• Notre-Dame de Benoîte-Vaux (Rambluzin-et-Benoite-Vaux)

     

     

     

    Notre-Dame de Benoîte-Vaux

    (Rambluzin-et-Benoite-Vaux)

     

     

     

    Il existe dans le département de la Meuse, à peu près à égale distance de Bar-le-Duc et de Verdun, une vallée qui porte, de temps immémorial, le nom de Benoîte-Vaux ou Vallée-Bénie.

    Le voyageur qui s'y rendrait, sur la foi de ce doux nom, éprouverait une cruelle déception en n'y trouvant qu'un pays abrupte et sauvage, un sol ingrat, un site qui manque de grâce aussi bien que de grandeur. Les lieux les plus sauvages ont leur poésie mystérieuse ou terrible ; mais ce paysage abrupte n'a rien qui parle au cœur ou qui charme l'imagination, rien qui puisse justifier à nos yeux étonnés le surnom de Vallée-Bénie, et, si l'on en croit la tradition, il le méritait bien moins encore, quand ce surnom lui fut donné.

    Ce n'était alors qu'une épaisse forêt, détrempée par des eaux stagnantes, d'où s'exhalaient des miasmes pestilentiels, un lieu inhabitable et inhabité, où des malfaiteurs mêmes eussent craint de chercher un asile.

    De pauvres bûcherons qui venaient des villages voisins, pour y gagner leur vie, étant, un jour, occupés à abattre un arbre sur un des coteaux qui bornent la vallée, aperçurent, non loin d'eux, une statue dont ils s'approchèrent avec curiosité.

    Ils la relevèrent et jugèrent que ce devait être une image de la vierge Marie, quoiqu'ils n'en eussent point vu encore de semblable ; car elle soutenait d'une main l'enfant divin, et tenait dans l'autre un fruit qu'elle semblait lui montrer.

    Cette découverte les remplit de joie, et, dans leur foi naïve, ils s'agenouillèrent devant la sainte image !

    Puis, pour mieux l'honorer, ils la placèrent sur un tronc d'arbre, qu'ils façonnèrent en un piédestal grossier, l'abritèrent sous une tente de feuillage et cueillirent, pour orner cet autel, tout ce qu'ils purent trouver de fleurs des champs.

    Leur travail les ayant ramenés au même lieu les jours suivants, ils se firent un devoir et un bonheur d'y réciter une fervente prière.

    Ils prenaient leur frugal repas près d'une petite fontaine, très-peu éloignée de leur rustique autel, et ils y demeuraient quelques instants pour se délasser avant de reprendre la hache ou la cognée.

    Un jour qu'ils se reposaient ainsi, leurs oreilles furent charmées par des sons si harmonieux, si suaves, qu'ils n'en avaient jamais entendu de semblables.

    Ils s'écrièrent d'une commune voix que cette musique venait du ciel, et ils se virent forcés de le croire après avoir cherché de tous côtés sans rien découvrir.

    Ils écoutèrent longtemps avec ravissement, et ils demeurèrent convaincus qu'ils avaient entendu les anges eux-mêmes chanter les louanges de la vierge Marie.

    De retour au village, ils racontèrent à leurs parents et à leurs amis la découverte qu'ils avaient faite d'une image qui devait être miraculeuse, puisqu'elle avait été saluée par des concerts angéliques.

    Chacun voulut voir la statue, et chacun admira, comme l'avaient fait nos pauvres bûcherons, la douceur ineffable empreinte sur les traits de la Vierge mère.

    De nouveaux prodiges récompensèrent l'empressement des villageois, et bientôt on accourut de loin pour implorer l'assistance de Marie, en s'agenouillant devant son image.

    Dès lors la triste vallée de Martin-Han prit le nom de Benoîte-Vaux ; une chapelle y fut dédiée à Notre-Dame, et des religieux de Saint-Norbert furent chargés de la desservir.

    Les miracles succédant aux miracles, ce sanctuaire reçut de toutes parts de magnifiques offrandes ; et si ces miracles n'ont pas été écrits, les pères en ont transmis le souvenir à leurs enfants.

    Notre-Dame de Benoîte-Vaux était en vénération dans toute la Lorraine dès le règne de Louis XI ; car le bon roi René, vainqueur du duc de Bourgogne à Nancy, ne se contenta pas de faire élever une chapelle à la Vierge au lieu même où son redoutable adversaire avait succombé ; il vint avec toute sa cour à Benoîte-Vaux, et, déposant son épée sur l'autel de Marie, il lui fit hommage de sa victoire et plaça sous la toute-puissante protection de la reine du ciel sa dynastie et ses États.

     

    Ses successeurs l'imitèrent, et chacun d'eux tint à honneur de laisser à la chapelle de la Vallée-Bénie un témoignage d'amour et de confiance.

    Ils y venaient rendre grâces de leurs prospérités, et quand arriva pour eux l'heure des revers, quand Richelieu, irrité de n'avoir pu se faire du duc Charles lV un allié fidèle, appela les Suédois sur la Lorraine désolée, les populations se pressèrent en foule dans le sanctuaire de Benoîte-Vaux, pour demander non plus des victoires, mais la résignation et l'espérance en des jours meilleurs.

    Au milieu des horreurs de la guerre, de la peste, de la famine, une nouvelle épreuve était réservée aux catholiques lorrains.

    La chapelle de Benoîte-Vaux fut envahie, Marie fut insultée et menacée dans son temple.

    Mais une héroïne se leva pour la défendre : la baronne de Saint-Balmont accourut à la tête d'une poignée d'hommes armés, arracha la sainte image aux violences des protestants et lui donna un asile dans son château, où elle fut entourée d'un culte filial jusqu'à ce qu'elle pût reprendre possession de la Vallée-Bénie.

    Enfin, quand la Lorraine, confisquée par le succès des armes et de la politique du cardinal de Richelieu devint une province du royaume de France, un cri d'angoisse et de douleur partit du cœur de ce peuple si jaloux de sa nationalité, si tendrement dévoué à ses princes ; tous les yeux se tournèrent vers Benoîte-Vaux, et de tous côtés s'organisèrent de solennelles manifestations de la piété des fidèles envers la vierge Marie.

    Toutes les villes un peu importantes firent leur pèlerinage à ce célèbre sanctuaire : Bar-le-Duc, Verdun, Commercy, Clermont, Etain, Saint-Mihiel, Varennes, Mirecourt, Château-Salins y envoyèrent leurs députés. Ces pèlerinages semblaient être une protestation contre les malheurs et l'asservissement du pays, ou plutôt c'etait une grande, une ineffable consolation pour ces pauvres gens, car ils se disaient : On nous a ôté nos princes bien-aimés, on ne pourra pas du moins nous ravir notre auguste reine, la très-sainte et très-miséricordieuse vierge Marie. 

    Que de larmes coulèrent alors au pied de l'autel de Benoîte-Vaux ! Que de douleurs trouvèrent un refuge dans l'infinie bonté de la mère de Dieu ! Ah ! quand cette miraculeuse chapelle ne serait qu'un monument consacré par tant de patriotisme, quand il n'aurait pour nous que la religion des souvenirs, combien il devrait être précieux à ce peuple lorrain, devenu français de cœur, mais encore fier de sa gloire et de son indépendance d'autrefois !

    Toutefois, il n'en est pas ainsi : la Vallée-Bénie a d'autres titres à nos respects ; car la Vierge qu'on y honore et qui a répandu sur nos pères des trésors de grâces, est encore prête à nous combler de ses bénédictions.

    La ville de Nancy, capitale de la Lorraine, se distingua entre toutes les autres par le nombre des pèlerins qu'elle envoya à Benoîte-Vaux, et auxquels toute la cité s'unit par de ferventes prières.

    Le clergé, la noblesse, la magistrature, les notables, les différents corps des arts et métiers avaient leurs représentants dans ces douze cents pèlerins, qui partirent de la collégiale Saint-Georges, après avoir reçu la sainte communion, et marchèrent pendant quatre jours, en chantant les louanges de Marie.

    Les bonnes gens des campagnes se pressaient sur leur passage, le clergé des villes allait à leur rencontre, et chacun leur enviait le bonheur d'aller invoquer la Vierge sainte dans son sanctuaire préféré.

    La chapelle de Benoîte-Vaux étant trop petite pour les contenir tous, les pèlerins, agenouillés au dehors, attendaient avec une pieuse impatience le moment d'y pénétrer, pour assister aux saints mystères et y recevoir le pain des forts.

    Avant que l'hostie sacrée eût touché les lèvres d'un seul d'entre eux, le président de la cour des comptes s'avança vers l'autel, un flambeau à la main et dit d'une voix haute et ferme :

    « Marie, mère de Dieu, au nom de tous les pèlerins et des deux duchés de Lorraine et de Bar, je vous choisis aujourd'hui pour dame, patronne et avocate. Je vous supplie très-affectueusement qu'il vous plaise me recevoir pour votre perpétuel serviteur. Assistez-moi dans toutes mes actions et ne m'abandonnez pas à l'heure de ma mort. »

    Les pèlerinages des autres villes ne se firent pas avec moins de recueillement et de solennité, et jusqu'au funeste règne de la terreur, la chapelle de Benoîte-Vaux fut assidûment visitée.

    Ce sanctuaire ne pouvait échapper à la fureur révolutionnaire ; plus il était célèbre, moins il devait être oublié de ceux qui avaient juré une haine mortelle à la religion, à ses gloires et à ses monuments. 

    Notre-Dame de la Vallée-Bénie fut renversée de son trône, et le lieu où elle avait établi sa demeure fut impitoyablement saccagé et profané.

    Mais, malgré ces sacrilèges dévastations, il était resté cher aux âmes chrétiennes, et dès qu'un peu de calme revint, les sentiers de Benoîte-Vaux furent encore foulés par les pèlerins.

    Toutefois rien dans cette pauvre enceinte ne rappelait la splendeur des anciens jours, et l'on ne pouvait la visiter sans avoir le cœur serré à la vue de cette tristesse et de cet abandon.

    Un pieux prélat, Mgr Letourneur, appelé au siège de Verdun, ne voulut pas en prendre possession avant d'avoir fait à Notre-Dame de Benoîte-Vaux l'hommage de son diocèse, et l'avoir suppliée de bénir son administration.

    A peine assis sur le siège épiscopal, il entreprit de restaurer ce sanctuaire, où la Vierge avait été si longtemps et si pieusement invoquée.

    La mort ne lui laissa pas le temps d'accomplir son œuvre ; mais son successeur l'acheva, et Marie voit encore chaque jour se presser au pied de son autel tous ceux qui ont besoin de secours et de consolations.

    C'est encore à l'obligeance de M. l'abbé Gouget que nous devons ces détails, et nous ne pouvons résister au désir de reproduire ici les belles paroles par lesquelles il terminait, en 1853, un éloquent discours prononcé dans la chapelle de Benoîte-Vaux :

    « O Marie ! il y a deux cents ans, vous vites toute la nation lorraine accourir ici et s'agenouiller devant vous ! Dans quel affreux état elle était alors réduite ! Vous vous le rappelez. La voilà encore aujourd'hui, dans une partie de ses enfants, toujours fidèle à votre culte et à votre sanctuaire. Vous les reconnaissez.... En les regardant, vos yeux, vos entrailles maternelles vous disent : Oui, ce sont bien les fils des croisés, les compatriotes de Godefroy de Bouillon et de Jeanne d'Arc, les arrière-neveux de ceux qu'on appelait les derniers héros chrétiens ! O Marie ! ayez encore pitié des maux qui nous affligent ! La guerre, la famine et la peste sont, dans l'ordre moral, des plaies qui nous dévorent cruellement. Soyez encore une fois notre consolation et notre refuge ; soyez, comme il y a deux cents ans, notre dame, notre avocate, notre patronne, et, de cette main que l'impiété n'a pu briser, daignez nous bénir, afin que nous nous relevions dignes de Dieu, dignes de vous, dignes du ciel. »

    Source : Livre "Les pèlerinages de France" par Eugène Rosary

     

     

    Benoite-Vaux, situé dans le département de la Meuse, sur la commune de Rambluzin-et-Benoite-Vaux est un lieu de pèlerinage marial très populaire en Lorraine, situé dans un vallon entouré de forêts.

     

    Histoire

     

     

    Vers 1157, Albéron de Chiny, évêque de Verdun, donne à l'abbaye prémontrée Notre-Dame de l'Étanche, la terre de Basse-Ham que l'on appellera bientôt Benoite vallée.

    La légende veut que des bûcherons entendirent des voix célestes chantant l'Ave-Maria et, se dirigeant vers l'endroit d'où provenait cette mélodie angélique, ils découvrirent près d'une source, une statue de la Vierge.

     

    Un pèlerinage sera fondé en ce lieu et administré par les pères prémontrés.

    En 1638, pendant la guerre de Trente Ans, la statue sera mise à l'abri au château de Neuville-en-Verdunois par Barbe d'Ernecourt, dame de Saint-Baslemont.

    La statue primitive, brisée en 1793, sera remplacée après la Révolution par la statue surmontant la source, elle aussi très ancienne et ressemblant à la statue originelle.

    L'hôtellerie, entretenue un temps par les sœurs de la Foi d'Haroué, est aujourd'hui administrée par les sœurs de Saint-Joseph de Saint-Marc.

    Le pèlerinage se tient tous les ans lors de la première semaine de septembre.

    Source

    En savoir plus :

    http://www.cc-meuse-voie-sacree.fr/public/?code=le-patrimoine-de-rambluzi

    http://www.introibo.fr/Notre-Dame-de-Benoite-Vaux