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La palme miraculeuse d'Azalaïs de Toulon
La palme miraculeuse d'Azalaïs de Toulon
C'est vers 1295 que Raymond Féraud entreprit son poème, surl'ordre de l'abbé Gaucelm.C'était plutôt le légendaire, que la vie elle-même du saint.Aussi déploya-t-il une étonnante imagination dans la mise enœuvre des miracles et des pèlerinages de Lérins.En voici un épisode, entre plusieurs également exquis :Dame Azalaïs qui était de Toulon avait accompli durant septannées le pèlerinage du couvent.Elle avait obtenu, enfin, la palme qu'on décernait aux plus fidèles.La guerre et la famine s'abattirent un jour si durement sur laterre de Toulon, que tous les malheureux durent l'abandonner.Azalaïs s'en fut à Marseille avec sa dernière robe et la palmepieuse.Quand elle se vit sans aucune ressource, la bonne âme en pritune feuille, et croyant que chacun, dans sa dévotion, l'estimerait,comme elle, précieuse, elle la porta au changeur en lui disant :— Seigneur, je veux te vendre une chose qui m'est bien chère, etje te prie, par le Dieu tout puissant, de m'en donner or ou argent.Le changeur regarda la feuille, et, pour plaisanter l'innocente, ilfit venir d'autres changeurs, et lui demanda devant eux ce qu'elleen voulait.— Quatre feuilles d'or semblables, quoique la feuille vale plus,répondit-elle.— Par ma foi, répliqua le changeur, je n'ai pas d'or sigrand‘foison que je le donne pour une feuille de palme. Maisje consens à t'en donner le poids en deniers de Marseille, puisquela feuille est précieuse.— Or fais, Seigneur, ce qu'il te plaît, reprit la femme bien marrie.Le riche marchand prend ses balances, déplie avec grand soin lafeuille enveloppée de soie, d'un air de se moquer, et il la met surun plateau, avec douze deniers dans l'autre.La feuille pesa bien davantage !Alors le marchand plaça cinquante sols en contrepoids : la feuilleles emporta encore ; puis dix livres d'or, qu'elle enleva commeun petit bouton.Émerveillé de ce qu'il voit, le marchand demande humblement à lapauvre femme comment cette feuille a vertu si grande.Et Azalaïs lui explique que c'est la palme de son pèlerinage àSaint-Honorat de Lérins.Alors le changeur tombe à genoux et requérant, avec humilité, etson pardon et des prières, donne si grande quantité de sonavoir à cette sainte femme, qu'elle ne connaîtra plus jamaisla pauvreté.Source :