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Notre-Dame de Bonne Garde (Longpont sur Orge)
Notre-Dame de Bonne Garde
(Longpont sur Orge)
A Longpont, dans la vallée de l'Orge, sur le chemin de fer d'Orléans, près de la station de Saint Michel, Notre-Dame de Bonne-Garde n'a pas moins de célébrité et paraît bien plus ancienne.
Selon de vieilles chroniques, ce fut Priscus, roi des Carnutes, au temps des druides, qui fit faire la statue aujourd'hui vénérée ; selon d'autres, ce furent des bûcherons de la forêt de Longpont, qui, a la même époque, trouvèrent dans le creux d'un chêne de cette forêt la statue avec la fameuse inscription, Virgini pariturœ : A la Vierge qui doit enfanter, et qui élevèrent au lieu même de cette mystérieuse découverte un monument destiné à en perpétuer le souvenir.
Ce qui est certain, c'est que, dès le neuvième siècle, la Vierge de Longpont était en si grande vénération, que, l'an 1000, le roi Robert vint lui-même poser la première pierre de l'église que la piété des peuples voulait lui élever ; et il était accompagné dans cette cérémonie de l'évêque de Paris, de Guy, seigneur de Montlhéry, et d'Odierne son épouse.
C'est là un fait constaté par une inscription sur marbre noir, qui se conserve encore dans l'église.
Cette première pierre posée, Guy et Odierne se dévouèrent tout entiers a la construction de l'édifice ; non-seulement ils fournissaient à la dépense, mais ils surveillaient l'ouvrage, et l'on vit même la pieuse Odierne y travailler de ses propres mains, apporter les seaux d'eau aux manœuvres et préparer le ciment.
Quand l'édifice fut achevé, Odierne, préoccupée d'en assurer le service religieux, fit construire près de l'église un monastère, et y établit vingt-deux religieux, qu'y envoya a sa prière saint Hugues, abbé de Cluny.
Une fondation si belle accrut la renommée de la Vierge de Longpont ; les rois, les seigneurs, les simples fidèles, y accoururent à l'envi.
Dans une charte de l'an 1040, Geoffroy, évêque de Paris, d'où Longpont dépendait alors, célèbre cette église comme « bâtie et dédiée en l'honneur de la Mère de Dieu ».
L'an 1200, nous la voyons signalée dans l'histoire comme « lieu de grande dévotion ».
En 1304, nous voyons Philippe le Bel y venir prier ; les années suivantes, il y réitère ses pieuses visites.
Plus tard, Louis de France, fils de Philippe le Hardi, y prend l'habit religieux, y mène la vie d'un saint, et y laisse une mémoire bénie, que consacre son épitaphe en lettres d'or sur marbre noir.
Saint Bernard en allant au concile d'Étampes, et sainte Jeanne de Valois en se retirant à Bourges, viennent se prosterner aux pieds de Notre-Dame de Bonne-Garde et se placer sous son patronage.
Mais il est un fait qui prouve mieux encore que tous les pèlerinages la sincère dévotion des peuples à la Vierge de Longpont : c'est la donation que tant de pieux fidèles, dans tous les rangs de la société, lui font de leurs biens, c'est la sainte ardeur avec laquelle on se dépouille pour l'enrichir.
Sans parler de Charles VIII et d'Anne de Bretagne, qui firent réparer et achever le portail de l'église, nous voyons, en 1070, le moulin de Groteau et ses dépendances donnés par le même seigneur de Montlhéry qui avait bâti l'église et le monastère, puis une autre terre avec deux mesures de froment données par Ameline, fille de Gautier Penel.
En 1076, Godefroy et son épouse donnent la terre de Luisant.
De 1086 à 1136, Gauthier de la Bretonnière donne sa terre de Bretigny, Aymon, cinq mesures de froment ; Guy, fils de Milon, sa terre de Vert-le-Grand, et le petit-fils de ce même Milon, toutes ses possessions qui étaient considérables, en ajoutant qu'il se donnait lui-même au monastère après sa mort pour y être enterré.
Robert Payen donne toute la dîme qu'il touchait à Villiers ; Hersende, sœur du prieur, ses terres de Fontaine, de Cossigny et autres ; Frédéric, fils de Gaudry et Isambert, envoie de riches présents ; Gauthier Tyrel, en partant pour la croisade, laisse sa dîme de Viry ; Manassès de Torfou et sa femme Béatrix lèguent leurs terres d'Égly, de Boissy et autres lieux.
En 1142, Guillaume, comte de Montlhéry, donne sa dîme de Bretigny et les environs.
En 1195, Milon d'Aunay donne un clos à Leuville.
Au quatorzième siècle, M. de Villeboisin s'engage à fournir à perpétuité tout le vin nécessaire pour les messes de chaque jour.
Depuis cette époque, les donations sont encore plus considérables ; et parmi elles, nous distinguons la jolie église de Saint-Julien, qui servait de chapelle à l'Hôtel-Dieu de Paris et qui fut donnée à Notre-Dame de Longpont par un chevalier français, Étienne de Vitry, lequel, dans une tempêté, fit vœu de cette donation, s'il échappait à la mort.
Il échappa en effet, et il tint parole ; c'est ce que nous atteste une pierre placée dans le latéral gauche de cette église.
Ainsi la Vierge de Longpont était aimée non-seulement en sentiments et en paroles, mais en œuvres ; et l'on prenait plaisir à déposer à ses pieds des richesses périssables que les religieux du monastère employaient ensuite à la magnificence de son culte, à la réception des pèlerins, au soulagement des pauvres, à l'éducation de l'enfance, à la conservation des chefs-d'œuvre du génie, des trésors littéraires de l'antiquité, en même temps qu'aux études graves et sérieuses, qui profitent tout à la fois à la religion et à la société.
A ces avantages temporels, les souverains pontifes ajoutèrent les faveurs spirituelles les plus signalées.
En 1155, Eugène III soumit à l'abbaye, à perpétuité, les églises de Champlans, Boudoufle, Orsay, Pecqueuse, Forges, Nosay et Orangis, c'est-à-dire qu'il lui confia le service religieux de ces églises et leurs revenus.
Plus tard, Alexandre III lui adressa une bulle dont le sceau a été retrouvé dans une fouille faite aux environs de l'église, dans l'ancien cloître, et l'on ne peut douter que cette bulle perdue ne contint aussi des privilèges.
Une chose surtout valut à Notre-Dame de Longpont les grâces particulières du saint-siège, ce fut sa confrérie, dont on trouve des traces, au moins très-probables, jusque dans une charte du douzième siècle, qui mentionne les Frères de Notre-Dame de Longpont.
Cette confrérie devint une institution si considérable dans le diocèse de Paris, que l'archevêque Hardouin de Péréfixe lui obtint du pape Alexandre VII une bulle d'indulgence, datée du 13 juin 1665, et la fit proclamer tant à la métropole que dans toutes les paroisses du diocèse.
Une copie de cette bulle, déclarée authentique par l'archevêque de Paris, est encore aujourd'hui exposée à la chapelle de la confrérie.
En la lisant, on y voit avec bonheur le but édifiant de la confrérie, et ce à quoi s'engageaient tous ceux qui en faisaient partie.
Il ne s'agissait pas seulement d'inscrire son nom dans un registre, et de faire quelques prières ; il fallait se dévouer, chacun selon son rang et son pouvoir, à procurer la plus grande gloire de Dieu, à sauver les âmes, à soulager les pauvres, à sanctifier ses journées par les bonnes œuvres, et venir souvent ranimer sa ferveur dans le sanctuaire vénéré où Marie épanchait plus particulièrement les grâces dont elle est la dispensatrice.
Pour encourager de si bonnes et si saintes pratiques, Alexandre VII accorde aux confrères une indulgence plénière, 1° le jour de leur entrée dans la confrérie ; 2° à l'article de la mort ; 3° à toutes les fêtes de la Conception, de la Nativité, de l'Annonciation, de la Purification et de l'Assomption de la sainte Vierge, pourvu qu'ils aient visité l'église entre les premières vêpres et le soleil couché de la fête, et qu'ils y aient prié selon les intentions ordinaires du saint-siège, après s'être confessés et avoir communié.
Le souverain pontife leur accorde en outre une indulgence de sept ans et sept quarantaines, toutes les fois qu'ils assisteront aux messes et offices de ladite église, qu'ils prendront part aux assemblées tenues pour le bien de la confrérie, qu'ils feront quelque œuvre de charité corporelle ou spirituelle, comme de consoler les affligés, de visiter les malades, d'accompagner le saint sacrement quand on le porte à ces derniers, ou de réciter un Pater et un Ave à leur intention.
Soutenue par ces faveurs spirituelles, la confrérie prospéra jusqu'à la révolution de 1792 : au milieu des désastres religieux et politiques qui signalèrent cette époque, elle disparut.
Mais, en 1850, plusieurs personnes s'étant unies dans le dessein de la reconstituer, Mgr l'évêque de Versailles approuva cette pieuse pensée ; et par ordonnance du 7 juin 1851 il érigea canoniquement cette association sous le titre de confrérie de Notre-Dame de Bonne-Garde.
Pie IX , de son côté, qui, par son bref du 24 mars de la même année, avait autorisé l'évêque à cette érection, accorda les mêmes indulgences partielles qu'Alexandre VII, et ajouta aux cinq indulgences plénières concédées par son prédécesseur, sept autres indulgences pour sept jours au choix de l'évêque.
L'évêque fit ce choix, et désigna les fêtes de saint Joseph et de sainte Anne, de l'Invention et de l'Exaltation de la sainte Croix, de saint Denis, de saint Benoît, et de saint Marcel, évêque de Paris.
Le registre de la confrérie ainsi rétablie ne tarda pas a se couvrir de noms honorables : déjà, au mois de septembre 1850, Mgr Verroles, l'apôtre de la Mandchourie, était venu aux pieds de Notre-Dame de Bonne-Garde lui recommander sa mission, et s'était inscrit de sa main sur ce registre : bientôt neuf évêques, dont deux cardinaux, grand nombre d'ecclésiastiques et de fidèles de toute condition, vinrent s'enrôler sous l'étendard de la Vierge fidèle, et, tous les jours encore, la confrérie va croissant en nombre comme en ferveur.
L'église de Longpont ne possède plus de ses anciennes reliques qu'un fragment du voile ou des vêtements de la sainte Vierge et une parcelle de sa ceinture, renfermés dans deux tubes de cristal, scellés aux armes de l'évêché.
Il est fait mention au onzième siècle de ces reliques, renfermées alors dans ce qu'on appelait les phylactères de la bienheureuse Vierge.
L'église a également beaucoup perdu de sa beauté architecturale par les mutilations que lui ont fait subir soit les guerres de religion, soit la révolution de 92.
Le portail, d'une date plus récente que le reste de l'édifice, appartient au treizième siècle. La statue de Notre-Dame désignée sous le titre de Porte du Ciel, Janua Cœli, est adossée au trumeau de la porte principale. Au-dessus de cette porte est représentée l'Assomption de la sainte Vierge en trois bas-reliefs : à droite, vous voyez la Mère de Dieu sur son lit de mort ; à gauche les Apôtres déposant son corps virginal dans le tombeau ; au-dessus Marie assise sur le trône céleste.
A droite, est une niche surmontée des armes d'Anne de Bretagne, et à gauche est une autre niche portant l'initiale de Charles VIII. L'une et l'autre étaient autrefois ornées des statues de ces princes.
L'intérieur de l'église, dans laquelle il faut descendre par sept marches, est partagé en trois parties, la nef et les collatéraux. Les arcades a plein cintre et les fenêtres étroites indiquent assez l'architecture usitée sous les rois de la seconde race.
La nef, très-simple, compte quatorze piliers ou plutôt quatorze faisceaux de piliers, et se termine par une abside sous laquelle est élevé le maître-autel. A droite, au fond du bas côté, repose, selon l'inscription qu'on y lit, le corps de Guy Ier, seigneur de Montlhéry, fondateur de l'église, et dans le chœur, au pied du maître-autel, celui d'Odierne, sa pieuse épouse. A gauche se voit la chapelle de la confrérie, ornée de nombreux ex-voto.
La lampe qui brûle devant le saint sacrement porte l'inscription suivante : Ex-voto, 8 septembre 1850.
Enfin, pour terminer notre récit, nous ajouterons que le 9 octobre 1850, l'église, réparée par les soins de l'État, a été consacrée par Mgr l'évêque de Versailles ; et un mois après, l'autel de la confrérie de Notre-Dame de BonneGarde a été consacré à son tour par Mgr l'évêque de la Basse-Terre à la Guadeloupe.
Source : Livre "Notre-Dame de France ou Histoire du culte de la Sainte Vierge en ..., Volume 1" par André Jean Marie Hamon
En savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Basilique_Notre-Dame-de-Bonne-Garde_de_Longpont-sur-Orge