le passage des siècles. Confondus avec le peuple, dont ils partagent les obscurs travaux et la vie laborieuse, les parents de Jésus ne jouissent d'aucune considération dans le monde ; on s'informe peu de la race à laquelle ils appartiennent ; on les voit pauvres, on ne songe qu'à ce qu'ils sont sans s'inquiéter de ce que furent leurs pères. Aussi, lorsque Jésus commence ses prédications, qu'il laisse paraître les premiers rayons de cette lumière divine qui devait éclairer l'univers, les habitants de Nazareth se demandaient avec surprise et avec une sorte de mépris, en désignant du doigt le jeune prophète dont l'éloquence ravissait tous les cœurs : N'est-ce pas là le fils de l'artisan Joseph, lui-même artisan comme son père ? Ils ne disaient pas : N'est-ce pas là l'héritier de nos rois, le fils de David ? Donc ils avaient oublié son origine, et pendant trente années Jésus vécut ignoré au milieu de ses concitoyens, ne jouissant d'autre considération que de celle que lui attiraient sa douceur et ses vertus.

     

    Au jour de sa circoncision, le Fils de l'homme avait pris le caractère du péché et la figure du pécheur. Depuis ce temps il ne se considérait plus que comme le pénitent universel ; il se présentait à son Père chargé des crimes de l'univers et portait devant son infinie sainteté l'humiliation et la confusion que seuls nous aurions dû porter.

     

    Il commence sa vie publique par un acte éclatant d'humilité. Il se mêle à la foule des pécheurs, il se confond avec eux et vient humblement demander à son précurseur le baptême de la pénitence ; puis, lorsque le ciel s'ouvre sur sa tête et que la voix du Père exalte hautement celui qui s'abaisse aux yeux de tous, Jésus se dérobe aux regards qui s'attachent sur lui et fuit au désert pour éviter les louanges et les applaudissements qu'il ne pouvait manquer de recevoir.

    Pendant ses courses évangéliques, il ne cherche pas à s'appuyer sur les grands et les riches de la terre, il ne recherche ni leur société ni leur protection, il n'a que faire de leur grandeur et de leur or, il ne les choisit pas pour le seconder dans l'établissement de la religion qu'il vient fonder, il n'en veut point pour l'aider dans la publication de son Évangile ; non, non, il est venu confondre l'orgueil du monde par la folie de la croix, il fondera son royaume par l'humilité, il gagnera son trône de gloire par les abaissements et les humiliations, et la plus grande œuvre que l'univers ait vu s'accomplir s'accomplira par des moyens tout opposés à ceux qu'aurait employés la sagesse humaine. Le Sauveur choisit pour ses coopérateurs des pauvres et des petits, des hommes sans lettres, sans science, sans talents. Ceux qu'il appelle à lui et qui doivent un jour porter son nom jusqu'aux extrémités de la terre, sont de pauvres pêcheurs qui ne savent que jeter leurs filets et diriger leurs barques, des gens simples, bons, mais grossiers et ignorants. Voilà les compagnons qu'il se choisit, avec lesquels il passe les trois dernières années de sa vie. Il vit avec eux comme un ami avec ses amis, comme un père avec ses enfants ; il supporte leurs défauts, leur grossièreté, avec une admirable patience ; il les instruit avec une inaltérable douceur. Car la douceur est fille de l'humilité ; un cœur sincèrement humble ne saurait manquer d'être doux, et Jésus est le maître et le modèle de la douceur comme il est celui de l'humilité. 

    Presque toutes les leçons que le divin Maître fait à ses disciples roulent ordinairement sur l'humilité. Que celui d'entre vous, leur dit-il, qui veut être le plus grand dans le royaume des cieux, se fasse ici-bas le serviteur de tous. Si vous êtes invités aux noces, leur dit-il encore, choisissez la dernière place. Et ailleurs : Celui qui s'élève sera abaissé, celui qui s'abaisse sera élevé. Et, un jour que les apôtres disputaient entre eux sur la primauté, Jésus fit venir un petit enfant ; il le prit sur ses genoux, le baisa, et, le leur montrant, il leur dit encore : Si vous ne devenez semblables à ce petit enfant, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux. Mais pourquoi le Sauveur propose-t-il un enfant pour modèle à ses apôtres ? Parce que l'enfance n'a ni ambition ni orgueil, qu'elle est humble, obéissante, et qu'elle supporte simplement qu'on la reprenne et qu'on corrige ses défauts.

     

    Je serais interminable si je voulais citer tous les préceptes sur l'humilité qui sont renfermés dans l'Évangile. Tantôt le Sauveur vante à ses disciples les charmes et les avantages de cette vertu ; d'autres fois il les prémunit contre l'orgueil et la vaine gloire, en les avertissant de ne pas faire leurs bonnes œuvres pour être vus des hommes et pour s'attirer leurs louanges. Il leur recommande de se parfumer la tête lorsqu'ils jeûnent, de former la porte de leur cabinet et de se retirer dans le secret lorsqu'ils veulent prier, et de ne pas faire sonner devant eux la trompette de l'ostentation lorsqu'ils accomplissent le précepte de l'aumône, mais de ne chercher à plaire qu'à celui qui voit le fond des cœurs et qui doit être le rémunérateur de leurs bonnes œuvres.

    Toujours Jésus joint l'exemple au précepte. Loin de rechercher l'estime des hommes, il la fuit ; il se dérobe à leurs louanges, il les évite ; il supporte patiemment les injures que la malice de ses ennemis lui adresse. Souvent on le traite de Samaritain, de séducteur ; on attribue ses miracles à la puissance du prince des ténèbres, et il n'impose pas silence à ses calomniateurs ; mais lorsque les peuples ravis proclament ses bienfaits et sa puissance, lorsque les démons eux-mêmes publient sa divinité, il leur commande avec autorité de se taire. Puis, lorsque la reconnaissance de ceux en faveur desquels il vient d'opérer quelque éclatant prodige veut élever la voix pour le bénir, il leur défend de révéler le secret de sa bienfaisance et de sa bonté. Enfin, ce même Jésus, que nous avons vu aller au devant des fers que lui envoyait l'ingrate Jérusalem, se cachait et se dérobait à la reconnaissance du peuple, qui le cherchait pour lui offrir le trône d'Israël et le sceptre de David. Ah ! c'est qu'il ne voulait régner ici-bas que par la croix; c'était le seul sceptre que sa main voulait porter sur la terre, et son cœur adorable n'ambitionnait d'autre couronne que la couronne d'ignominie et d'épines dont la synagogue devait ceindre son front au jour où il recevrait ce baptême sanglant qu'il désirait avec ardeur depuis le premier instant de sa vie.

     

    Ce fut surtout au temps de sa passion que le cœur de notre bon Maître fut rassasié non seulement de douleurs, mais encore d'opprobres et d'humiliations. Les prodiges que Jésus opérait depuis trois ans, les bienfaits, dont il marquait chacun de ses pas lui avaient attiré de nombreux admirateurs, a voix de la renommée avait porté au loin son nom et sa réputation ; la Judée tout entière retentissait du bruit de ses louanges, et les peuples ravis le saluaient des noms d'envoyé du Très-Haut, de fils de David, de libérateur d'Israël, et le reconnaissaient pour le Messie promis à leurs pères. Mais, au jour de sa passion, toute cette gloire s'éclipse sous le nuage d'humiliation dont il est couvert. C'est le moment de la pâque, où Jérusalem est encombrée de la foule des étrangers qui y affluent de toute part, que les ennemis de Jésus choisissent pour se saisir de lui et le traîner devant leurs tribunaux, lié et garrotté comme un malfaiteur et un séducteur. 

    Que durent penser du Sauveur tous ces étrangers qui ne le connaissaient que sur ce qu'ils avaient ouï dire de lui, lorsqu'ils surent que les prêtres et les anciens de la nation l'avaient condamné et jugé digne de mort, qu'ils l'avaient abandonné à l'insolence d'une troupe de soldats et de valets ; qui, joignant l'insulte et le mépris à la cruauté, s'étaient portés contre lui aux derniers excès, et n'avaient pas craint de couvrir de soufflets et de crachats cette face adorable dont la beauté et la majesté inspiraient à tous le respect et l'amour ; lorsqu'ils virent encore qu'il .avait été traité comme un insensé à la cour d'Hérode ; lorsqu'ils virent Pilate, qui d'abord s'était dé claré pour lui, le condamner au supplice honteux réservé aux esclaves, puis le mettre en parallèle avec un voleur, un homicide ; lorsqu'ils entendirent le peuple demander l'élargissement de Barrabbas et la mort de Jésus, et Pilate prononcer enfin cette sentence qui le condamnait au supplice de la croix, supplice réputé infâme parmi les Juifs ? Ah ! sans doute ils durent se dire : Cet homme n'était qu'un imposteur, la réputation qu'il s'était acquise n'était due qu'à des prestiges ; il n'a plus ni puissance ni science, puisqu'il ne trouve pas le moyen de se délivrer de la mort, puisqu'il reste sans voix pour repousser les accusations dont on l'accable. D'ailleurs, s'il était tel qu'on nous l'avait peint, les pontifes, les sages d'Israël s'élèveraient-ils contre lui ? le peuple même serait-il assez ingrat pour ne pas prendre sa défense, si, comme on nous le disait, il l'avait comblé de bienfaits ? Et ceux même qui avaient été témoins des miracles de Jésus les attribuaient à la puissance des ténèbres et disaient : Cet homme nous trompait, il abusait de notre crédulité, de notre bonne foi ; ses artifices sont découverts, il mérite la mort. Quelle humiliation ! quel opprobre !... Nous tenons tous à notre réputation : jugeons d'après cela combien il fut pénible et humiliant pour le Sauveur de voir la sienne ainsi détruite et anéantie. 

     

    Puis enfin il marche à la mort, et, pour rendre cette mort plus ignominieuse, plus infâme, on lui adjoint deux criminels, et on le fait marcher au milieu d'eux comme le plus coupable. La foule l'entoure et le suit en l'accablant d'insultes, en semant sous ses pas la dérision et le mépris ; et quand il a atteint le sommet du Calvaire, quand la croix sanglante présente à tous les yeux la Victime de l'univers, des cris de rage, de nouveaux outrages saluent encore le Fils de l'homme. Le cœur plein de haine, les ennemis de Jésus passent en branlant la tête devant l'autel de la rédemption et disent avec ironie à la Victime sainte : Montre maintenant ta puissance, descends de ta croix et sauve-toi toi-même, puisque tu voulais sauver les autres.

    A tant d'outrages Jésus n'oppose que le silence et la douceur ; sa bouche se tait, et son cœur savoure en silence les humiliations dont on l'abreuve. Le ciel se tait aussi. La voix du Père ne se fait pas entendre pour prendre la défense de son Fils bien-aimé. Les anges ne paraissent pas sur le sommet du Golgotha, comme ils parurent au jour de sa naissance dans les plaines de Bethléem pour annoncer sa gloire et la paix qu'il apportait aux hommes et qu'il signe maintenant avec son sang. Tout enfin semble conspirer pour que l'humiliation soit plus entière, l'anéantissement plus parfait, et ce n'est que lorsque Jésus expire que la terre semble se souvenir que celui dont elle vient de boire le sang était son Créateur et son Dieu. Alors la consternation, le bouleversement de la nature entière, le soleil qui se couvre d'un voile de deuil et refuse d'éclairer cet horrible forfait, tout glorifie en cet instant le Fils du Très-Haut et prouve que ses abaissements ont été volontaires.

    Si la porte du ciel est étroite, s'il faut se baisser, se rapetisser pour y entrer, pouvons-nous nous en plaindre, puisque cette porte ne s'est pas exhaussée pour livrer passage à celui qui s'est fait notre chef et notre modèle ? Il a parcouru le premier la voie difficile qu'il nous ordonne de parcourir après lui : cette voie est celle des humiliations et des souffrances ; si elle nous paraît pénible, prenons courage, sa grâce nous l'adoucira, nous retrouverons partout ses pas, nous l'y retrouverons lui-même, il nous tendra la main pour assurer notre marche, il nous offrira son appui et son cœur. Étudions sans cesse ce livre divin plus qu'aucun autre, il nous apprendra la science de l'humilité, il nous enseignera à supporter sans murmure et avec courage les humiliations que la Providence nous ménage, puis enfin à les aimer, à les rechercher, à en faire, à son exemple, nos délices et notre gloire. Ainsi soit-il.

     

    Les gifs animés de Jésus Page 7

     

     PRÉPARATION À LA COMMUNION
    Pour le premier vendredi d'octobre.  

    Qui êtes-vous, ô mon Dieu, et qui suis-je ? Vous êtes la sainteté, la pureté, la bonté par essence ; je ne suis que misère et corruption. Vous êtes celui qui est ; je ne suis rien. Vous êtes la vie ; je suis sujette à la mort. Je suis un instrument de péché, un enfant de colère, une créature inutile pour le bien et malheureusement puissante pour le mal. Ma mère m'a conçue dans le péché, et je suis née votre ennemie. Votre miséricorde, il est vrai, a lavé dans les eaux du baptême la souillure de mon origine ; mais, entraînée par un funeste penchant au mal, combien de fois mon âme ne s'est-elle pas souillée de nouveau ? combien de fois n'ai-je pas violé votre loi et suivi les penchants déréglés de mon cœur ? Et puis, pourquoi ne vous le dirais-je pas, ô Jésus, puisque vous savez toutes choses ? je suis un abîme de misère en même temps qu'un abîme d'amour-propre et d'orgueil. Il semble que ces deux choses devraient être incompatibles, et cependant, doublement aveugle, je ne vois pas les défauts qui sont en moi, et j'y vois des vertus qui n'y sont pas. Si votre grâce a jeté dans mon cœur le germe de quelques vertus, l'amour-propre s'y est attaché comme un ver rongeur et les a empêchées de croître et de se développer ; il grandit à mes yeux mes prétendus mérites et me fait sans cesse oublier que rien ne m'appartient en propre et que je ne puis me glorifier que de mes infirmités.

     

    Lorsque le premier de vos anges se replia complaisamment sur lui-même, il était du moins tout éclatant de lumière et riche de perfections ; mais pour moi, Seigneur, je ne suis rien, ou, si je suis quelque chose, ce n'est que dans la fausse estime que j'ai de moi-même. Hélas ! si les étoiles du ciel ne sont pas sans tache en votre présence, si les colonnes du firmament tremblent devant vous, si les séraphins les plus élevés se couvrent de leurs ailes, éblouis par l'éclat de votre majesté, comment oser m'approcher de vous et vous recevoir dans mon cœur ? Je tremble lorsque j'entends votre saint précurseur, lui qui fut sanctifié avant sa naissance, proclamer cependant qu'il n'est pas digne de tomber à vos pieds pour délier les cordons de vos souliers, et j'oserais m'approcher de vous, moi qui suis si éloignée de la sainteté de celui qui vous préparait les voies et que vous appeliez votre ange ?

    Ah ! si, dans le temps de la loi ancienne, il fallait être pur et sanctifié pour manger les pains exposés sur les tables de votre temple, pains qui n'étaient que la figure de l'auguste mystère que je vais recevoir ; si vous aviez commandé que l'on mangeât l'agneau pascal avec du pain sans levain et des laitues amères, comment manger le véritable Agneau pascal sans cette préparation ? Suis-je, ô Jésus, un pain azyme, c'est-à-dire sans aucun levain de malice ? Ai-je en moi les sentiments de contrition indiqués par des laitues amères ? Mon cœur est-il pur devant vous ? Hélas ! je n'ose me rendre ce consolant témoignage ; aussi quelle n'est pas ma crainte en me voyant si éloignée des dispositions saintes qu'exige la participation d'un si redoutable mystère ! O vous, aux yeux de qui tous les replis de mon âme sont à découvert, si vous voyez l'extrême misère de mon cœur, vous n'y voyez pas du moins l'intention de vous trahir. Vous trahir, ô Jésus ! ce mot seul me fait horreur. Vous donner l'hypocrite baiser de Judas ! jamais ! jamais ! Vous ne le permettrez pas, aimable Sauveur ; ce malheur serait pour moi le plus affreux de tous.

    Mais ne demandez-vous de moi, ô mon Dieu, que le respect et la crainte ? Non, non, il est un sentiment plus doux, celui de la confiance, que vous me suggérez vous-même dans l'Évangile, et j'espère que ce ne sera pas vous déplaire que d'y livrer mon cœur.

    Pourquoi donc es-tu triste, ô mon âme, se demandait le prophète, et pourquoi me troubles-tu ? Que n'espères-tu en Dieu, et que ne lui demandes-tu qu'il répande sur toi sa lumière et sa vérité pour te conduire et t'emmener jusqu'à sa montagne sainte et à ses sacrés tabernacles ? Oui, Seigneur, puisque vous daignez m'inviter avec tant d'amour, je ne craindrai pas de m'approcher de l'autel de mon Dieu, du Dieu qui si souvent a réjoui ma jeunesse. Quand le Tentateur voudra m'effrayer par le souvenir de mes iniquités, je me rappellerai cette parole si consolante : Je ne suis pas venu chercher les justes, mais les pécheurs. Touchée de la bonté avec laquelle vous les appelez ces pécheurs, je viens à vous, ô Jésus, avec toutes mes misères, toutes mes imperfections, toutes mes faiblesses, toutes mes iniquités ; je viens comme le pauvre malade au médecin pour être guérie, comme l'homme affamé va à la table où sont préparés les mets qui peuvent apaiser sa faim. Si ma présomption est trop grande, ô aimable Sauveur, pourquoi l'avez-vous autorisée par un excès d'amour ? Si vous vouliez me repousser, il ne fallait pas accueillir avec tant de compassion la pécheresse qui vint pleurer à vos pieds et les oindre de parfums précieux. En la recevant sans indignation, en prenant sa défense contre son superbe accusateur, en louant son action et répondant au langage si pressant de ses larmes par ces mots : Beaucoup de péchés vous sont remis parce que vous avez beaucoup aimé, vous encouragez mon repentir et vous réveillez ma confiance. Il est vrai, Seigneur, qu'ayant peut-être égalé cette femme en iniquités, ma douleur est loin d'être aussi vive, aussi profonde que la sienne ; mais n'est-ce pas là une raison de montrer votre miséricorde avec d'autant plus d'éclat que je suis plus indigne d'en être l'objet ?

     

    Sang divin de Jésus, larmes précieuses qui avez coulé avec tant d'abondance au jardin des Olives et au Calvaire, tombez sur mon cœur afin de le purifier et d'en amollir la dureté ; que je sente l'effet de cette vertu qui sortait de vous et guérissait les malades ; qu'elle s'étende sur moi cette main compatissante qui purifiait les lépreux, éclairait les aveugles, ouvrait l'oreille des sourds et tirait les morts du sommeil de la tombe. Car à qui aurai-je recours, si ce n'est à vous, mon Dieu, qui êtes aussi miséricordieux pour vouloir notre salut que puissant pour le donner ? Ah ! j'espère en vous, Seigneur, en vous seul ; cette espérance est au fond de mon cœur, et il me semble entendre cette consolante parole : Ma fille, ayez confiance, votre foi vous a sauvée.

     

    O vous, Vierge sainte, qui fûtes la plus pure, la plus sainte et pourtant la plus humble des créatures, vous à qui le Seigneur put confier les plus précieux trésors de sa grâce sans craindre que vous lui en dérobassiez la gloire, priez pour moi qui suis si misérable et si pleine d'orgueil. Obtenez-moi la grâce de me connaître moi-même, afin que cette science, qui m'est si nécessaire, m'apprenne bien cette importante vérité , que je n'ai rien, que je ne puis rien de moi-même, et que Dieu seul peut élever ma bassesse et enrichir ma pauvreté.

    Ainsi soit-il.

     

    Les gifs animés de Jésus Page 7

     

    ACTION DE GRÂCES.

    C'est maintenant, Seigneur, que je comprends véritablement le néant de mon être, la profondeur de ma misère, l'intervalle immense qui sépare votre grandeur de ma bassesse !... Vous l'avez franchi cet intervalle, ô mon Dieu ; vous vous êtes abaissé pour descendre jusqu'à moi, et c'est à la lumière de votre divinité que je comprends ce que vous êtes et ce que je suis ! Je vous adore, grandeur anéantie, sainteté, puissance, immensité de mon Dieu, qui habitez en moi ! Quoi! Seigneur, le ciel est indigne de vous, et mon cœur est votre demeure ! L'éternité est votre durée, et vous ne dédaignez pas de vous donner tout entier à cet être d'un jour, qui n'était pas hier, et que le soleil de demain ne trouvera plus au nombre des vivants ! Vous êtes immuable, et vous vous unissez à une créature faible, changeante, qui n'a de stables que son inconstance et sa fragilité ! Vous êtes saint, et vous vous donnez à moi qui ne suis qu'un composé de misères, de faiblesses et d'imperfections !

     

    Ah ! ma raison s'abîme devant ce mystère de miséricorde et d'amour, elle croit et adore ce qu'elle ne peut comprendre, et cette foi devient mon bonheur et ma gloire !

    O doux, ô bon, ô bien-aimé Sauveur, vous que je trouve plus délicieux que le miel, plus pur, plus éclatant de blancheur que le lis, plus suave que les parfums les plus exquis, plus désirable que tous les trésors de la terre ; vous enfin qui m'êtes toutes choses, je voudrais vous louer, et je ne trouve pas de paroles qui puissent vous redire ma reconnaissance et mon amour. Je voudrais vous parler comme vous parlent vos anges, mais, hélas ! je n'ai ni leurs voix ni leurs cœurs. Mais, parce qu'il ne m'est pas encore donné de me mêler à leurs ravissants cantiques, faut-il me condamner au silence, et ma langue doit-elle cesser de vous bénir et de célébrer votre miséricorde parce que je ne puis les célébrer d'une manière digne de vous ? Non, non, Seigneur, je ne me tairai pas, car je sais que vous prêtez l'oreille à la voix du pauvre, que vous déliez la langue des muets et tirez votre louange de la bouche même des enfants. Permettez-moi donc de rompre le silence pour annoncer les incompréhensibles mystères de votre sagesse et de votre amour.

    Mais, hélas! Seigneur, quelle perplexité est la mienne ! Impuissante à me taire, je le suis plus encore à parler. Tout ce que mon esprit me présente, tout ce que mon cœur me suggère, je le rejette comme indigne de vous ; rien ne répond au sentiment indéfinissable qui domine mon âme. O vous qui sondez les reins et les cœurs et à qui rien n'est caché, je n'ai qu'un mot au fond du cœur et sur les lèvres, et ce mot va résumer tout ce que je voudrais vous dire : mon Dieu, vous savez que je vous aime. Oui, je vous aime plus que le ciel, car le ciel n'est rien sans vous ; je vous aime plus que la terre, plus que ses biens, qui sont faux, fragiles et incapables de donner le bonheur, tandis que vous, Seigneur, vous rendez heureux tous ceux qui vous possèdent.

    Que vous êtes bon, ô mon Jésus ! Vous êtes la bonté et la miséricorde mêmes. Je n'osais m'approcher de vous, et, pénétrée du sentiment de mon indignité, je disais du fond de mon cœur : Seigneur, je ne suis pas digne que vous entriez en moi ; mais à peine l'avais-je prononcé ce mot, que vous avez répondu, dans l'ardeur qui vous pressait : J'irai et je vous guérirai, et vous êtes venu. Mais, hélas ! Seigneur, qu'avez-vous trouvé dans ce cœur ? Que de plaies ne vous offre-t-il pas à guérir, que de blessures à cicatriser ! Ah ! pour l'honneur de votre nom, faites disparaître en moi tout ce qui vous y déplaît et mettez-y tout ce qui peut vous plaire.

    Mais, je le sens, ô mon Dieu, c'est trop m'occuper de moi-même, et les heureux instants pendant lesquels je vous possède sont trop rapides pour que je ne cherche pas à me perdre de vue, pour me livrer tout entière à vous, ô le Bien-Aimé de mon cœur ! Si telle est la force de l'amour parmi les hommes, qu'il soit impossible à l'épouse de vivre loin de son époux, pourrai-je vivre sans vous, ô divin Époux de mon âme ? Les plaies que vous avez reçues pour mon amour, loin de vous défigurer à mes yeux, prêtent un nouveau charme à votre incomparable beauté ; je n'ai point horreur du sang qui vous couvre, et je veux le faire servir à cimenter l'alliance qui doit m'unir éternellement à vous. Je ne refuse pas pour dot la croix que vous m'offrez, car je sais qu'elle est la source de la grâce et de la gloire. Ce que je désire en ce moment, c'est qu'il me soit permis d'entrer dans votre cœur, ô mon Jésus, et de dire en m'y établissant : C'est ici le lieu de mon repos, c'est là que j'habiterai, puisque je l'ai choisi. Et toutefois, Seigneur, si je désire me retirer dans l'asile de votre cœur, ainsi que la colombe se réfugie dans le trou de la pierre, ce n'est pas pour y chercher ce qu'il n'est donné à aucun homme de trouver sur la terre, le calme, le repos et le bonheur parfait, réservés pour le ciel. L'ouverture de votre cœur étant une plaie sanglante, je ne puis y pénétrer sans me rappeler aussitôt que l'amour exige des sacrifices et des combats. Ce ne sera donc pas, ô mon Dieu, en répétant dans une effusion de joie : Seigneur! Seigneur ! que je pourrai me rendre le consolant témoignage que je vous aime ; mais je pourrai me le rendre avec assurance si je suis humble, patiente, résignée et disposée à tout sacrifier au premier signe de votre volonté. 

    Je saurai que je vous aime si je surmonte la colère, la volupté, l'amour de moi-même, si j'attache à votre croix les membres du vieil homme pour les crucifier et les faire mourir avec vous. Tout cela est difficile, ô mon Dieu ; mais y a-t-il quelque chose d'impossible à l'amour ? Donnez-moi donc d'aimer, afin que je puisse dire, en comptant sur votre grâce : Quand il me faudrait mourir avec vous, je ne vous abandonnerai pas.

    O Marie, ma tendre Mère, modèle du plus parfait amour, vous qui sûtes aimer et prouver votre amour au milieu des plus cruelles épreuves, obtenez-moi cet amour courageux qui comprend la science sublime de la croix, qui vit de souffrances, de dévouements et de sacrifices, et qui seul obtient la couronne promise à la fidélité et au courage.

    Ainsi soit-il.

     

    Les gifs animés de Jésus Page 7

     

    VISITE AU SACRÉ CŒUR DE JÉSUS

    Humilié dans le sacrement de l'Eucharistie.

    En entrant dans ce temple, ne puis-je pas m'écrier, en pensant à la majesté, à la grandeur de celui qui y réside : C'est ici la porte du ciel, la maison du Seigneur ? Pénétrée de respect et de crainte au souvenir de votre sainteté, de votre puissance et de votre gloire, ô mon Dieu, je me prosterne et je vous adore dans le silence du recueillement et de l'amour. Mais lorsque je relève mon front longtemps incliné devant vous et que mes yeux se portent sur l'autel où vous résidez, sur ce tabernacle où l'on vous retient captif, un sentiment nouveau s'empare de mon âme ; saisie d'admiration et de reconnaissance, ma langue devient muette, et je me dis : Oui, c'est bien là le trône du Dieu qui enseigna l'humilité, qui vécut parmi nous pauvre, humble et caché.

    Que vos humiliations sont profondes dans cet adorable mystère, ô mon Jésus. Où donc est cette gloire essentielle à votre divinité ? qu'est devenue la lumière qui vous environne ? à quel signe reconnaîtrons-nous cette puissance qui régit l'univers, cette sagesse infinie qui le gouverne, cette souveraineté qui embrasse à la fois le ciel, la terre et les enfers ? N'êtes-vous plus le Dieu du Sinaï, ce Dieu puissant dont la voix majestueuse ne se faisait entendre au peuple tremblant et prosterné au pied du mont sacré que mêlée aux éclats de la foudre, au son des trompettes et au feu des éclairs ? N'êtes-vous plus celui dont les cieux racontent la gloire, dont la main soutient la terre, pèse les collines et les montagnes ; celui qui prête au soleil la lumière qui nous éclaire, qui marche sur l'aile des vents, s'élève au dessus des nues et dirige le souffle de la tempête ? Oui, vous êtes toujours le même, ô mon Dieu ; mais ici tout est caché, tout est mystère ; votre gloire s'éclipse sous les voiles eucharistiques, et vous faites un plus grand prodige pour la dérober à nos yeux que tous ceux que vous fîtes jadis pour la manifester au monde.

    La foi m'apprend que mon Dieu est ici non seulement comme Dieu, mais encore comme homme ; qu'au fond de ce tabernacle réside Jésus, le Fils unique de cette Vierge bénie que toutes les générations appellent bienheureuse , le Verbe éternel par qui toutes choses ont été faites et qui existait avant la naissance des âges, ce Verbe qui est venu dans le monde et que le monde n'a point reçu, qui a paru parmi nous plein de grâce et de vérité, et que nous avons admiré non seulement comme le plus beau, mais encore comme le plus aimable et le plus saint des enfants des hommes.

     

    Je crois que vous êtes ici, adorable Sauveur, ma foi est ferme et inébranlable ; mais où sont donc les anges qui bercèrent de leurs chants votre premier sommeil ? Pourquoi se cachent-ils et ne font-ils pas entendre autour de cet autel les hymnes célestes qu'ils chantent dans le ciel pour célébrer vos grandeurs et votre gloire ? Pourquoi la voix du Père ne résonne-t-elle pas sous ces voûtes, comme elle le fit autrefois sur les bords du Jourdain et sur le Thabor, pour vous reconnaître pour son Fils et vous glorifier au milieu de vos abaissements ? Qu'est devenue votre puissance, ô mon Jésus ? N'êtes-vous plus celui qui affermissiez sous vos pas les eaux de la mer, qui voyiez ses vagues furieuses devenir caressantes sous vos pieds et respecter celui qui met un frein à leur fureur ? N'êtes-vous plus celui qui commandiez en maître aux éléments déchaînés et dont la tempête mugissante reconnaissait la voix, celui enfin dont les derniers soupirs firent pâlir le flambeau du soleil et ébranlèrent la sublime harmonie de l'univers ? Ah ! vous n'avez rien perdu de votre puissance, ô mon Dieu, vous êtes aujourd'hui ce que vous fûtes de toute éternité, ce que vous étiez aux jours de votre vie mortelle ; mais vous voulez nous instruire par le spectacle de votre humilité, combattre notre orgueil par l'exemple de vos abaissements et de vos humiliations, et cette leçon d'humilité, que vous nous donnez depuis dix-huit siècles, durera jusqu'au dernier jour du monde, jusqu'à ce jour terrible où vous reviendrez vous asseoir sur les ruines de l'univers, dans tout l'éclat de votre gloire, pour demander compte à chacun de nous de la manière dont nous avons suivi vos enseignements et vos exemples.

     

    Ici, ô mon Jésus, vous cachez non seulement les splendeurs de votre divinité, mais encore les charmes de votre adorable humanité : rien ne décèle votre présence ; vous vous humiliez, vous vous cachez, vous vous anéantissez pour nous laisser tout le mérite de la foi. Mais, hélas ! ô mon Dieu, cette foi est-elle bien vive parmi le peuple que vous avez choisi et au milieu duquel vous allez habiter ! Vos temples sont déserts, la solitude règne autour du sanctuaire, et un petit nombre d'adorateurs fidèles se pressent seuls autour de vos autels ! Le monde, ô mon Sauveur, méconnaît le Dieu qu'il ne voit pas ; l'impie blasphème le mystère d'amour que son orgueilleuse raison rejette parce qu'il ne le comprend pas, il vous insulte, il vous outrage, il se rit de la foi de ceux qui vous restent fidèles, il les méprise et leur jette en passant un regard de pitié et d'orgueilleux dédain.

     

    Ah ! entr'ouvrez, Seigneur, le voile qui vous cache à nos yeux ; laissez tomber sur vos autels quelques uns de ces rayons lumineux qui éblouirent vos apôtres sur le Thabor ; manifestez votre présence par quelque éclatant prodige, afin que ceux qui résistent à la puissance de l'amour cèdent au moins à celle de la crainte. Mais que dis-je, ô mon Dieu ! Vos pensées ne sont pas nos pensées, votre sagesse est infiniment au dessus de la nôtre, votre gloire n'est obscurcie ni par les blasphèmes de l'incrédule et les sarcasmes de l'impie, ni par l'indifférence et l'ingratitude de vos enfants, et celui qui a l'éternité pour manifester sa puissance et sa gloire, laisse le temps aux enfants des hommes et ne veut obtenir d'eux que des hommages et des adorations volontaires.

     

    Oh ! que ne m'est-il possible, ô cœur divin de mon Sauveur, de vous dédommager par ma ferveur et mon amour de l'oubli et de l'indifférence de tant d'âmes qui vous méconnaissent et vous outragent ? que ne puis-je vous aimer par leurs cœurs, vous bénir par leurs voix et vous rendre toutes les adorations qu'elles vous refusent ? Mais puisque je n'ai qu'un cœur à vous offrir, veuillez en agréer l'hommage, régnez-y en souverain, prenez-en une entière possession, et faites qu'il soit désormais soumis à votre loi et fidèle à pratiquer les vertus dont le vôtre nous a donné et nous donne encore de si parfaits exemples.

    Acceptez aussi, ô aimable Jésus, l'amende honorable que je vous fais en mon nom et en celui de tous mes associés pour tous les outrages que vous recevez sans cesse dans le sacrement de votre amour. Pardonnez, Seigneur, pardonnez à votre peuple, oubliez notre ingratitude, et ne vous vengez de ceux qui vous offensent qu'en les forçant à vous aimer, afin que tous vos enfants, réunis dans une même foi et un même amour, n'aient plus qu'un cœur pour vous aimer, qu'une voix pour vous bénir et répéter sans cesse : Loué, aimé, adoré soit à jamais le cœur adorable de Jésus dans le très-saint sacrement de l'autel !

    Ainsi soit-il.

    Source : Livre "Trésor des associés du Sacré-Cœur de Jésus ou premier vendredi de chaque mois sanctifié par la méditation et la communion"